«Tu vas brûler comme Jeanne d'Arc», «Nous te souhaitons un bel été, parce que les saisons suivantes vont avoir un goût amer», jusqu'au terrible:
Les mêmes phrases, le même mode opératoire: trois membres du personnel politique romand, marqués solidement à gauche, ont récemment reçu des courriers de menace qui ébranlent le monde politique. L'œuvre d'un individu isolé?
Après deux élus vaudois, c'est au tour d'une jeune politicienne valaisanne de recevoir un courrier de ce genre, portant les mêmes types de menaces: Mathilde Mottet, qui a défrayé la chronique après son coup de provoc du 1er Août, où elle faisait un doigt d'honneur au drapeau suisse.
La lettre en question, reçue au domicile de ses parents, fait froid dans le dos. Jugez plutôt:
Trois personnalités de gauche ont été visées par des courriers de menaces. Vous étiez à l'origine d'un coup de provoc au 1er août, en faisant un doigt d'honneur au drapeau suisse. L'évènement est évoqué dans la lettre. Qu'en retenez-vous?
Mathilde Mottet: J'ai exprimé mon avis dans le cadre de la liberté d'expression. On a le droit de ne pas être d'accord avec moi. Mais aucune prise de position, aussi radicale soit-elle, ne mérite de recevoir des insultes, car cela sort du cadre des débats respectueux et constructifs. On ne parle même pas des menaces de mort.
Je note toutefois que cette lettre est quasiment un copier-coller des courriers envoyés à Mathilde Marendaz ou Samson Yemane. Seuls les motifs ou l'insulte utilisée changent... Je n'ai donc pas l'impression qu'on en veuille spécifiquement à moi. Le fait que plusieurs personnes aient reçu ce courrier de menaces me rassure un peu.
Avez-vous peur?
Oui. (Un silence) Oui, quand même. Ça ne m'empêche pas de dormir la nuit.
Le fait que ce soit une lettre physique montre une intention plus sérieuse que les menaces et les insultes reçues en ligne, où on peut rapidement envoyer un message. Quelqu'un a pris soin de rédiger, imprimer et envoyer une lettre entière. Cela me met aussi en colère. Ce genre de courriers, notamment s'ils sont envoyés à des jeunes ou des femmes, ce sont des tactiques d'intimidations pour pousser au silence les défenseurs des idées progressistes.
Les menaces contre les politiques ont été thématisées durant la période du Covid au vu de leur nombre en augmentation. Ce n'est pas pour autant que ce n'est pas sérieux.
L'image du couteau brandi, le feu... cette lettre de menaces est particulièrement trash...
C'est sûr que ce n'est pas le même niveau que les messages que j'ai pu lire jusqu'à présent. Mais cela s'inscrit dans un continuum qui m'a été envoyé depuis début août. Autant les insultes personnelles et sexistes sont dérangeantes. Mais annoncer qu'on va trouver mon adresse et m'agresser comme ça dans la rue, c'est hyper concret et ça fait peur.
Allez-vous porter plainte?
Oui, je vais le faire.
Avez-vous reçu des soutiens?
Oui, j'ai reçu des soutiens de mon parti et d'autres, mais aussi de personnalités féministes romandes. Cela fait du bien de se sentir soutenues entre femmes, il y a une réelle sororité.
Avec la crainte que ces violences, patriarcales, deviennent réalité. Mais j'ai aussi reçu des critiques.
Lesquelles?
J'ai reçu plusieurs messages reprenant notamment la thèse d'Yvan Perrin sur Facebook, qui sous-entend que les lettres auraient été inventées pour nous faire de la pub.
Les textes que nous avons reçus contiennent des insultes sexistes, lesbophobes et racistes, qui sont le fond de commerce de l'extrême-droite. Cela montre qu'elle monte et est aussi de plus en plus décomplexée, prête à attaquer physiquement les gens qui les dérangent. Et quand l'UDC s'acoquine avec l'extrême-droite, alors elle légitime ce genre d'attaques.
Vous estimez que l'UDC est indirectement responsable de l'envoi de ces lettres?
Non, je ne dis pas ça. Mais il y a une systémique derrière ces lettres avec un racisme, un sexisme et de la queerphobie qu'on retrouve aussi dans les programmes de l'UDC. Je pense que l'on nous attaque, car nous défendons des causes progressistes.
Et l'UDC joue un énorme rôle là-dedans.