C'était le shitstorm politique bien senti du week-end sur X (ex-Twitter). Que pouvait-il se passer entre la «Pride» de la ville de Berne, prévue samedi dernier, et la fête nationale du 1er août, prévue mardi? Une bataille de drapeaux, pardi.
Bern macht sich bunt für die #EuroGames 2023 und wünscht allen Athlet*innen faire Spiele und viel Erfolg.
— Stadt Bern (@Bern_Stadt) July 24, 2023
Alle Infos zum Event: https://t.co/9jWBY6NEtV pic.twitter.com/Jg01lnf3JG
Et pas n'importe laquelle. Alors que la ville avait échangé les drapeaux nationaux et bernois pour une rangée sans faille d'étendards LGBT+, les Jeunes UDC sont venus prendre un cliché avec un grand drapeau suisse, au milieu de la rue. Histoire de remettre les choses en place dans la capitale fédérale. La photo a été partagée sur le réseau social et affublé du commentaire:
D'abord publié sur le compte alémanique de la formation politique de jeunesse, le post a été traduit et posté en français. Il n'en fallait pas plus pour que Twitter s'enflamme. Les deux comptaient ensemble, lundi matin, plus d'un millier de like et des centaines de partages et de commentaires.
Berne hisse des drapeaux qui représentent la censure et l'exclusion, la décadence et la ruine.
— Jeunes UDC Suisse (@JeunesUdc) July 29, 2023
Nous, les Jeunes UDC, affichons le drapeau qui représente la liberté et la force, la cohésion et notre avenir. 🇨🇭🇨🇭🇨🇭
Libérons la Suisse - votez Jeunes UDC ! pic.twitter.com/urMbvmy9nX
Un utilisateur tente de prendre les jeunes conservateurs à leur propre jeu en écrivant: «Si vous n’aimez pas la liberté suisse d’arborer ce drapeau arc-en-ciel, allez donc vivre en Arabie saoudite où il est illégal». On peut aussi lire:
D'autres ont réagi avec humour:
Gngngn. pic.twitter.com/0KZ88dNpTs
— BBento (@BentoBastien) July 30, 2023
Si les messages de soutien sur le compte francophone sont moins nombreux, ils ne sont pas inexistants. «Bravo, chers jeunes UDC», peut-on lire, ou encore un autre qui se pose la question: «Le wokisme touche maintenant la Suisse??».
Je ne vote plus... mais je voterai pour vous. Préservez nos valeurs et notre pays
— Zen Attitude 🪷 (@TriciaInfos) July 29, 2023
Dans le fatras ambiant, certains tentent une réconciliation:
So ist doch schön, 🏳️🌈 und 🇨🇭, den die absolute Meinungsfreiheit ist das wichtigste.😌
— Fabian (@ffaebi) July 29, 2023
Dimanche après-midi, les Jeunes UDC se sont aussi fendus d'une courte vidéo, dans le même registre et reprenant le même texte — en Suisse allemand uniquement.
Du côté des politiques, assez peu de réactions face à ce coup de provoc'. Le conseiller national Damien Cottier (PLR/NE), chef de file du groupe libéral-radical aux Chambres fédérales et qui assume son homosexualité, a réagi:
Chers @JeunesUDCSuisse le drapeau 🏳️🌈 n’est ni la négation de la🇨🇭ni un message de censure (?) exclusion décadence(!) ou ruine(?) C’est le signe d’une société assez mûre et sûre de ses valeurs pour être intégrer chacun-e. Vive la Suisse, vive la diversité qui est sa définition🌈🇨🇭 https://t.co/gZDDnh1iT2
— Damien Cottier (@CottierDamien) July 29, 2023
Toutefois, le Neuchâtelois aura peut-être déçu certains partisans les plus avancés de la cause progressiste, car quelques heures plus tard, il ajoute tout de même «s'opposer au mouvement "woke"».
Précisons après qq commentaires (parfois «courageusement» anonymes…) Le drapeau 🏳️🌈 n’est pas symbole du mouvement «woke», auquel je m’oppose, mais de l’égalité des droits des personnes LGBT. Ne mélangeons pas tout et ne laissons pas les «wokistes» s’approprier les droits LGBT!
— Damien Cottier (@CottierDamien) July 30, 2023
La ville de Berne avait troqué, dès lundi dernier, les drapeaux suisse et bernois contre des étendards progressistes, à l'occasion des Eurogames, une manifestation sportive en faveur des LGBT+. Le drapeau «classique» des minorités sexuelles était alors présenté en majorité, mais on pouvait aussi trouver, dans des rues adjacentes, des bannières représentant les transgenres, non-binaires, «aromantiques-asexuels», etc.
La ville s'était même fendu d'un explicatif sur son site. Quelques heures plus tard déjà, elle avait pourtant fermé les commentaires. Les Jeunes UDC avaient réagi dès mercredi dans un premier tweet:
L'affaire pourrait ne pas s'arrêter là. Le message des jeunes conservateurs tombe-t-il sous le coup de la loi? Selon 20 Minutes, les Jeunes Verts'libéraux ont à leur tour réagi, faisant brandir le spectre d'une poursuite judiciaire envers les Jeunes UDC pour ce message.
Le coup d'éclat des JUDC pour voler la vedette de la Pride bernoise n'aura pas passé inaperçu. Une chose est sûre: à l'approche des fédérales, les fronts se durcissent sur les internets suisses.