Dans la foulée des «Pandora Papers», une enquête de l'ONG Public Eye révèle que l'industrie offshore en Suisse est foisonnante, pleine de vigueur et de santé.
L'enquête a en effet démontré que plus de 33 000 sociétés dépourvues de substance et sans aucune activité commerciale sont domiciliées dans les cantons de Genève, Zoug, Fribourg et du Tessin.
Ils ont beau avoir été épinglés dans les «Panama Papers» en 2016, les conseillers et conseillères helvétiques ont continué de faire bénéficier leur clientèle des failles du système suisse. Les «Pandora Papers», sortis cette semaine, confirment qu'ils n'ont pas cessé.
L'industrie offshore suisse, composée d’avocats et de cabinets fiduciaires, joue un rôle capital dans les circuits internationaux d’évasion fiscale, estime l'ONG.
Public Eye a cartographié les dizaines de sociétés «boîtes aux lettres» de Suisse. Ces entreprises n'existent que sur le papier, ou presque: elles ne comptent souvent aucun employé, se résumant à une adresse dans un immeuble «fantôme», pourvu d'un service de conciergerie téléphonique (il faut bien faire bonne façon).
Parmi elles, des dizaines de sociétés actives dans la finance, l’immobilier ou le négoce de matières premières.
Pour rappel, fonder une société-écran n'est pas illégal. Le hic, c'est que c'est généralement la méthode utilisée pour dissimuler des actions financières douteuses. Une société offshore permet en tout cas efficacement de cacher le nom de son propriétaire et de masquer l'origine des fonds.
En Suisse par exemple, ces sociétés sans substance sont pour près de la moitié mêlées à des soupçons de corruption et de blanchiment, transmis aux autorités helvétiques.
La fringuante Genève vient de décrocher un nouveau record: celui de la ville suisse comptant le plus de sociétés-écrans. Selon un décompte de Public Eye, elle en abrite pas moins de 13 638. Soit, quand même, le tiers des sociétés inscrites au registre du commerce du canton.
Fribourg est également servie: elle en compte environ 3000, soit 13,24% du tissu économique local, principalement domiciliées chez des avocats, notaires ou fiduciaires le long du boulevard de Pérolles.
Au même titre que Genève, Fribourg a eu droit à son chapitre dans les «Panama Papers». Une fiduciaire fribourgeoise est citée 176 fois dans les métadonnées de l'enquête, en lien avec des structures offshore établies dans des paradis fiscaux caribéens ou de l’océan Indien.
Comme le rappelle le rapport d'enquête, ces sociétés qualifiées de «coquilles vides» ne sont pas nécessairement vouées à des activités douteuses. Parmi ces entités ou les personnes qui profitent de leur création, toutes ne fraudent pas le fisc dans leur pays ou commettent un crime financier.
Parfois, leur unique but est l'optimisation fiscale, un avantage de la création de ces entités juridiques.
Ce type de montage est fréquemment utilisé lorsqu’il s’agit de cacher des ayants droit économiques, soit les personnes qui exercent en dernier lieu un contrôle effectif sur les entreprises ou les constructions juridiques.