Officiellement, c'est une reprise de «Fruit Ninja», un jeu pour smartphone très connu. Dans les faits, la nouvelle appli lancée à l'occasion des 75 ans de Migros Vaud propose de découper au sabre des produits d'un hypothétique supermarché concurrent, appelé «Flop». Ce nom et le design des articles en question laisse peu de doute au sujet de son identité.
Mais depuis quand le géant orange se lance-t-il dans le marketing agressif? Les Suisses sont-ils vraiment le bon public cible? On a posé ces questions à Alberto Gomez, responsable des stratégies de marketing digital au sein de l'agence lausannoise Antistatique.
On a l'habitude de voir Migros comme une entreprise à l'image lisse et bienveillante. Cette appli est-elle étonnante?
Oui, notamment à cause de son côté agressif, voire violent, qui reste tabou en Suisse. C'est peu habituel par rapport au marché américain, où des entreprises rivales se tirent constamment dans les pattes à coups de campagnes de marketing belliqueuses. Les rivalités entre McDonald's et Burger King, ou entre Coca-Cola et Pepsi, en sont un exemple.
Concernant l'appli de Migros, ce qui choque, c'est qu'on propose carrément de trancher des produits. C'est violent, car le message derrière est clair: «On découpe la concurrence». Cela dit, je ne crois pas que cela va donner lieu à une surenchère.
Pourquoi?
Ce jeu reste malgré tout assez subtil: la violence n'est pas explicite, on ne voit pas de sabre. Et puis la surenchère ne correspond pas au public suisse. Regardez Roger Federer: la personnalité préférée des Helvètes est quelqu'un de très lisse, calme et consensuel.
L'appli de Migros s'adresse-t-elle donc au bon public?
Je pense que oui, elle a toutes les chances de bien marcher. Le produit est bien fait. Ils ont pris l'Ice Tea, qui est un produit emblématique et très clivant. On est pour ou on est contre. De plus, ça se joue très facilement, et c'est facile de participer.
On voit clairement que cette appli a été développée pour un public cible: elle vise les Millenials et c'est assumé. Ça m'étonne beaucoup. Je ne sais pas s'il s'agit d'un test, mais c'est spécial venant de Migros. On n'a pas l'habitude.
Coop devrait-elle jouer le jeu et répondre d'une manière similaire?
Oui, totalement, ce serait génial. Il faut avouer qu'en termes de publicité, la situation est assez ennuyeuse en Suisse. Coop pourrait réagir avec quelque chose complètement à l'opposé, en montrant par exemple beaucoup d'amour pour les produits de Migros.