La grippe, le Covid-19 et les refroidissements ont touché de nombreuses personnes au cours des dernières semaines. Cela a aggravé les pénuries de médicaments déjà existantes. La Confédération considère désormais la situation comme «problématique», comme elle l'a fait savoir mercredi. Une force opérationnelle nouvellement créée doit maintenant élaborer des mesures rapidement applicables. Concrètement, il manque par exemple des sirops antipyrétiques pour les enfants. Selon la Confédération, la pénurie mondiale d'antibiotiques s'est en outre aggravée en raison du confinement en Chine.
Enea Martinelli suit les pénuries depuis 20 ans. Le pharmacien en chef des hôpitaux de Frutigen, Meiringen et Interlaken (BE) et vice-président de l'association des pharmaciens Pharmasuisse, répertorie actuellement 987 pénuries sur son site Internet drugshortage.ch. Il explique dans une interview ce que cela signifie pour les patients.
La Confédération considère désormais la situation comme «problématique». A juste titre?
Enea Martinelli: Il la considère enfin comme problématique! La situation est tendue depuis longtemps. Désormais, il arrive qu'un patient sur deux ou trois manque d'un médicament et qu'il faille trouver une alternative. Pour les pharmaciens et les médecins, c'est pesant, car nous devons très souvent chercher une solution individuelle.
Selon la Confédération, le secteur ambulatoire est désormais également concerné. Concrètement, de quels médicaments manque-t-on?
Le secteur ambulatoire est concerné depuis longtemps, mais la Confédération ne voulait pas l'entendre. Le plus gros problème actuel concerne les antibiotiques pour les enfants, car il n'y a presque pas d'alternatives. Les sirops antipyrétiques pour enfants constituent le deuxième problème.
Qu'est-ce que cela signifie pour les patients?
Nous essayons d'atténuer les pénuries, c'est-à-dire de trouver des alternatives — dans le meilleur des cas, de manière à ce que les patients ne s'en rendent pas compte. Mais pour certains, il faut modifier un traitement et le réajuster. Sans oublier que cela peut créer de l'insécurité pour certaines personnes âgées - qui prennent dix médicaments tous les jours - de devoir soudainement utiliser d'autres produits. Cela peut conduire à des erreurs. C'est aussi une charge importante pour le personnel soignant.
Une task force au sein de la Confédération examine à présent des mesures à court terme. Que devrait-elle faire selon vous?
On ne peut pas résoudre le problème à court terme, c'est évident. Il serait important de nous décharger des absurdités bureaucratiques — et de ne pas nous encombrer en plus de demandes de garantie de paiement pour des médicaments importés, comme c'est le cas actuellement. Certains services administratifs n'ont pas encore compris l'ampleur du problème.
La Confédération en a-t-elle fait assez jusqu'à présent?
Non, elle a nié le problème durant longtemps. En 2018, elle disait encore que le monde allait bien. Et pourtant, ce n'était pas le cas. Dans le rapport sur l'approvisionnement de février 2022, on a présenté des mesures pour s'attaquer au problème. Mais ces mesures ne prendront effet qu'en 2025 ou 2026.
Que doit-on faire à moyen terme?
A moyen terme, il faut un monitoring des médicaments importants et pas seulement des médicaments «vitaux» comme aujourd'hui. Les médicaments contre l'épilepsie ou la maladie de Parkinson, par exemple, ne sont aujourd'hui pas soumis à déclaration, alors que les patients en ont besoin tous les jours.