Il a chanté pendant un changement de côté, sur le banc. Il a mis au défi le public new-yorkais déjà bruyant de faire encore plus de bruit. Il a ri. Il a occupé la grande scène comme s'il était né pour ça. Au final, l’US Open 2023 restera le tournoi où Dominic Stricker a percé. Le conte de fées s'est terminé lundi soir en huitièmes de finale contre un parfait Taylor Fritz (7-6 6-4 6-4).
Après Roland Garros et Wimbledon, Stricker a accédé pour la troisième fois d'affilée au tableau principal d'un tournoi du Grand Chelem. Il a remporté un match à Paris, un à Wimbledon et trois à New York. «C'est la confirmation que nous travaillons sur les bonnes choses», s'encourage-t-il. Son succès contre Stefanos Tsitsipas (ATP 7), en très petite forme et résolument amoureux, était son premier contre un joueur du top 10.
La récompense: Stricker gagne environ 40 places au classement ATP et entre pour la première fois dans le top 100, un cap hautement symbolique pour tout joueur de tennis. Ce classement lui évitera de disputer les qualifications en Grand Chelem: désormais, le Bernois accèdera directement au tableau principal. Il en retirera également une certaine sécurité financière, avec une planification plus prévisible. A l'US Open, son prize-money de 251 000 francs (avant impôts de 30%) a porté d'un seul coup son revenu annuel à plus d'un demi-million de francs. Une somme dont le jeune homme de 20 ans aura besoin pour financer un staff relativement fourni.
Stricker a goûté au doux parfum du succès à l'US Open - également en évitant de plus en plus les sucreries. Il l'a reconnu spontanément: «Je mange moins de chocolat, moins de sucre, ça a beaucoup changé.»
Depuis ses débuts difficiles sur le circuit professionnel, des prophéties catastrophistes l'accompagnent au gré des défaites: on le dit pas complètement formé et peu enclin à l'effort. Or jusqu’à présent, Stricker a remporté les trois matchs en cinq sets qu'il a eu l'occasion de disputer.
Néanmoins, les critiques ne sont pas le fruit du hasard. C'est précisément dans le domaine athlétique que l'entraîneur Dieter Kindlmann voit le plus grand potentiel de progression. Surtout quand on compare le physique de Dominic Stricker avec celui de Carlos Alcaraz et Holger Rune, d'une année plus jeunes. Il est difficile d'imaginer à quel point les possibilités sont immenses lorsqu'un talent comme Stricker devient également un athlète modèle.
Stricker n'est ni Alcaraz ni Rune, il suit son propre chemin. Les comparaisons presque inévitables et éternelles avec Roger Federer ne semblent pas davantage le déranger. Et à juste titre: hormis l’origine, il n’y a pratiquement aucune similitude entre les deux Suisses. Stricker est gaucher, frappe son revers à deux mains, se sent à l'aise sur dur, la terre et l'herbe, mais il reste un joueur de fond de court malgré son style offensif.
A partir de lundi, il ne fera plus la navette entre le circuit Challenger et le grand monde du tennis: il a gagné sa place dans l'élite. Pour l'instant du moins. Le moment et le lieu où Stricker reprendra la compétition ne sont pas encore définis. Il est maintenant temps de savourer – peut-être avec un peu de chocolat.