C'est le premier rapport de la Confédération à paraître sur la question. L’Office fédéral de l’environnement (OFEV) a publié ce 13 août un document de 90 pages sur la situation des eaux en Suisse. On y lit entre autres la volonté d'une réflexion accrue sur les réserves d’eau dans le pays, pour faire face aux défis à venir en termes de qualité de l'or bleu. Mais au fait, comment est utilisée l'eau en Suisse? D'où vient-elle? Combien y en a-t-il sous Terre que l'on ne connaît même pas? Bilan.
On peut distinguer trois types d'acteurs à utiliser de l'eau: l'agriculture (20%), les ménages (25%), et les industries (55%). «L’eau consommée en Suisse est captée pour une bonne moitié de manière publique (eau potable), pour une autre moitié de manière privée (essentiellement par l’agriculture et l’industrie)», selon le document synthétique «L'eau en Suisse» édité par les Académies suisses des sciences.
La consommation d’eau par habitant baisse chaque année en Suisse: elle est passée de 500 à environ 300 litres d’eau potable depuis 1990. Cela comprend l’eau industrielle. L'une des explications de cette tendance est que l'évolution de la technologie permet d'utiliser de moins en moins d'eau. Mais le document pointe une autre partie de l'explication: les entreprises délocalisent de plus en plus leurs productions.
De manière très générale, on pourrait dire des nuages. Dans le détail, l'eau que boivent les Suisses provient à 20% des eaux de surface (les lacs, les rivières…), à 40% des eaux souterraines et à 40% des sources, toujours d'après le même rapport. «Les sources se distinguent des eaux souterraines par le fait qu’elles arrivent naturellement à la surface», explique la spécialiste en hydrologie Bettina Schaefli. Les eaux souterraines proprement dites doivent quant à elles être pompées.
L'origine de l'eau potable varie selon le lieu où l'on habite. «A Lausanne, vous buvez de l’eau qui vient du lac. Le Léman ou le lac de Constance auront toujours suffisamment d’eau pour hydrater les gens», poursuit-elle. Mais d'autres communes dépendent essentiellement de sources. Là se pose la question de la qualité des eaux souterraines, soumises à la pollution des industries, de l'agriculture et des ménages (voir point 4).
Avec un volume d’eau d’environ 150 km3, la quantité d'eaux souterraines en Suisse correspond à peu près au volume d’eau total de ses lacs, selon les indications de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV). «Alors que les aquifères poreux constituent une petite partie de ce volume (10 km3), la majorité est contenue dans les aquifères karstiques (120 km3). Enfin, les roches fissurées contiennent environ 20 km3», détaille l'OFEV.
Même si les endroits où chercher de nouveaux captages d'eau sont de moins en moins nombreux, en raison de l'utilisation humaine d'une bonne partie du territoire helvétique, des prospections sont faites par des hydrogéologues pour trouver de nouveaux réservoirs d'eaux souterraines en Suisse. A titre d’exemple, un projet commun de l’OFEV et de l’Institut Suisse de spéléologie et de karstologie (ISSKA) visant une prospection des réserves d'eau profondes entre entre La Neuveville et Aarau a été réalisé l'an dernier. Aussi:
Pour Bettina Schaefli, comme pour l'OFEV, le problème principal réside non pas dans la quantité globale d'eau à disposition que dans sa disponibilité au niveau local et dans sa qualité –. «Il y aura toujours assez d’eau en Suisse. Cependant, au niveau local, elle n’est pas toujours bien répartie.» Or, le centre de gravité du débat s'est déplacé dernièrement:
En même temps, tout est lié: «Si la sécheresse fait que vous êtes en besoin d’eau, vous allez revenir à la question de savoir s’il y a de l’eau dans les sous-sols et si elle est de qualité. Et inversement, si l’on constate qu’une source est trop polluée, le manque de précipitations sera un problème.» Cela étant, Bettina Schaefli se veut rassurante: «L'eau suisse est d’excellente qualité pour boire.» Autrement dit, pas besoin de commencer à se ruer sur de l'eau en bouteille.
«Maintenir et même renforcer la qualité de l'eau est le principal défi pour la Suisse.» C’est bien sûr utile pour les humains comme pour le reste de la nature. Mais concrètement, par quelles mesures doit passer la garantie d'une qualité des eaux? «Cela est étroitement lié à la consommation de produits toxiques dans l’industrie, dans l’agriculture et dans les ménages. N’oublions pas les ménages, car les jardins des privés font partie des endroits les plus pollués en Suisse.»
Actuellement, les glaciers, qui tôt ou tard auront fondu, nous donnent de l’eau qui a été emmagasinée depuis des décennies, voire des centaines d’années. «Pour certains barrages, cela peut concerner jusqu’à 20% de leur réservoir durant une année extrême (où il y a eu peu de neige)», précise Bettina Schaefli. «Mais à l’échelle helvétique, cela ne représente que quelques pour cent.» Le reste du stock provient en effet des précipitations.
Le changement climatique rend les épisodes météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents et concentrés, explique la spécialiste. «En ce qui concerne les précipitations, il faut s’attendre à ce qu’il y en ait plus en hiver et moins en été.» Il s’agira ainsi pour les différents acteurs de revoir la manière dont on produit l’électricité au cours de l’année, «en ayant à l’idée qu’il y aura des années où il pleuvra moins». Et l'experte de conclure: