L'exécutif de Swiss Olympic a dit «oui» à une candidature pour des Jeux olympiques d'hiver en Suisse. Mais une critique de poids sur ce méga-événement vient du sport lui-même. Faut-il craindre que les fédérations sportives suisses elles-mêmes enterrent le projet le 24 novembre au Parlement du sport?
Plusieurs fédérations olympiques d'été traditionnelles font actuellement la moue. C'est moins la candidature en elle-même qui sème le doute que l'ordre chronologique des éventuelles grandes manifestations en Suisse. Swiss-Ski, fervent défenseur de l'idée olympique, souhaite organiser les JO d'hiver en 2030. Un objectif désormais partagé par Swiss Olympic.
Mais 2030 est une année très convoitée dans le sport suisse. Parce que l'organisation des Championnats sportifs européens, qui ont suscité un véritable enthousiasme avec leur concept en 2022 à Munich (pour une fraction du coût des Jeux olympiques, notons-le), apparaît également comme une belle opportunité pour notre pays cette année-là.
La Suisse est un organisateur convoité pour l'organisation simultanée et coordonnée de six à dix championnats d'Europe (CE) dans des sports olympiques. Et grâce à la bonne diplomatie traditionnelle de notre pays, le retour au programme des Championnats européens des sports clés que sont la natation (absente du programme depuis 2022) et l'athlétisme (absente de la prochaine édition en 2026) est même sérieusement à l'ordre du jour.
Swiss Olympic est en charge de ce projet, tout comme d'une éventuelle candidature olympique. Deux ateliers ont été organisés en collaboration avec les disciplines sportives potentielles. Des échanges ont eu lieu avec le détenteur des droits des Championnats européens. Une étude de faisabilité doit désormais confronter le rêve à la réalité.
En attendant, Thomas Peter, directeur de Swiss Cycling, est agacé. Il ne comprend pas pourquoi les études de ces deux projets (CE et JO) n'ont pas été développées ensemble, dans le même temps. Il n'a personnellement rien contre les Jeux Olympiques, mais il lui manque, par-delà ce projet d'envergure, l'objectif stratégique global de promotion du sport suisse.
Peter critique le fait qu'à cause des Jeux, d'autres thèmes durables et mûrs à long terme, comme le Parc olympique, soient tout simplement mis de côté. Le Bernois est d'avis que les Championnats européens seraient plus appropriés pour 2030. Et il ose un pronostic:
Christoph Seiler, président de Swiss Athletics, est lui aussi favorable à ce que les priorités soient définies comme suit: d'abord les European Championships en 2030, puis les Jeux olympiques d'hiver en 2034 ou plus tard.
Le dirigeant, qui rappelle qu'il exprime son opinion personnelle sur le sujet, est convaincu que les Championnats européens bénéficieront d'un plus grand soutien de la part de la population que les Jeux. Selon lui, l'organisation des épreuves continentales offre également des chances de développement plus durable pour le sport suisse. «Pour neuf disciplines sportives, cet événement peut être la même étincelle que celle qui est apparue au sein de l'athlétisme suisse après les championnats d'Europe à domicile de 2014.»
Christian Stofer, lui, est directeur de Swiss Rowing. L'aviron fait également partie du programme des Multi-European Championships. Il ne votera certainement pas contre les Jeux olympiques d'hiver, mais il voit lui aussi «un énorme potentiel pour notre sport avec l'organisation de ce produit très dynamique que sont les Championnats européens». Et il souligne que le projet des CE est également une campagne nationale commune.
A cet égard, le détenteur des droits des European Championships a évolué au cours des derniers mois. Il y a six mois encore, le Soleurois Marc Jörg, le véritable créateur des CE, disait qu'il ne voyait pas plus de deux villes hôtes qui accueilleraient l'évènement à tour de rôle. Mais actuellement, lui et ses partenaires sont encore à la recherche d'un organisateur pour 2026. Il ne serait pas contre l'idée de confier l'organisation de 2030 bien plus tard. Une flexibilité qui lui permettrait d'attendre la décision du CIO pour l'attribution des Jeux d'hiver de 2030.
Toute la question désormais est de savoir comment Swiss Olympic entend résoudre la querelle naissante entre les fédérations de sports d'été et d'hiver. Le directeur Roger Schnegg se veut très clair: «Il ne faut pas jouer l'un contre l'autre. L'une des manifestations n'exclut pas l'autre.» Le président Jürg Stahl déclare quant à lui «étudier de manière approfondie l'organisation des European Championships en 2034. Mais si on choisit de mettre l'accent sur les JO en 2034, on examinerait alors une candidature des Multi-European Championships pour 2030.»