Suisse
Politique

«Trahison» et «avertissement»: l'élection du Conseil fédéral

Journée d'élection du mercredi 13 décembre: Beat Jans, Gerhard Andrey et Daniel Jositsch.
De gauche à droite: Gerhard Andrey, Daniel Jositsch et Beat Jans.Keystone

Entre «trahison» et «avertissement»: récit d'une journée d'élection

Le Conseil fédéral a été réélu et complété. Le socialiste Beat Jans, 59 ans, succède à Alain Berset. On compte deux perdants: les Zurichois, amers, qui vont devoir être absents du gouvernement pendant un temps. Et les Verts, qui échouent avec leur candidat dans leur tentative de renverser Ignazio Cassis.
13.12.2023, 20:0014.12.2023, 22:48
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C'est une époque entière qui se tourne, celle des années 2010 qui auront, d'une certaine manière, tiré en longueur. Avec le départ du Conseil fédéral d'Alain Berset et l'arrivée de Beat Jans, c'est un gouvernement post-Covid désormais engagé dans le gros des années 2020 qui se profile.

Le Bâlois, élu au Conseil fédéral après un «trou» d'un demi-siècle pour son canton, cochait toutes les cases. Il devrait vite trouver ses marques au Conseil fédéral, lui qui a arpenté les couloirs du Parlement pendant une décennie comme conseiller national (2010-2020) et a fait l'expérience d'un exécutif important en tant que conseiller d'Etat de Bâle-Ville, depuis 2021.

Der neu gewaehlte Bundesrat Beat Jans, SP-BS, schreitet unter Applaus in den Nationalratssaal an den Gesamterneuerungswahlen des Bundesrates durch die Vereinigte Bundesversammlung, am Mittwoch, 13. De ...
Beat Jans, nouveau conseiller fédéral socialiste.Keystone

Avec Jans, c'est un choix solide que le Parlement a approuvé. Le conseiller aux Etats Baptiste Hurni (PS/NE) donne son avis:

«C'est très réjouissant pour Bâle et un beau signal»
Baptiste Hurni, conseiller aux Etats socialiste (NE)
Der neu gewaehlte Bundesrat Beat Jans, SP-BS, bedankt sich beim Parlament an den Gesamterneuerungswahlen des Bundesrates durch die Vereinigte Bundesversammlung, am Mittwoch, 13. Dezember 2023 im Natio ...
Prêt à plonger dans le grand bain du Conseil fédéral.Keystone

Le socialiste note aussi la «photo de famille» bâloise en cette fin d'année 2023: le Conseil national est présidé par un parlementaire de Bâle-Campagne, Eric Nussbaumer; le Conseil des Etats par Eva Herzog de Bâle-Ville, candidate malheureuse au Conseil fédéral il y a une année; et désormais Beat Jans qui y parvient. Tous sont d'ailleurs socialistes.

«C'est une manière de dire aux Bâlois qu'on ne les a pas oubliés»
Baptiste Hurni, conseiller aux Etats socialiste (NE)

La ville rhénane est investie dans les industries pharmaceutiques et le parti à la rose plutôt critique des lobbies de la pharma. Pour Baptiste Hurni, peu de chances toutefois pour que Beat Jans «se mette soudain systématiquement à soutenir la chimie bâloise», notamment s'il reprend le Département de l'Intérieur et de la Santé de Berset. «Ce n'était pas le cas quand il était au Conseil national, je ne vois pas de problème», explique le Neuchâtelois.

Zurich ronge son frein

Mais l'élection de Beat Jans ne s'est pas faite sans quelques tentatives de subversion. La présence du conseiller aux Etats zurichois, Daniel Jositsch, comme «candidat sauvage» dans les trois tours de scrutin, a marqué la journée.

Staenderat Daniel Jositsch, SP-ZH, hinten Mitte, zwischen seinen Ratskolleginnen Tiana Angelina Moser, GLP-ZH, links, und Andrea Gmuer, Mitte-LU, bleibt nach dem zweiten Wahlgang zur Besetzung des vak ...
Daniel Jositsch, au milieu au fond, guette.Keystone

Baptiste Hurni s'irrite: «Le processus de sélection des candidats a été fait proprement de notre part, avec un choix de deux candidatures parfaitement éligibles.»

«L'épilogue est positif, mais c'est très agaçant. C'est le jeu, les règles implicites de cette Assemblée: on vote dans le ticket»
Baptiste Hurni, conseiller aux Etats socialiste (NE)

«Le PS l'a fait pour Ignazio Cassis et pour le siège socialiste, environ 70 parlementaires, vraisemblablement de droite, ont trouvé amusant de ne pas respecter cette règle», explique le Neuchâtelois.

En effet, difficile de voir dans les votes en faveur de Daniel Jositsch autre chose que la tentative désespérée de la droite zurichoise de remettre un des «leurs» au Conseil fédéral. Mais aussi de tous les parlementaires qui préféraient Jositsch, moins à gauche que Jans et Pult.

«Je lance un avertissement: les règles n'ont pas été respectées par tout le monde cette année. On s'interrogera si nous-mêmes devrons les respecter la prochaine fois...»
Baptiste Hurni, conseiller aux Etats socialiste (NE)

Les Zurichois vont devoir s'habituer à ces prochaines années, qui se feront sans représentation de la plus grande ville de Suisse à Berne. La dernière fois qu'une situation similaire a eu lieu, c'était en 1989 après la démission, suite à une affaire, de la première conseillère fédérale du pays, la radicale Elisabeth Kopp. Elle ne sera remplacée par un autre Zurichois «qu'en» 1995, avec l'élection du socialiste Moritz Leuenberger. «Zurich reste une région de première importance, mais si elle n'est pas représentée quelques années, ce n'est pas dramatique», estime Baptiste Hurni, qui ajoute:

«L'alternance fait partie des traditions helvétiques»
Baptiste Hurni, conseiller aux Etats socialiste (NE)

Jon Pult: perdre pour mieux rebondir?

Il y a un autre perdant: le deuxième candidat du ticket PS. Pour Jon Pult, c'est une défaite malgré lui un poil humiliante qui a eu lieu. Il termine troisième, derrière Daniel Jositsch, dans tous les tours. Sans rancune, l'homme a solidement applaudi Beat Jans, qu'il a rejoint, dès la fin de son discours, devant la tribune pour une embrassade. Celui-ci a ensuite salué les coprésidents du PS avant de quitter la salle, sans s'adresser à Daniel Jositsch.

Jon Pult applaudiert dem neu gewaehlten Bundesrat Beat Jans, SP-BS, zu nan den Gesamterneuerungswahlen des Bundesrates durch die Vereinigte Bundesversammlung, am Mittwoch, 13. Dezember 2023 im Nationa ...
Jon Pult, sans rancune.Keystone

Le jeune loup a tenté de rejouer le «scénario Berset», celui de l'ambitieux prodige qui avait tout pour lui. Mais comparaison n'est pas raison et on ne remplace pas aussi facilement un conseiller fédéral par son sosie. Si son profil n'a pas suffisamment convaincu, le Grison de 39 ans peut néanmoins se targuer de ce beau fait d'armes à son tableau de chasse. Peut-être le reverra-t-on pour tenter de succéder à la socialiste Elisabeth Baume-Schneider?

Verts de rage et bleus de peur

Pour les Verts aussi, l'heure n'est pas à la fête. Car l'élection de ce mercredi en cachait en fait une deuxième. La formation écologiste avait lancé dans la course le solide Gerhard Andrey, pour tenter de détrôner Ignazio Cassis. Le Fribourgeois aurait eu toutes ses chances dans d'autres circonstances, si les Verts n'avaient pas reflué le 22 octobre dernier.

Leur dernière chance les a quittés le matin même, à 7h: après sa réunion de pré-élection, le Parti socialiste annonce qu'il tient à la «formule magique» et à la stabilité gouvernementale. Autrement dit: il ne donne pas de consigne de vote pour Andrey. Une véritable «trahison», tonne la conseillère aux Etats neuchâteloise Céline Vara.

Il n'empêche, le doute était installé. Certains socialistes allaient-ils désobéir en votant pour Gerhard Andrey, au risque de provoquer plusieurs tours de scrutin et de tenter un renversement de tendance? Le suspense autour du siège d'Ignazio Cassis était donc bien présent et le silence total avant la déclaration du président du Conseil national, Eric Nussbaumer. Mais le Tessinois est passé au premier tour à 167 voix, un score assez bas mais parfaitement au-dessus de la majorité absolue.

Son score plus que moyen a, d'ailleurs, été suivi par un autre score moyen, pour une une ministre pourtant puissante et populaire: Karin Keller-Sutter. Comment l'expliquer? Pour Damien Cottier, chef de groupe libéral-radical aux Chambres, ce n'est pas la Saint-galloise qui est visée, mais bien le deuxième siège PLR.

«Il y a eu une attaque sur le siège d'Ignazio Cassis qui n'a pas fonctionné. Puis un signal envoyé avec celui de Karin Keller-Sutter»
Damien Cottier, chef du groupe PLR aux Chambres et conseiller national (NE)

Si le Neuchâtelois ne nomme pas explicitement les Verts, il pointe dans leur direction. «Karin Keller-Sutter est considérée comme une ministre des Finances compétente et une bonne conseillère fédérale. Je remarque que le signal de soutien était assez net de la part de l'Assemblée fédérale.»

«La formule gouvernementale actuelle est solide»
Damien Cottier, chef du groupe PLR aux Chambres et conseiller national (NE)

Et le conseiller national de louer la preuve du «temps long», tout en remarquant également que le score de Gerhard Andrey face à Ignazio Cassis est inférieur à celui de Regula Rytz, en 2019, lorsque les Verts avaient déjà tenté de ravir un siège au PLR.

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