Sale temps pour les travailleurs de la terre suisses. Alors que les températures de mi-avril s'étaient montrées très clémentes, voici qu'une vague de froid déferle sur la Romandie. Un worst case scenario pour nombre d'agriculteurs et maraîchers, mais aussi de vignerons.
watson en a contacté quelques-uns. Et si la chance a été de leur côté, il ne s'en est pas fallu de beaucoup. A l'image de Fabrice Simonet, vigneron à Môtier, dans le Vully fribourgeois. «Plus de peur que de mal», explique-t-il, mais les choses se sont jouées à un cheveu:
Car un degré, cela peut faire toute la différence. Les dégâts dus au gel sur la vigne ne fonctionnent pas de manière graduelle: c'est du «tout ou rien». A l'image de l'année 2017, lorsqu'il avait gelé à -3°C dans la région et que «50 à 60% de la récolte» avait été sacrifiée.
Il faut dire que sur ce versant sud du Mont Vully, situé entre le canton de Vaud et de Fribourg, c'est la présence du lac de Morat à quelques dizaines de mètres qui fait la différence:
La chance a aussi souri à Gaétan Bender, vigneron à Fully, en Valais. Il a reçu une «alarme» sur son téléphone à deux heures du matin, indiquant que ses systèmes d'aspersion allaient se mettre en marche.
Le but de l'aspersion? Créer une couche de glace protectrice sur les vignes, qui vont le protéger du froid. Car malgré les apparences, la création d'une «coque» de glace provoque un dégagement de chaleur — un effet physique — puis protège du froid extérieur. Mais Gaétan Bender a eu de la chance:
Cela n'indique pas pour autant que le gel n'allait pas se former. Contrairement aux côtes du lac de Morat, pas d'éléments stabilisateurs en vue. A cet endroit, il peut tout aussi bien geler à 2 ou 3°C.
L'aspersion d'eau ne protège qu'une partie des vignes du Fulliérain: celles qui se situent en plaine, où le système est efficace. Sur les coteaux, en cas de besoin, il faut sortir les bougies, ce qui n'était pas nécessaire dans la nuit de dimanche à lundi. Précisons que les coteaux représentent 90% de la production de Gaétan Bender.
Un autre élément peut contribuer à la formation du gel: la présence de l'herbe, qui favorise l'humidité. Pour prévenir ce risque, les vignerons la rasent dès que le beau temps le permet. C'est ce que le Fulliérain a d'ailleurs fait il y a un peu plus d'une semaine, lorsque les températures étaient hautes. Une mesure qui lui a peut-être permis de sauver sa récolte.
Décider d'engager la «lutte» ou non contre le gel, c'est un choix. Fabrice Simonet reconnaît, par exemple, que celle-ci n'est pas dans les habitudes des vignerons de la région du Vully, où les températures sont plus clémentes. «Mais ce n'est pas impossible qu'on doive aussi s'y résoudre dans le futur», estime-t-il.
Et dans le cas où le gel frappe bel et bien, il est impossible de connaître l'étendue des dégâts avant le lendemain matin. Une fois le soleil levé, les vignerons constatent si celui-ci a fait des ravages ou non. Ce n'était heureusement pas le cas lundi matin pour le Fribourgeois et le Valaisan. Mais d'autres n'ont peut-être pas eu cette chance.
Les deux hommes sont assurés auprès de l'association coopérative Suisse Grêle, gérée par des professionnels du métier. Si, comme le nom l'indique, l'assurance est principalement active pour la grêle, il est possible de choisir une option «gel».
En cas de désastre, «cela permet de garder le cap», explique Fabrice Simonet, qui y a souscrit après le grand coup de gel de 2017. Il est aussi possible de ne souscrire qu'une partie de ses vignes, comme l'a fait Gaétan Bender avec ses vignes en coteau.