Depuis le début de l'année, les prix à la pompe de l'essence et du diesel ont augmenté de plus de 20%. Une bonne affaire pour le secteur pétrolier. En Allemagne, les raffineries réalisent des marges plus élevées que jamais depuis 1995. Pourtant, le prix du carburant s'est détaché du prix du pétrole brut et augmente nettement plus rapidement.
En comparaison avec les pays européens, les bénéfices réalisés par les stations-service suisses se situaient déjà à un niveau élevé, même avant l'attaque russe contre l'Ukraine. Ils devraient maintenant avoir encore augmenté, même s'il n'existe pas de chiffres officiels à ce sujet.
En raison de tels signes de défaillance du marché et de manque de transparence, le surveillant des prix Stefan Meierhans a ouvert une enquête. Il envisage, dans un premier temps, d'exiger les données relatives à l'évolution des marges.
Sophie Michaud Gigon veut aller encore plus loin. La conseillère nationale verte et directrice de la Fédération romande des consommateurs (FRC) demande au ministre de l'Economie Guy Parmelin de faire appel à la Commission de la concurrence (Comco) en cas d'abus présumé.
Elle a déposé une motion à ce sujet auprès de la Commission de l'économie et des redevances (CER) du Conseil national. En effet, selon la loi sur les cartels, le Département de l'économie peut demander aux autorités de la concurrence de mener une enquête. La CER devrait se prononcer à ce sujet lors de sa prochaine séance à la mi-août.
Sophie Michaud Gigon aimerait savoir si des abus de pouvoir sur le marché font grimper les prix des carburants de manière excessive et si la branche augmente ses marges au détriment de la clientèle suisse.
«La Suisse est un îlot de prix élevés. Nous savons que les entreprises aiment y siphonner le pouvoir d'achat plus élevé. Nous devons en tenir compte dans le débat sur la hausse des prix de l'essence», déclare-t-elle à CH Media. C'est pourquoi il est urgent, selon elle, que la Commission de la concurrence mette en lumière l'évolution des marges du secteur pétrolier. «Les automobilistes doivent savoir quelle est la marge des raffineries et des stations-service».
En Allemagne, l'Office des cartels surveille déjà de près l'évolution des prix des carburants. En effet, une réduction fiscale du gouvernement de 35,2 centimes par litre d'essence et de 16,7 centimes pour le diesel n'a été que partiellement répercutée sur les consommateurs. Cela alimente l'hypothèse selon laquelle les entreprises ont retenu une partie de l'argent de l'allègement et l'ont comptabilisé comme des bénéfices.
Le président de l'Office des cartels allemand a déclaré qu'il allait «regarder de très près les compagnies pétrolières» et «poser des questions très désagréables dans certaines circonstances». L'autorité a déjà lancé une enquête pour savoir pourquoi les prix du pétrole brut et des carburants évoluent de manière dissociée. Il a déclaré dans un communiqué:
En Suisse, les prix des carburants ont continué à augmenter ce mois-ci. Selon le TCS, le litre de sans plomb 95 coûtait 2,24 francs début juin et 2,31 francs à la mi-juin. Durant la même période, le litre de diesel a grimpé de 10 centimes pour atteindre 2,40 francs.
Pour le ministre de l'économie Guy Parmelin, il n'est pas question que la Comco se penche sur le cartel des carburants comme en Allemagne. Lors du moment des questions du Conseil national, il a déclaré en réponse à une question à ce sujet que la Comco observait le marché de l'énergie et analysait les indices.
«Actuellement, la Comco n'a pas d'indices d'accords illégaux ou d'abus de position dominante en ce qui concerne le niveau des prix de l'énergie». En attendant que les autorités de la concurrence agissent, Sophie Michaud Gigon doit donc convaincre une majorité des députés qu'une enquête est nécessaire.
Traduit de l'allemand par Nicolas Varin