«Intenable», «inacceptable», «très grave»: la panne des numéros d’urgence ne passe pas auprès des élus du Parlement. Elle ne passe plus, en fait, car tout le monde a encore en tête la longue série de dysfonctionnements similaires, ayant frappé le pays l’an dernier.
«C’est très grave. Ces numéros d’urgence sont le cœur même du service public. Swisscom va devoir clairement s’expliquer», tonne le socialiste grison Jon Pult, vice-président de la commission des télécommunications du Conseil national.
«Le nouvel échec des numéros d'urgence est intenable. Swisscom ne maîtrise visiblement pas la technologie», s’insurge pour sa part Marionna Schlatter, conseillère nationale écologiste zurichoise et membre de la même commission.
«Comment une telle panne peut arriver dans un pays comme la Suisse?», s’interroge de son côté l’élu du Centre (ex-PDC) valaisan Philipp Matthias Bregy.
Il compte désormais faire en sorte que la direction de Swisscom vienne à la rencontre de la commission – dont il fait aussi partie – en août, dès la rentrée, pour s’expliquer clairement. Comme la société, en majorité aux mains de la Confédération, l’avait déjà fait l’an dernier…
Car ce qui gêne profondément, c’est qu’une telle panne se reproduise. En juillet 2020, peu après les problèmes à répétition, Marionna Schlatter avait interrogé le Conseil fédéral. Aujourd'hui, elle en veut à l’Office fédéral de la communication (OFCOM).
«On a l'impression que trop peu de leçons ont été tirées des derniers incidents. Dans mon interpellation, j'ai demandé si l'on en faisait assez pour donner la priorité à la stabilité du réseau: la réponse à cette question est, désormais, clairement non. Il est évident que trop peu a été investi dans de bons experts et des scénarios de «back-up».»
«Dans le même temps, l'OFCOM a renoncé à certaines de ses responsabilités, par exemple en ne s'intéressant pas de plus près à la planification des investissements», estime-t-elle.
Car une question se pose: Swisscom ne priorise-t-elle pas trop les business rentables, au détriment du service public? «Si l’entreprise est bien dirigée, c’est une chance, car les activités rentables renforcent le service public. Au contraire, si c’est mal géré, c’est un problème», rétorque Jon Pult. «C’est désormais aux politiques de bien faire comprendre que les bénéfices doivent servir le service public.»
Tout le monde semble d’accord: il faut désormais que les choses changent pour que les pannes soient prises en compte dans la loi, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. «Il y a déjà plusieurs interventions parlementaires allant dans ce sens qui ont été déposées. Mais aujourd’hui, il y a urgence», lance Philipp Matthias Bregy.
«Nous devons examiner comment nous pouvons augmenter la pression, par exemple avec des conséquences. Et puis nous devrions également examiner si nous pouvons peut-être rendre les systèmes redondants avec d'autres fournisseurs», selon Marionna Schlatter.
Ce matin, le Tages-Anzeiger s’est interrogé sur le maintien du directeur de Swisscom, Urs Schaeppi, parlant de la «mésaventure de trop», alors que «le temps des excuses est désormais terminé».
Une démission du directeur, ce n’est pas ce qu’attendent les élus contactés. «Ce n’est pas une question personnelle et ça ne sert à rien de tirer sur Urs Schaeppi», estime Philipp Matthias Bregy. Pour Jon Pult, il faut comprendre dans les détails ce qu’il s’est passé. «Il y a un problème de communication chez Swisscom. C’est à nous, politiques, de prendre les choses en main.» Marionna Schlatter n’est pas fan du «principe du football», où l’on fait tomber les têtes. Mais quand même: «Il doit maintenant prouver qu'il prend le problème au sérieux».