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Nordmann-Nantermod: duel au sommet sur le nucléaire en Suisse

Roger Nordmann et Philippe Nantermod, de gauche à droite.
Roger Nordmann et Philippe Nantermod, de gauche à droite.keystone / shutterstock / montage: watson
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Nordmann-Nantermod: notre duel sur le nucléaire en Suisse

Suite à notre sondage sur l'avenir de la production nucléaire en Suisse, nous avons demandé aux conseillers nationaux Philippe Nantermod (PLR/VS, pro-nucléaire) et Roger Nordmann (PS/VD, anti) de croiser le fer.
31.01.2022, 19:0101.02.2022, 06:38
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Pourquoi pensez-vous que le maintien d’une production d’énergie nucléaire en Suisse se justifie, à l’inverse, ne se justifie pas?

Philippe Nantermod: C’est trop tôt pour le dire. Mais on ne doit pas s’interdire le débat. L’énergie nucléaire fait des progrès importants. Aujourd’hui déjà 35% de notre consommation électrique est nucléaire. Nous aurons besoin de 40% d’électricité supplémentaire à l’horizon 2050 pour les véhicules électriques et les pompes à chaleur. Si l’on veut éviter des installations polluantes, on ne peut pas d’emblée exclure des énergies neutres en Co2.
Roger Nordmann: Vu l’âge des centrales nucléaires existantes, il faudrait en reconstruire de nouvelles pour maintenir la production. Comme le montre le projet d’EPR de Flamanville en France, ce serait plus cher que du renouvelable. Enfin, cela comporte un risque qui n’est pas acceptable dans un pays densément peuplé comme la Suisse: sur les 150 réacteurs mis hors service dans le monde, 5 l’ont été en raison d’une fusion du cœur. En cas d’incident grave, ce sont des centaines de milliers d’habitants qui devraient quitter leur lieu de vie!

Le stockage, en Suisse, de déchets radioactifs n’est-il pas l’un des plus grands problèmes posés par le nucléaire?

Philippe Nantermod: C’est un des problèmes. Cela dit, depuis les décennies que l’on produit de l’énergie nucléaire, l’on parvient à gérer les déchets. On sait les surveiller, les stocker. Et on sait aussi de mieux en mieux les traiter et les valoriser pour en faire de l’énergie. Je suis convaincu que le problème de l’énergie nucléaire est moins la maîtrise du risque de production que les déchets.
Roger Nordmann: La Suisse a déjà dépensé 5 milliards de francs pour trouver un lieu où les enfouir, sans succès. Le problème, c’est leur toxicité pendant des dizaines de milliers d’années. Il est indéfendable de charger les générations futures de ce problème. Et concrètement, le voisinage n’en veut pas, comme le montre le long combat d’Ollon, dans le canton de Vaud, contre un dépôt.

Quelles sont les énergies renouvelables qui ont le plus vos faveurs?

Philippe Nantermod: Naturellement, l’hydroélectricité en première ligne. Elle permet une production de masse à toute heure. Mais on arrive aux limites des possibilités d’exploitation. Le solaire est intéressant, mais a des problèmes d’intermittence. Le solaire rencontre trop d’opposition. Le nucléaire de nouvelle génération constitue peut-être le maillon manquant pour une politique énergétique durable sans gaz à effet de serre.
Roger Nordmann: En Suisse, pour l’électricité, c’est clairement le photovoltaïque qui est le mieux accepté et qui a le plus de potentiel additionnel. Nous allons vers un système avec deux piliers principaux: l’hydroélectricité, déjà très bien développée (actuellement 60%), et le solaire (actuellement 5%). Comme je l’ai montré dans mon livre «Le plan solaire et climat», ce mix permet de produire suffisamment d’électricité pour très largement décarboner les transports et les bâtiments.

Quel mix énergétique a votre préférence, et pourquoi?

Philippe Nantermod: Le mix actuel est performant. Il nous permet d’avoir du courant en quantité, à un prix abordable. Il faudra le renforcer avec davantage de solaire et d’hydroélectricité. Cela dit, il inclut une part importante de nucléaire. Je pense qu’il sera sans doute utile de réfléchir à remplacer de vieilles centrales nucléaires par des modèles plus modernes, plus sûrs, plus efficaces.
Roger Nordmann: Outre l’hydroélectricité et le solaire, je pense qu’il faut mieux utiliser le bois pour produire de l’électricité et de la chaleur en hiver. Une part d’éolien sera utile, car il produit plus en hiver. Enfin, la chaleur du sous-sol et la biomasse ont un rôle à jouer. Nous devons développer le «power-to-gaz», c’est-à-dire la transformation des surplus d’électricité de l’été en gaz de synthèse climatiquement neutre. Et ne jamais oublier l’efficacité énergétique!

Pensez-vous que nous serons amenés en Suisse à voter une nouvelle fois sur un paquet énergétique?

Philippe Nantermod: J’en suis persuadé, et plutôt deux fois qu’une. La politique énergétique va encore beaucoup évoluer. Il y a dix ans, on accordait beaucoup moins d’importance à l’enjeu climatique qu’aujourd’hui. Et les opinions sur le nucléaire ont bien évolué en Europe et dans le monde. Il me semble que l’on doit adapter constamment nos politiques énergétiques et ne pas nous borner à une vision figée dans le marbre.
Roger Nordmann: Oui, c’est sûr, et c'est bien ainsi, car c’est un sujet très important.
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