Suisse
Ecologie

Les Suisses mangent des pesticides interdits

Comment des pesticides interdits se retrouvent dans les assiettes suisses

La Confédération a trouvé des pesticides interdits dans un produit alimentaire importé sur trois en provenance de pays non membres de l'UE. Ce mardi, une alliance entre les forces écologiques au Parlement et les paysans pourrait faire passer des règles plus strictes en matière d'importation.
29.05.2023, 19:01
Pascal Michel / ch media
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Les herbes aromatiques de Thaïlande, les épices d'Inde ou les légumes de Turquie sont souvent contaminés par des pesticides interdits en Suisse. C'est ce que révèlent des échantillons de produits alimentaires importés. L'organisation non gouvernementale Public Eye a évalué, pour la première fois, ces données de l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires pour l'année 2021.

epa01057654 South African grown Pineapples for sale in a vegetable market in Cape Town, South Africa 06 July 2007. High levels of the toxic heavy metal Cadmium have been found in South African Pineapp ...
Les fruits exotiques sont souvent contaminés par des résidus de pesticides.image: EPA

Selon cette étude, plus d'un échantillon sur trois provenant de pays non membres de l'UE contenait des substances interdites dans notre pays. Les données proviennent des cantons. Ils effectuent des analyses, en cas de suspicion, lors de l'importation de denrées alimentaires. Au total, 1419 produits ont été testés. Près de la moitié d'entre eux provenaient de l'UE et presque aucune substance interdite n'a été trouvée dans ces échantillons.

Au total, les autorités ont détecté 57 produits issus de la dégradation de pesticides interdits en Suisse. Dans un échantillon d'épices provenant de Thaïlande, on a même trouvé 18 substances différentes. Les plus fréquentes étaient le fongicide Carbendazim, l'insecticide Chlorpyrifos ou encore le poison pour abeilles Imidacloprid. Les épices et les haricots figurent en tête du classement des produits importés les plus contaminés, suivis par les fruits exotiques, les herbes aromatiques ainsi que les poivrons et les piments.

Différentes limites de tolérance

Le fait que de tels aliments importés contiennent des pesticides interdits ne justifie pas automatiquement leur retrait de la circulation. Les importations sont autorisées, car elles ne violaient généralement pas les valeurs limites. Un sixième des échantillons analysés en 2021 dépassaient les dispositions légales.

Les valeurs limites sont généreuses. Certes, selon la loi, les aliments importés «ne doivent, en principe, pas contenir de résidus de substances non autorisées en Suisse». Cette «tolérance zéro» se situe à la limite dite de quantification de 0,01mg/kg.

Le Conseil fédéral a pourtant prévu des «tolérances à l'importation» plus élevées pour plus de 100 substances, bien que celles-ci soient interdites en Suisse en raison de leurs effets sur la santé lors de leur utilisation et sur l'environnement. L'insecticide Profenos en est un exemple.

Comme le critique la conseillère nationale Christine Badertscher (Verts), la valeur limite pour le piment contaminé au profenos est trois cents fois plus élevée que la limite de quantification. Elle indique dans sa motion qui sera traitée ce mardi 30 mai par le Conseil des Etats:

«En procédant de la sorte, le Conseil fédéral met en danger la santé des consommateurs et nuit par ailleurs aux entreprises agricoles suisses, qui doivent se passer de ces produits et sont donc soumis à une concurrence inéquitable.»

Le Conseil national et la commission du Conseil des Etats se sont déjà prononcés en faveur de sa demande.

Un problème de santé et de concurrence

Il y a donc de fortes chances pour que le Conseil fédéral doive bientôt revoir à la baisse les seuils de tolérance pour les denrées alimentaires importées. Dans ce contexte, une alliance se dessine entre les forces écologistes au Parlement et les paysans influents. Dans une lettre datant de la mi-mai, plusieurs associations agricoles appellent la Chambre basse à voter en faveur de la motion, dont la puissante Union suisse des paysans ou le lobby des producteurs de légumes et de céréales.

Ils argumentent sur le désavantage concurrentiel dont souffrent actuellement les agriculteurs suisses par rapport à leurs concurrents étrangers, dans la mesure où ils doivent renoncer à de telles substances. On peut lire dans la lettre en question que les agriculteurs suisses doivent:

«Continuer à livrer une récolte de même qualité avec des directives toujours plus strictes et moins de produits phytosanitaires»

De plus, les consommateurs préfèrent les produits visuellement irréprochables et ceux-ci ne peuvent pas être produits sans ou avec une utilisation réduite de certains produits phytosanitaires. La clientèle suisse n'est pas consciente du fait que les produits importés, qui ont une belle allure, peuvent être contaminés par des substances interdites en Suisse.

Thai farmesr spray pesticide over there rice field in Nakhon Sawan province, north of Bangkok on November 17, 2018. (Photo by Chaiwat Subprasom/NurPhoto via Getty Images)
Des agriculteurs thaïlandais pulvérisent des pesticides dans leur rizière.Image: NurPhoto

«En regardant plus loin que le bout de son nez, on constate que ces produits provoquent parfois de graves intoxications chez les agriculteurs de pays tiers et qu'ils peuvent être tenus pour responsables d'importantes pollutions de l'environnement», affirment les associations agricoles. La Suisse devrait également être consciente de sa responsabilité vis-à-vis des autres pays et encourager une utilisation prudente des ressources.

Le Conseil fédéral ne voit pas la nécessité d'agir

Le Conseil fédéral s'oppose à un durcissement des règles d'importation:

«Les limites maximales applicables aux résidus de produits phytosanitaires (LMR), y compris les tolérances d'importation, sont déjà contrôlées régulièrement aujourd'hui. Les LMR ne sont approuvées que lorsqu'elles ne présentent aucun risque pour la santé des consommateurs.»

En réponse à une précédente question au Parlement, le gouvernement a déclaré: «Même si un produit phytosanitaire n'est pas autorisé en Suisse pour protéger les utilisateurs ou l'environnement, la consommation de produits qui ont été traités à l'étranger avec ce pesticide peut néanmoins être sûre». (aargauerzeitung.ch)

Traduit et adapté par Nicolas Varin

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