Suisse
Alain Berset

Conseil de l'Europe: Berset vise un poste «pas si prestigieux»

Alain Berset est candidat au secrétariat général du Conseil de l'Europe.
Alain Berset vise le secrétariat général du Conseil de l'Europe (logo en médaillon).keystone / wikimedia commons

Alain Berset vise un job «pas si prestigieux» (mais très bien payé)

Après Berne, cap sur Strasbourg. Alain Berset est candidat au poste de secrétaire général du Conseil de l'Europe. Alors, le socialiste a-t-il ses chances? Et puis, c'est quoi, cette institution?
11.01.2024, 18:5311.01.2024, 19:28
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Les vacances auront été de courte durée. Il n'aura pas fallu deux semaines après son départ du Conseil fédéral pour retrouver à nouveau Alain Berset dans l'actualité: le socialiste se présente au poste de secrétaire général du Conseil de l'Europe.

La désignation doit avoir lieu au mois de juin pour une entrée en fonction en septembre. Le mandat doit durer cinq ans.

Conseil de l'Europe, UE... quelle différence?

Le Conseil de l'Europe a été créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en 1949. Le but: «favoriser le progrès économique et social» via «une union plus étroite entre ses membres», en promouvant les valeurs européennes: droits de l'homme, démocratie et Etat de droit. Le Conseil ne se charge pas d'affaires militaires.

Il est surtout connu pour avoir été le creuset de la Convention européenne des droits de l'homme, édictée en 1950, et la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), qui l'applique, en 1959. Celle-ci est également basée à Strasbourg.

Cette organisation précède donc l'Union européenne (UE). La Suisse y adhère en 1963. D'autres pays hors-UE y sont aussi présents, comme la Turquie, la Norvège, l'Islande ou l'Ukraine. Au total, elle compte 46 Etats membres. Elle ne doit pas être confondue avec le Conseil européen, au sein duquel siègent les chefs d'Etats des 27 pays de l'UE.

Berset a-t-il ses chances?

Alain Berset n'est pas le seul candidat pour ce poste. Deux autres sont actuellement en lice, le Belge Didier Reynders et l'Estonien Indrek Saar. L'ensemble des candidats sera rendu public la semaine prochaine par le Conseil de l'Europe lui-même.

Camarade de parti d'Alain Berset et membre de la délégation suisse au sein du Conseil, qui compte douze parlementaires (et vient justement d'être recomposée ce jeudi), le Jurassien Pierre-Alain Fridez note qu'il «faut avoir atteint un haut niveau gouvernemental dans son propre pays» pour se lancer à l'assaut de ce poste. Il ne tarit pas d'éloge sur le Fribourgeois:

«Alain Berset est un homme d'Etat. Il a un fort charisme, de la personnalité et les compétences requises. Je lui prête beaucoup de chances, il a clairement le niveau»
Pierre-Alain Fridez (PS/JU), délégué au Conseil de l'Europe
Pierre-Alain Fridez.
Pierre-Alain Fridez.Keystone

Alors, Berset, déjà élu? René Schwok, professeur en sciences politiques et relations internationales à l'Université de Genève, et fin connaisseur des relations entre la Suisse et l'Europe, n'est pas de cet avis: «Son rival, le candidat belge Didier Reynders, a un réseau international très solide.» Il faut dire que l'homme est ancien ministre des Finances puis des Affaires étrangères (et brièvement de la Défense) du Royaume belge, et commissaire européen à la justice depuis 2019. C'est la deuxième fois qu'il tente le coup.

«Tout le monde le connaît en Europe. Alain Berset et lui ne jouent pas dans la même catégorie»
René Schwok, Université de Genève
René Schwok.
René Schwok (ici sur le plateau de la Matinale de la RTS, en octobre dernier).dr

Alors, c'est important comme place ou pas?

Pour Pierre-Alain Fridez, si Alain Berset devait arriver au pinacle de l'institution européenne, cela permettrait d'y renforcer encore la place de la Suisse. «Nous y contribuons à l'effort commun de manière importante et notre voix y est respectée.» René Schwok douche ces ardeurs: «Le Conseil de l'Europe ne joue pas un grand rôle et il ne faut pas non plus exagérer celui de la Suisse», estime le professeur.

«Le Conseil de l'Europe est une institution très importante: c'est le temple des droits de l'homme, de la démocratie et de l'Etat de droit»
Pierre-Alain Fridez (PS/JU), délégué au Conseil de l'Europe

Des beaux mots qui n'impressionnent pas le professeur genevois, qui note que la Commission européenne a, elle, «beaucoup plus de poids dans la proposition et l'exécution des négociations internationales». Le Conseil de l'Europe «fonctionne mal et sa légitimité est mise à mal par la présence de certains Etats très peu démocratiques, comme l'Azerbaïdjan par exemple». Le professeur se veut même volontiers provocateur:

«Sauf la CEDH, de quelle réalisation importante le Conseil de l'Europe peut-il se targuer?»
René Schwok, Université de Genève

«Ce n'est pas si prestigieux d'accéder à la tête de cette institution. Ça peut l'être pour un Suisse, car notre pays ne fait partie ni de l'UE ni de l'Otan et c'est l'occasion d'avoir un peu plus d'influence à Strasbourg», relativise le professeur.

«Historiquement, la Suisse tente de relancer son rôle au sein du Conseil de l'Europe quand ça va mal au niveau européen. C'est un genre de palliatif. Mais cela ne compensera pas les problèmes actuels que nous avons avec l'UE et l'Otan»
René Schwok, Université de Genève

Sur ce point, Pierre-Alain Fridez ne contredit pas le professeur. «Même si Alain Berset est élu au poste, les relations vont rester compliquées avec l'UE et cela ne va en rien impacter les négociations actuelles avec Bruxelles

A propos des «bilatérales III» 👇

Les étoiles européennes dorées sur fond bleu ont donc beau être tamponnées tant au «Conseil de» que sur le drapeau de «l'Union», les deux institutions sont solidement cloisonnées et l'arrivée du Fribourgeois à la tête de la première institution ne suffirait pas à envoyer un signal clair et fort à la deuxième en vue des «bilatérales III».

«Au mieux, ce serait l'occasion pour Berset de développer un réseau européen»
René Schwok, Université de Genève

En passant, l'ex-conseiller fédéral toucherait la modique somme de 300 000 francs par année et vivrait dans un somptueux appartement de fonction, révèlent nos confrères de CH Media. Celui-ci est situé au sein de la «villa Massol».

Jugez plutôt:

Villa Massol, Strasbourg
wikimedia commons

Et après?

Et si le poste de secrétaire du Conseil de l'Europe d'être acquis à Berset, serait-ce une manière pour le Fribourgeois de rebondir encore plus haut, dans cinq ans? Si c'est au poste de Secrétaire général des Nations Unies dont on pense, c'est mal barré, en tout cas historiquement: aucun des secrétaires du Conseil de l'Europe n'a été catapulté à la tête de l'ONU.

«Le secrétariat général des Nations Unies? Aucune chance», lâche René Schwok, pour une tout autre raison. «Antonio Guterres, qui a été élu en 2017, en est à son deuxième mandat et devrait quitter son poste fin 2026. Mais il y a un tournus entre les différentes régions du monde. Le prochain secrétaire de l'ONU sera africain, ou sud-américain, ou asiatique...»

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