Rhume, grippe, toux: il y en a autant que le vin chaud, les biscômes et les guirlandes de Noël cet hiver. Sauf que le NeoCitran, souvent demandé pour soigner ces maladies, n'est plus disponible dans certaines pharmacies. Pour Martina Tschan, chargée de communication pour la Société suisse des pharmaciens Pharmasuisse, la situation est tendue:
Et la Suisse ne manque pas seulement de NeoCitran. A l'heure actuelle, selon le site www.drugshortage.ch, 664 médicaments contenant 321 substances actives ne sont pas disponibles en Suisse. «Une tendance à la hausse», lance la porte-parole de Pharmasuisse. Les pharmaciens investissent énormément de temps dans la recherche d'alternatives, qui se révèlent souvent plus chères:
Alors que les médicaments sur ordonnance manquants sont listés avec précision, il n'y a pas de saisie ni de vue d'ensemble pour la médication non soumise à ordonnance. Mais là aussi, il manque des préparations et des substances actives, comme le constate Martina Tschan. Pour ces médicaments également, les pharmaciens sont à la recherche d'alternatives et investissent du temps dans la fabrication de leurs propres préparations.
Le problème le plus important au niveau mondial est actuellement la pénurie d'amoxicillines, un antibiotique. Les tranquillisants comme le Temesta et le Valium ne peuvent plus être livrés. Pour le Temesta de Pfizer, il y a une pénurie moyenne, ce qui signifie qu'il n'y aura pas de livraison dans un délai prévisible de deux à six semaines. Le manque ne concerne pas seulement les traitements médicamenteux: les shampoings anti-poux ne sont plus disponibles dans de nombreuses pharmacies.
Le commerce des médicaments joue dans la cour internationale. La pénurie ne touche donc pas que la Suisse. Toutes les entreprises pharmaceutiques du monde sont potentiellement impactées. Les médicaments contre le rhume, la toux et la grippe sont les principaux à être concernés. Certains analgésiques et antibiotiques souffrent aussi de pénurie, tout comme les sirops antibiotiques et antipyrétiques à base d'ibuprofène pour les enfants.
En Suisse, le multilinguisme complique le problème de la livraison. Les emballages des médicaments et les notices doivent impérativement être disponibles dans trois langues nationales, ce qui accroît la charge de travail.
De plus, il n'y a pas seulement une pénurie de médicaments, il manque aussi des emballages sous blister, un film plastique. Cette information provenant des cabinets médicaux est confirmée par la porte-parole de l'association des pharmaciens, Martina Tschan:
Certes, la pénurie de médicaments n'est pas une situation inédite. Le problème est que, cette fois, jamais autant de médicaments n'ont été en rupture de stock. Cela fait des années que la délocalisation des sites de production, de la pénurie progressive de substances actives dérange du côté de la population, notamment concernant les antibiotiques, les problèmes de qualité et le trop-plein de formalités pour les producteurs. Selon Pharmasuisse, la stratégie du moindre coût a fait fuir de nombreux producteurs du marché suisse des médicaments et a aggravé les problèmes d'approvisionnement.
Les raisons de cette pénurie sont multiples, explique Martina Tschan:
En Chine, où une grande partie des substances actives sont produites, des confinements sont toujours imposés aux entreprises pharmaceutiques, ce qui a de graves conséquences sur la production et la livraison. A cela s'ajoute la rupture des chaînes d'approvisionnement, causée par la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine ou la crise énergétique. La pénurie de main-d'œuvre qualifiée et de personnel se fait également ressentir dans la production.
En Allemagne, le ministre fédéral de la Santé Karl Lauterbach a annoncé qu'il allait élaborer un projet de loi visant à lutter contre les pénuries de médicaments. En Suisse, pharmaciens, médecins, droguistes, industrie pharmaceutique, distributeurs, médecine de laboratoire et organisations de consommateurs ont constitué une alliance. Celle-ci a déposé l'initiative populaire «Oui à la sécurité de l'approvisionnement médical» auprès de la Chancellerie fédérale.
Pharmasuisse soutient le projet. L'objectif de l'initiative serait de garantir aux patients un accès rapide aux produits thérapeutiques importants dans notre pays. Selon l'organisation, la collecte des signatures devrait commencer début 2023. (aargauerzeitung.ch)