Suisse
Russie

Armes suisses en Ukraine: la Russie contacte les Verts

Armes suisses en Ukraine: la Russie contacte les Verts
Le président des Verts suisses, Balthasar Glättli, a reçu un appel de RIA Novosty, une agence de presse russe basée à Genève.Image: Shutterstock

La Russie passe un coup de fil aux Verts suisses

Suite à leur opposition à la réexportation d'armes suisse à l'Ukraine mardi à Berne en commission parlementaire, les Verts ont reçu un appel téléphonique d'une agence de presse russe proche de Poutine. Mais le parti écologiste est divisé: ce samedi à Genève, lors de l'assemblée des délégués des Verts, la Bernoise Natalie Imboden soumettra un amendement pour autoriser exceptionnellement la réexportation de matériel militaire suisse à l'Ukraine. Les révélations de watson.
26.01.2023, 18:3808.05.2023, 11:41
Plus de «Suisse»

Allo, c’est la Russie. Après leur «non» à la réexportation de matériel de guerre à l’Ukraine, mardi à Berne en commission de politique de sécurité du Conseil national, le président des Verts suisses, Balthasar Glättli, a reçu un appel de RIA Novosty, une agence de presse russe basée à Genève. Réputé sur la même ligne que celle de Vladimir Poutine, le média russe voulait connaître les raisons pour lesquelles les Verts, tout comme l’UDC, d’ailleurs, ont voté contre une motion et une initiative parlementaire favorables à la réexportation de matériel militaire suisse à l’Ukraine, comme le demandent aujourd’hui l’Espagne, le Danemark et l’Allemagne.

Un conseiller national neuchâtelois contacté

Balthasar Glätlli a transféré l’appel – la patate chaude – à son collègue de parti, le Neuchâtelois Fabien Fivaz, membre de la commission de politique de sécurité du National. L’agence RIA Novosty s’attendait-elle à entendre une resucée d’Ostpolitik, ce dialogue amorcé dans les années 70 au temps de la guerre froide par le chancelier ouest-allemand social-démocrate Willy Brandt avec le bloc communiste représenté par la République démocratique allemande? L’actuel chancelier, OIaf Scholz, était de ce rapprochement avec ceux qu’on appelait en Occident les «Rouges».

Les choses sont peut-être plus simples à présent. Fabien Fivaz a certainement dit au journaliste du média russe ce qu’il déclare ici à watson:

«Nous sommes pour une aide non-militaire à l’Ukraine. Nous avions d’ailleurs demandé que l’aide de la Suisse à ce pays soit portée à 200 millions de francs, au lieu de 100, dans le budget 2023 voté à la fin de l’année dernière. Nous n’avons pas été suivis. Quant à la guerre, il ne fait pas de doute pour nous que la Russie est l’agresseur et l’Ukraine l’agressé. Nous souhaitons que Vladimir Poutine soit traduit devant la justice internationale pour crimes de guerre et nous aimerions que les avoirs russes des oligarques russes en Suisse soient réellement traqués, ce qui n’est pas le cas actuellement. Enfin, et c’est même notre ADN, nous sommes pacifistes. C’est en cela que la neutralité de la Suisse, avec sa pratique des bons offices, nous paraît être une chance. Elle pourrait peut-être permettre de renouer le dialogue entre les parties. Or, nous affaiblirions notre voix en acceptant d’entrer dans la guerre en livrant des armes, même de façon indirecte, à l’Ukraine.»
Fabien Fivaz, conseiller national Verts neuchâtelois

Divisions chez les Verts

Les Verts n’ont en pas pour autant fini avec la question de l’aide militaire à l’Ukraine. Elle devrait être à nouveau discutée lors de l’assemblée des délégués du parti qui se tiendra ce samedi 28 janvier à Genève en vue des élections fédérales d’octobre. Faut-il s’attendre à une surprise? En Allemagne, les Verts ont tourné casaque: peu avant l’invasion russe du 24 février 2022, déjà membres de la coalition au pouvoir, ils s’étaient prononcés contre la livraison d’armes allemandes à l’Ukraine au cas où Moscou agresserait ce pays. Ils ont changé d’avis dans l’intervalle, obtenant du chancelier Scholz l’envoi de Leopard 2 à l’Ukraine.

La conseillère nationale bernoise des Verts, Natalie Imboden, défendra samedi un amendement demandant pour l’Ukraine une exception à la non-réexportation de matériel militaire. Natalie Imboden tient là une position probablement minoritaire à l’intérieur de son parti, mais on ne sait jamais.

«Avec quatre autres délégués suisses, j'ai pris part en décembre au congrès des Verts européens, à Copenhague, au Danemark. Si nous sommes opposées à toute exportation directe d’armement, nous sommes favorables à une réexportation en faveur de l’Ukraine et dans ce seul cas. Il est indéniable que la Suisse devrait faire plus dans la saisie d’avoirs russes sur son territoire, mais, en l’occurrence, nous pensons que l’agression de l’Ukraine, et des femmes ukrainiennes se sont ouvertes à nous de leurs souffrances, justifie une exception. Il en va plus ici de solidarité, la nôtre, avec un peuple meurtri, que de neutralité. De toute manière, ce n'est certainement pas l’armement suisse qui fera la différence.»
Natalie Imboden, conseillère nationale bernoise des Verts

Verts et UDC: une «unheilige Allianz»

Verts et UDC étaient donc d’accord, contre la majorité PLR, PS et Le Centre, pour s’opposer à l’envoi indirect d’armes suisses à l’Ukraine. Fabien Fivaz parle à ce propos non sans humour d’une «unheilige Allianz, une alliance contre-nature». Puis reprend son sérieux: «Nous n’étions pas d’accord avec l'UDC pour les mêmes raisons», précise-t-il. Le parti conservateur défend une neutralité armée, les Verts sont pour une Suisse sans armée.

Les démocrates du centre estiment, eux, qu’on ne peut être neutre et livrer des armes seulement à l’une des parties en guerre. «Soit on en livre aux deux belligérants, soit à aucun des deux», résume le conseiller national UDC bernois Erich Hess, joint par watson. L’UDC valaisan Jean-Luc Addor, membre de la commission de politique de sécurité du National, est du même avis. A-t-il lui aussi reçu un appel de l’agence russe RIA Novosty? Il répond, amusé:

«Je ne suis pas obligé de vous répondre, mais la réponse est non»

L'exception Jacqueline de Quattro chez les PLR

Il est beaucoup question d’exceptions dans ce dossier diplomatico-militaire. En voici une autre: mardi en commission de politique de sécurité, la conseillère nationale vaudoise Jacqueline de Quattro fut la seule de son parti, le PLR, à voter contre la levée de l’interdiction de réexportation de matériel militaire en faveur de l’Ukraine:

«Livrer des armes à un belligérant, même de façon indirecte, est selon moi difficilement compatible avec la neutralité de la Suisse. Je suis d’une manière générale opposée à la prolifération d’armes. Je sais que je suis minoritaire dans mon parti sur la question de l’Ukraine et sans doute serai-je mal comprise. Mais j’entends rester fidèle à mes valeurs et travailler à d’autres moyens que celle des armes pour essayer de trouver une solution au conflit russo-ukrainien.»
Jacqueline de Quattro, conseillère nationale PLR vaudoise
Copin comme cochon: la neige en ville en Suisse romande
Video: watson
2 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
2
Voici le projet du Conseil fédéral pour financer la 13ᵉ rente AVS
La 13ᵉ rente AVS sera versée une fois par an. Son financement sera assuré par une hausse des cotisations salariales et, éventuellement, une hausse de la TVA, annonce mercredi le Conseil fédéral.

La 13ᵉ rente AVS sera versée annuellement et financée de manière durable à partir de 2026. Lors de sa réunion du 27 mars 2024, le Conseil fédéral a défini les grandes lignes de la mise en œuvre de l'initiative populaire acceptée le 3 mars 2024 en votation populaire. Un projet défendu par la ministre de la Santé, Elisabeth Baume-Schneider (PS/JU).

L’article