Si l'histoire n'est pas vraie, elle est au moins bien inventée et encore mieux racontée: une chaussure fabriquée à partir d'un tuyau d'arrosage dans un garage de Zollikon (ZH) est désormais un produit mondial, plus beau et plus confortable que tout ce qui existait auparavant.
C'est ainsi que la marque de chaussures suisse On, dont Roger Federer est devenu actionnaire en 2019, en fait le récit.
Le prochain chapitre s'intitule «La marque de sport suisse On à la conquête du monde du tennis». Parce que chez On, seul le meilleur est assez bon: la marque suisse a signé en mars dernier, à grand renfort de moyens financiers, Iga Swiatek. La numéro 1 mondiale a remporté Roland-Garros et l'US Open en 2022. Roger Federer a personnellement fait des démarches auprès de la Polonaise de 22 ans, très convoitée par les équipementiers, a raconté Swiatek en mars.
Iga Swiatek jouera à l'avenir avec une version sur mesure de la chaussure «THE ROGER Pros». Federer a contribué à la développer et l'a portée en mars 2021 à Doha, lors de son retour après une pause d'un an.
Iga Swiatek porte depuis avril des vêtements de la marque zurichoise, mais pas ses chaussures. A Paris, elle mise – comme à Stuttgart, Madrid et Rome – sur la «Gel Resolution» du concurrent japonais Asics, chez qui elle était sous contrat de 2020 à fin 2022. Selon nos informations, Asics a tout fait pour garder la Polonaise sous contrat, mais n'a pas pu rivaliser avec l'offre financièrement plus lucrative de On. Pour remplacer Swiatek, Asics a noué un partenariat avec la championne olympique Belinda Bencic.
Chez On, les chaussures restent le produit principal. Alors pourquoi Iga Swiatek ne porte-t-elle pas de chaussures de son nouvel équipementier, elle qui est désormais une figure emblématique de ce dernier?
La réponse: comme différentes sources l'ont confirmé à CH Media (auquel appartient watson) les chaussures On ne correspondent pas encore aux attentes de Swiatek. Déjà lors de la signature du contrat, la Polonaise écrivait sur les réseaux sociaux:
Pour ce développement, elle serait accompagnée par Federer et l'équipe d'innovation.
La marque «On» ne répond que sommairement aux questions concrètes: elle explique que chaque nouveau produit est le résultat d'une étroite collaboration entre les athlètes et l'équipe de design. La chaussure doit être adaptée à la fois «à leur style de jeu unique (réd: aux tennis(wo)men) et à leurs besoins spécifiques pour les différentes surfaces de jeu», précise la firme zurichoise.
Une réponse étonnante. En effet, en mars, «On» met aussi sous contrat l'Américain Ben Shelton en plus de Swiatek et donne l'impression que la chaussure est déjà disponible lorsque l'entreprise écrit dans son communiqué officiel:
Mais alors que Shelton joue déjà avec des chaussures On depuis le début de la saison de terre battue début avril, Swiatek ne fait pas encore confiance à ce nouveau matériel.
«On» ne se prononce pas sur la question de savoir combien de temps il faut pour adapter la chaussure déjà existante aux besoins de la Polonaise et quelles sont les difficultés rencontrées. La marque ne dit pas non plus si Swiatek s'est déjà entraînée avec la chaussure. Le processus de test est en cours, «et nous sommes impatients de présenter les nouvelles chaussures d'Iga dans un avenir proche», ajoute l'entreprise helvétique.
Pourtant, la chaussure de tennis On est tout sauf nouvelle. Roger Federer lui-même en a porté en 2021 sur trois surfaces différentes en l'espace de quelques semaines, avec des semelles adaptées à chacune d'elles: sur dur à Doha, sur terre battue à Genève et Paris, et sur gazon lors de son dernier tournoi à Wimbledon. Depuis l'automne dernier, la Canadienne Leylah Fernandez, finaliste de l'US Open en 2021, est aussi la première femme à miser sur le produit suisse.
Il est donc fort possible qu'Iga Swiatek remporte son quatrième titre du Grand Chelem samedi à Paris en portant des vêtements de la marque de chaussures On, mais pas ses chaussures. Au grand dam de la marque suisse, mais pour le plus grand plaisir d'Asics, la firme japonaise continuant à jouir malgré elle de l'aura de la numéro 1 mondiale.
Adaptation en français: Yoann Graber