Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) organise des camps d'entraînement clandestins en Suisse. C'est ce que le Service de renseignement de la Confédération (SRC) révèle dans son rapport de situation 2024 récemment publié. En outre, le PKK collecte de l'argent et fait de la propagande dans notre pays.
On sait depuis longtemps que le PKK est actif en Europe occidentale – et la Suisse ne fait pas exception. Les organisations de façade du PKK sont souvent des associations culturelles kurdes qui défendent le droit à l'autodétermination des Kurdes et cultivent la tradition, la culture et la langue au sein de la diaspora kurde.
Ces organisations dites «de façade» du PKK sont une source de revenus importante pour le mouvement. Leurs fonds proviennent des cotisations de leurs membres, de manifestations et d'actions de collecte. Selon les experts, une grande partie des fonds collectés est utilisée pour le maintien des structures en Europe. Mais une partie de l'argent serait également utilisée pour soutenir la lutte armée du PKK en Turquie et dans ses zones de repli au nord de l'Irak.
Selon l'évaluation de longue date du service de renseignement, le PKK mise sur une double stratégie: en Turquie, il continue à mener une lutte armée contre le gouvernement. Mais en Europe, il renoncerait généralement à la violence. Des provocations ou des événements particuliers pourraient néanmoins «conduire sporadiquement à des protestations violentes et à des débordements», peut-on lire dans le rapport de situation du SRC de l'année dernière.
Selon le SRC, le PKK recruterait également des activistes pour la cause kurde. Le rapport de situation indique que le PKK endoctrine des jeunes et recrute de manière ciblée des individus pour en faire de futurs cadres et les envoyer au front contre l'armée turque.
Ces activités de financement et de recrutement du PKK sont depuis longtemps dans le collimateur du SRC. Les sections correspondantes dans les rapports de situation n'ont pratiquement pas changé lors des dix dernières années.
Il n'est, en revanche, pas question de camps d'entraînement dans les enquêtes précédentes. Interrogée sur les raisons qui ont conduit le SRC à cette réévaluation, une porte-parole ne veut pas donner plus de détails sur les camps d'entraînement. Elle indique que la stratégie de formation du PKK a déjà été mentionnée en 2010 et 2012. En 2010, il n'est toutefois question d'«activités de formation» qu'en ce qui concerne l'Europe de l'Ouest, alors qu'en 2012, le SRC écrivait que «quelques informations non confirmées faisaient état de camps d'entraînement en Suisse».
La conseillère nationale Jacqueline de Quattro (PLR/VD) veut savoir comment le Conseil fédéral évalue la situation. Lors de la session d'hiver, elle demandera des informations sur le nombre de camps d'entraînement du PKK et la stratégie des autorités pour faire face à cette nouvelle menace.
La vice-présidente de la Commission de la politique de sécurité se montre inquiète:
Selon elle, la Suisse connaît déjà une forte hausse de l'antisémitisme et des actes de violence, notamment en raison de la radicalisation des jeunes. Elle rappelle que le PKK endoctrine justement les jeunes et les recrute de manière ciblée.
Le PKK mène une lutte armée pratiquement ininterrompue contre l'armée turque depuis 1984. Le groupe est considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l'UE et les Etats-Unis.
Parallèlement, le parti kurde syrien PYD, étroitement lié au PKK, et son aile militaire YPG sont considérés comme les principaux alliés des pays occidentaux dans la lutte contre l'Etat islamique (EI).
Dernièrement, le PKK a fait les gros titres avec une attaque contre un groupe d'armement semi-public à Ankara qui a fait cinq morts et 22 blessés. Pour la conseillère nationale PLR de Quattro, cette attaque montre «que le PKK n'a pas renoncé au terrorisme».
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci