Allo, c’est la Russie. Après leur «non» à la réexportation de matériel de guerre à l’Ukraine, mardi à Berne en commission de politique de sécurité du Conseil national, le président des Verts suisses, Balthasar Glättli, a reçu un appel de RIA Novosty, une agence de presse russe basée à Genève. Réputé sur la même ligne que celle de Vladimir Poutine, le média russe voulait connaître les raisons pour lesquelles les Verts, tout comme l’UDC, d’ailleurs, ont voté contre une motion et une initiative parlementaire favorables à la réexportation de matériel militaire suisse à l’Ukraine, comme le demandent aujourd’hui l’Espagne, le Danemark et l’Allemagne.
Balthasar Glätlli a transféré l’appel – la patate chaude – à son collègue de parti, le Neuchâtelois Fabien Fivaz, membre de la commission de politique de sécurité du National. L’agence RIA Novosty s’attendait-elle à entendre une resucée d’Ostpolitik, ce dialogue amorcé dans les années 70 au temps de la guerre froide par le chancelier ouest-allemand social-démocrate Willy Brandt avec le bloc communiste représenté par la République démocratique allemande? L’actuel chancelier, OIaf Scholz, était de ce rapprochement avec ceux qu’on appelait en Occident les «Rouges».
Sinuosité des chemins politiques. Scholz en 1984, jeune socialiste anti-OTAN, anti-fusées US, critique du chancelier Schmidt, rencontre Krenz, du Politburo de l’Allemagne de l’Est, au nom du pacifisme. Les lignes ont changé mais l’opinion allemande est de même divisée sur les 1/2 pic.twitter.com/Ar69CAFx0J
— Darius Rochebin (@DariusRochebin) January 25, 2023
Les choses sont peut-être plus simples à présent. Fabien Fivaz a certainement dit au journaliste du média russe ce qu’il déclare ici à watson:
Les Verts n’ont en pas pour autant fini avec la question de l’aide militaire à l’Ukraine. Elle devrait être à nouveau discutée lors de l’assemblée des délégués du parti qui se tiendra ce samedi 28 janvier à Genève en vue des élections fédérales d’octobre. Faut-il s’attendre à une surprise? En Allemagne, les Verts ont tourné casaque: peu avant l’invasion russe du 24 février 2022, déjà membres de la coalition au pouvoir, ils s’étaient prononcés contre la livraison d’armes allemandes à l’Ukraine au cas où Moscou agresserait ce pays. Ils ont changé d’avis dans l’intervalle, obtenant du chancelier Scholz l’envoi de Leopard 2 à l’Ukraine.
La conseillère nationale bernoise des Verts, Natalie Imboden, défendra samedi un amendement demandant pour l’Ukraine une exception à la non-réexportation de matériel militaire. Natalie Imboden tient là une position probablement minoritaire à l’intérieur de son parti, mais on ne sait jamais.
Verts et UDC étaient donc d’accord, contre la majorité PLR, PS et Le Centre, pour s’opposer à l’envoi indirect d’armes suisses à l’Ukraine. Fabien Fivaz parle à ce propos non sans humour d’une «unheilige Allianz, une alliance contre-nature». Puis reprend son sérieux: «Nous n’étions pas d’accord avec l'UDC pour les mêmes raisons», précise-t-il. Le parti conservateur défend une neutralité armée, les Verts sont pour une Suisse sans armée.
Les démocrates du centre estiment, eux, qu’on ne peut être neutre et livrer des armes seulement à l’une des parties en guerre. «Soit on en livre aux deux belligérants, soit à aucun des deux», résume le conseiller national UDC bernois Erich Hess, joint par watson. L’UDC valaisan Jean-Luc Addor, membre de la commission de politique de sécurité du National, est du même avis. A-t-il lui aussi reçu un appel de l’agence russe RIA Novosty? Il répond, amusé:
Il est beaucoup question d’exceptions dans ce dossier diplomatico-militaire. En voici une autre: mardi en commission de politique de sécurité, la conseillère nationale vaudoise Jacqueline de Quattro fut la seule de son parti, le PLR, à voter contre la levée de l’interdiction de réexportation de matériel militaire en faveur de l’Ukraine: