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Ligature des trompes: Muriel a vécu un calvaire en Suisse

Muriel aime les enfants, mais ne souhaite pas être mère.
Muriel aime les enfants, mais ne souhaite pas être mère.Image: zVg

Cette Suissesse a vécu un calvaire parce qu'elle ne voulait pas d'enfants

En Suisse, de plus en plus de personnes choisissent de ne pas avoir d'enfants. D'ailleurs, le taux de natalité est en baisse depuis des années. Muriel a passé plus de 10 ans à demander une ligature des trompes. Une procédure qui lui a longtemps été refusée. Jusqu'à l'été 2022. Elle raconte son parcours du combattant.
19.11.2023, 07:0419.11.2023, 17:15
Juliette Baur
Juliette Baur
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Muriel aime travailler avec les enfants et passer du temps avec eux. En tant que pédagogue dans un musée, elle est responsable du développement et de la réalisation d'offres pour les petits et les familles, et est entourée chaque jour de dizaines de bambins. Durant son temps libre, elle apprécie également la compagnie de ses cinq neveux et nièces.

Pourtant, à 36 ans, elle est sûre d'une chose: elle ne veut jamais avoir d'enfants. Très jeune déjà, Muriel savait qu'elle ne souhaitait pas être mère. Un choix qui s'est confirmé à l'adolescence et durant sa vingtaine.

Un cancer mal diagnostiqué

Lorsqu'elle avait 22 ans, sa gynécologue de l'époque a fait une erreur de diagnostic: elle lui a annoncé qu'elle souffrait d'un stade précoce élevé de cancer du col de l'utérus. Dès lors, son médecin lui dit que si elle veut des enfants, elle doit tomber enceinte dans les trois ans à venir. Ensuite, il faudra lui enlever l'utérus. Muriel se souvient:

«Sur le moment, j'étais perplexe et je me suis dit qu'il fallait absolument que je tombe enceinte maintenant. Parce que sinon, je ne serai jamais mère. Peut-être que je le regretterai un jour.»

Mais le choc qui a suivi l'annonce s'est dissipé et Muriel est revenue à sa véritable conviction: elle ne veut pas d'enfants du tout.

Son ami de l'époque n'était pas sûr qu'il ne voulait pas être père. Mais il a accepté la décision de sa compagne. La famille de Muriel ne l'a pas non plus mise sous pression, mais l'a encouragée à réfléchir et à prendre sa décision en toute connaissance de cause. Muriel décrit aujourd'hui cette expérience comme un moment clé:

«Certes, il s'est avéré qu'il s'agissait d'une erreur de diagnostic et que je n'étais en fait pas pressée par le temps. Mais cela n'a rien changé à ma décision.»

Ligature des trompes: 12 ans de refus

Peu de temps après, à l'âge de 23 ans, Muriel a eu pour la première fois envie de se faire stériliser. Elle avait changé de gynécologue après l'erreur de diagnostic et a commencé à s'intéresser de plus près à d'autres types de contraception. En effet, Muriel avait eu de mauvaises expériences avec les contraceptifs hormonaux, comme la pilule, car elle ne les supportait pas. Elle a donc demandé à son gynécologue de l'époque si la ligature des trompes était une option. Elle se souvient:

«Mon médecin m'a refusé cette intervention. Selon elle, c'était beaucoup trop tôt. Je devais attendre d'avoir au moins 30 ans»

Muriel a accepté la décision de son gynécologue, pensant qu'elle n'avait de toute façon pas le choix. En effet, même en faisant ses propres recherches sur le sujet, elle tombait toujours sur l'information suivante: il faut avoir au moins 30 ans pour subir une telle intervention. Elle n'a cependant pas baissé les bras et a régulièrement demandé à son médecin s'il n'était pas possible de pratiquer une stérilisation.

Muriel est une passionnée de moto.
Muriel est une passionnée de moto.Image: zvg

«Je suis capable de faire mes propres choix»

Puis vint le jour où Muriel eut 30 ans. A l'époque, elle s'est dit: «Voilà, c'est le moment. Enfin, je suis assez grande pour que l'on accepte ma décision.» Elle se trompait. Une fois de plus, on lui a dit qu'elle était encore trop jeune. Elle devrait attendre d'avoir 35 ans.

«Plus j'attendais, plus je trouvais la situation absurde. Je suis une personne capable de faire mes propres choix. Pourquoi je ne peux pas décider»

Le médecin lui a dit qu'il fallait avoir un entretien psychologique si on voulait subir si jeune une telle intervention, car chez beaucoup de femmes, le désir d'enfant se manifeste encore. Muriel n'a pas d'autre choix que d'accepter la situation.

Il n'existe, toutefois, aucune loi qui oblige les médecins à interdire une stérilisation avant 30 ans. De même, aucun texte ne stipule qu'une femme doit obligatoirement passer une expertise ou un entretien psychologique avant de se soumettre à l'intervention. D'ailleurs, selon la loi fédérale en question:

«La stérilisation d'une personne âgée de plus de 18 ans et capable de discernement ne peut être pratiquée que si elle a été informée en détail de l'intervention et y a consenti librement et par écrit.»

Muriel a cependant dû patienter encore quelques années. Aujourd'hui, elle a 36 ans. Il y a un an, elle a pu se faire ligaturer les trompes. Entre-temps, elle avait encore changé de gynécologue. Avant l'intervention, la doctoresse lui a encore demandé si elle était vraiment sûre et si elle ne voulait pas attendre d'avoir 39 ans.

«Je me suis mise en colère. Cela fait 20 ans que je sais que je ne veux pas d'enfants»

L'intervention a donc eu lieu en été 2022. Lorsqu'elle a quitté l'hôpital, elle s'est sentie soulagée et libérée.

Muriel et son partenaire ont décidé ensemble de la procédure.
Muriel et son partenaire ont décidé ensemble de la procédure.Image: zVg

Le choix des hommes n'est «pas remis en question»

Avant que Muriel ne se fasse ligaturer les trompes, personne d'autre que son entourage proche ne la prenait au sérieux lorsqu'elle disait ne pas vouloir d'enfants. Des personnes, souvent âgées, disaient à chaque fois: «L'envie viendra».

Souvent, la femme doit se justifier sur le fait qu'elle ne veut pas être mère. Muriel s'étonne:

«En tant que femme, mon choix de ne pas vouloir d'enfants a été remis en question. Celui de mon partenaire, jamais»

Dans sa relation, l'intervention n'a jamais été un problème: lorsque Muriel a rencontré son compagnon actuel, il était déjà clair pour elle qu'elle ne voulait pas être mère et qu'elle se ferait ligaturer les trompes. Elle en a informé son ami avant même qu'ils ne s'engagent dans une relation: «Il était important pour moi qu'il puisse lui aussi prendre une décision à ce sujet». L'intervention a finalement été la bonne option pour le couple: «Depuis, il ne s'est pas passé un jour sans que je me réjouisse de pouvoir enfin mener une vie indépendante».

Muriel a longtemps cru qu'il fallait justifier cette absence d'enfants. Désormais, elle pense différemment:

«Je n'ai pas à justifier mon choix. Certaines femmes veulent être mère. Moi, je souhaite que ma vie soit sans enfants»

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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