Le Parlement est de retour. Il semblerait que le Conseil national et le Conseil des États aient envie de jouer un rôle plus actif dans la gestion de la pandémie, même si, jusqu’à présent, les deux chambres ont approuvé les décisions du Conseil fédéral. À cela s’ajoutent les critiques sévères à l’encontre du gouvernement suisse. Andrea Gmür-Schönenberger, qui préside le Groupe du Centre, a annoncé: «Globalement, le Conseil fédéral a fait du bon travail, mais une résistance provenant également des cantons se fait sentir suite à de nombreuses incohérences.»
Pour certains conseillers fédéraux, elle est un frein. La Task force scientifique s’exprime régulièrement. Souvent, elle ne soutient pas les décisions du Conseil fédéral et plaide pour des mesures plus sévères. Désormais, la Commission de l’économie du Conseil national souhaiterait que la Task force ne communique plus sur les mesures prises face au COVID-19. Pour la Commission, c’est uniquement au Conseil fédéral et au Parlement de le faire. Vendredi dernier, cette proposition a été votée à une courte majorité de la Commission de l’économie, par 13 oui, contre 10non.
Pour le conseiller national, Marcel Dobler (PLR), il faut mettre fin à cette« cacophonie médiatique ». La décision de la Commission de l’économie a suscité l’indignation sur les réseaux sociaux où l’on parle de muselage des scientifiques. Mattea Meyer, présidente du Parti socialiste, estime que cette décision a mis le feu aux poudres. Le climatologue renommé Reto Knutti s’est exprimé sur Twitter: «Quand les faits contredisent votre idéologie, vous cherchez à museler les scientifiques. Si la science ne tranche pas, alors ce sont les milieux financiers ou politiques ayant des intérêts personnels qui fourniront leurs interprétations». Selon lui, les milieux politiques ne sont pas obligés de suivre les recommandations de la task force. Toutefois, ils doivent maintenir le dialogue.
L’exemple le plus récent est celui de la Commission de l’économie du Conseil national. Elle souhaite l’ouverture des restaurants et veut reprendre les rênes. L’ouverture des restaurants, des fitness et des milieux culturels est déjà prévue à partir du 22 mars et la Commission de l’économie veut l’inscrire dans la loi COVID-19, qui fera l’objet de la session de printemps qui débute cette semaine. «Eu égard à l’évolution positive de la situation, il serait irresponsable de maintenir des restrictions aussi sévères à la vie sociale et économique de notre pays», a-t-elle communiqué samedi dernier.
Après des débats vraisemblablement riches en émotion, la proposition a été votée à une courte majorité par douze «oui» contre onze «non». Entre autres, la Commission de l’économie demande au Conseil fédéral de lever l’interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes à l’intérieur. Le Conseil fédéral envisage d’ouvrir les terrasses des restaurants dès le 22 mars. Pour le président de la Confédération, Guy Parmelin, il ne faut pas assouplir trop rapidement pour éviter un effet «yo-yo» (entretien avec le Schweiz am Wochenende). Le PS est sceptique quant au fait que le Parlement souhaite participer aux affaires du Conseil fédéral. Le parti a critiqué les membres de la Commission. Il estime qu’ils se prennent pour des professionnels de la santé et qu’ils limitent la marge de manœuvre du gouvernement. À l’heure actuelle, il est difficile de prévoir la situation épidémiologique des semaines à venir. Le conseiller national, Martin Baümle (parti vert’libéral), a averti sur Twitter que la Commission de l’économie pourrait être responsable de la troisième vague. Balthasar Glättli, président du Parti écologiste suisse, parle d’un renversement du Conseil fédéral «par la majorité bourgeoise».
La position du centre sera déterminante. La présidente du Groupe du Centre, Andrea Gmür-Schönenberger soutient les appels pour une ouverture plus rapide. Celle qui représente le canton de Lucerne au Conseil des États a déclaré:
Elle estime que la situation n’est pas la même que l’année passée lorsque le système de santé était au bord de l’effondrement. Toutefois, elle est convaincue que la majorité du groupe ne soutiendra pas la proposition, car il ferait fausse route. Pour elle, le Parlement ne doit pas inscrire des mesures d’ouverture dans la loi et le Conseil fédéral doit continuer à prendre des décisions quotidiennes en se référant aux indications. Son groupe soutient l’idée d’une déclaration du Conseil national initiée par le conseiller national Martin Landolt et appelant à assouplir les mesures plus rapidement. Andrea Gmür-Schönenberger estime que cela passe par un changement de stratégie, sans pour autant que le Conseil fédéral ait les mains liées.