Comme beaucoup de ses compatriotes, une Ukrainienne a fui vers la Suisse avec ses deux fils de quatre et neuf ans peu après le début de la guerre. Depuis début mars, elle vit dans la famille d'Elias Meier, à Oberkirch, dans le canton de Lucerne. Cette femme, qui possède deux diplômes universitaires en économie et en psychologie, a rapidement trouvé un emploi dans une entreprise pharmaceutique à... Bâle.
Il lui faut donc environ 1h50 pour faire le trajet porte-à-porte, ce qui lui coûte près de 4h par jour à faire la navette. Elle quitte la maison tôt le matin, rentre tard le soir et a peu de temps à consacrer aux enfants. Elle peut heureusement compter sur ses grands-parents qui vivent également en Suisse. Cette situation lui pèse énormément. C'est pourquoi elle a déposé en août une demande de changement de canton pour élire domicile à Bâle.
Les personnes qui bénéficient du statut de protection S, les personnes admises à titre provisoire et les demandeurs d'asile ne peuvent pas choisir librement leur canton de résidence. Ils sont attribués aux cantons selon une clé de répartition. Un changement nécessite l'accord du canton de résidence actuel et futur. Bâle-Ville s'y est opposé dans le cas de la mère bien qu'elle présente une perspective d'emploi à long terme dans l'entreprise pharmaceutique. Elias Meier a publié son histoire sur Twitter.
Suite à un article de CH Media, la conseillère nationale bâloise Sibel Arslan (Verts) et son collègue Mustafa Atici (PS) ont exprimé dans Blick leur incompréhension face à l'attitude de leur canton. Mustafa Atici a eu plusieurs entretiens avec les autorités compétentes. Sibel Arslan est également intervenue. Le parlementaire cantonal bâlois Nicolas Goepfert, de la gauche radicale, a adressé une question à son exécutif sur le thème du changement de canton.
Le gouvernement n'a pas encore formulé sa réponse. Mais la mère pourra quitter le canton de Lucerne pour s'installer dans le canton de Bâle-Ville. Elle cherche d'ailleurs actuellement un logement avec le soutien de son employeur. Cette Ukrainienne n'aura donc plus à subir le stress des trajets quotidiens.
Dans une lettre adressée au Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM), la mère avait motivé son changement de canton. Il faut savoir que, formellement, c'est le SEM qui a le dernier mot sur les changements de canton. Les cantons donnent un préavis sur les demandes. L'intervention de la mère a porté ses fruits. Bâle-Ville a finalement cédé et le SEM a approuvé son déménagement à Bâle.
Dans certaines circonstances, les personnes avec un statut de protection ont le droit de déménager dans le canton de leur choix. Par exemple si leur conjoint ou leurs enfants y vivent déjà. Les requérants peuvent invoquer d'autres raisons, comme le lieu de formation ou de travail. L'accord est toutefois laissé à l'appréciation des cantons. Un trajet trop long pour se rendre sur son lieu de travail est un motif de changement de canton. Les autorités se basent sur la loi sur le chômage, selon laquelle un trajet aller-retour de deux heures est raisonnablement exigible.
Comment les autorités bâloises ont-elles changé d'avis dans le cas de la mère ukrainienne? Le Département de la justice et de la sécurité ne s'exprime pas sur ce cas particulier. L'évaluation des changements de canton se base sur les critères prescrits par la Confédération et sur les informations disponibles du requérant, explique un porte-parole. Il souligne que Bâle-Ville a accueilli plus de personnes avec le statut de protection S que prévu par la clé de répartition de la Confédération. (aargauerzeitung.ch)