«La région lémanique est confrontée à un défi environnemental majeur». C'est le cri d'alarme lancé ce mercredi par l’association pour la sauvegarde du Léman (ASL), qui vient de présenter une nouvelle étude sur le sujet. Et le résultat est «alarmant»: près de 100 tonnes de plastiques finissent chaque année dans les eaux du plus grand lac de Suisse.
La plupart de ces déchets ont une taille inférieure à cinq millimètres: appelés microplastiques, ils peuvent contenir des substances toxiques pour les animaux et dangereuses pour les humains. On les retrouve dans la chaîne alimentaire et même dans nos organes, puisqu'ils peuvent être absorbés à travers l'eau, la nourriture et la peau.
«Une fois qu'ils sont dans le lac, il est impossible de les récupérer, car ils sont trop petits», explique Suzanne Mader-Feigenwinter, secrétaire générale de l'ASL.
Mais d'où viennent-ils? La plupart de ces déchets ne sont pas directement jetés dans le lac. L'étude a démontré que 83% d'entre eux sont transportés par l'eau qui ruisselle sur les sols imperméables, tels que des routes et des sols bitumés.
Le secteur automobile est le principal responsable de la situation: les microplastiques résultant de l’abrasion des pneus représentent un tiers de la pollution plastique totale. Les peintures, en particulier celles revêtant les façades des bâtiments, sont également à l'origine de beaucoup de déchets (27%). Sans oublier les macroplastiques provenant des emballages à usage unique (9%) et des mégots de cigarettes (8%).
En 2018, une étude identique, menée par la même équipe, estimait à 50 tonnes la quantité de plastiques déversés dans le Léman chaque année - un chiffre que la nouvelle recherche a multiplié par deux.
Cette différence s’explique avant tout par la prise en compte de sources supplémentaires et l’affinement de certains calculs. «Pourtant, la pollution plastique continue son évolution, puisque la pression démographique autour du bassin lémanique est de plus en plus importante», indique Suzanne Mader-Feigenwinter. En l'espace de 15 ans, la population de la région a augmenté de 20%. Une popularité qui se répercute sur la qualité de l’environnement.
L'accumulation des microplastiques dans le Léman n’est donc pas près de s’arrêter, ni même de diminuer, notent les auteurs de l'étude. Une augmentation que l'ASL qualifie de «préoccupante». L'association rappelle que le bassin lémanique héberge plus de 1,4 million de personnes, en grande partie alimentées en eau potable par le lac.
La bonne nouvelle, avance Suzanne Mader-Feigenwinter, c'est que la perception est en train de changer. Par le passé, on imaginait la pollution des eaux comme un problème touchant des océans lointains. On sait désormais que ce phénomène n'épargne pas nos régions. «Cela fait dix ans que l'ASL travaille sur cette thématique et, petit à petit, l'information fait son chemin», complète-t-elle. Et d'ajouter:
«Plusieurs leviers sont possibles, tels que la réduction du plastique à la source et l'amélioration de la gestion des déchets», illustre la secrétaire générale de l'ASL. Elle estime qu'il faut sensibiliser le public, mais également les administrations et les gestionnaires, pour encourager des solutions adaptées à leur champ d'activité.
Pour ce faire, une conférence publique sera organisée le 18 mars à Genève. «Nous prévoyons également des rendez-vous ciblés avec des gestionnaires, des autorités et des responsables de secteurs d'activité», conclut Suzanne Mader-Feigenwinter.
L'étude propose huit scénarios de réduction des plastiques d'ici 2040. Le plus ambitieux prévoit une diminution de 75% grâce à une approche combinant réduction à la source, amélioration de la gestion en fin de vie des produits et changements de comportements individuels et collectifs.