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Critique de Challengers: le film sexy que j'aurais adoré aimer

«Challengers» est un triangle amoureux toxique qui prend place sur un court de tennis.
Je vous laisse deviner comment cette scène va se terminer.mgm

«Challengers», l'histoire de cul que j'aurais adoré aimer

Luca Guadagnino, le réalisateur de Call Me by Your Name, met en scène l'actrice Zendaya dans un triangle amoureux qui prend place sur un court de tennis.
25.04.2024, 07:4225.04.2024, 07:42
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La dernière fois que nous avons vu un film sur le tennis, c'était avec Le portrait de Richard Williams en 2021. Un biopic sur le père des championnes Venus et Serena qui narrait au passage l’ascension d'athlètes afro-américaines dans un sport majoritairement blanc. Ce rôle avait permis à Will Smith de décrocher l’Oscar du meilleur acteur (et de frapper la mâchoire de Chris Rock avec une gifle à jamais mémorable). Pourtant, c'est plutôt du côté de Match Point (2005) de Woody Allen et son thriller sulfureux sur fond de jeu balle qu'il va falloir se tourner, car Challengers est autant un film sur le tennis qu'un film sur la cupidité, le désir, l'arrogance et la manipulation.

L'histoire prend place sur un court de tennis de la banlieue new-yorkaise durant un trophée de l'ATP Challenger Tour. Une compétition généreuse en gains et en points ATP qui permet généralement aux vainqueurs de se classer pour les prestigieux tournois du Grand Chelem tel que l'US Open ou Wimbledon. De chaque côté du filet, il y a Art Donaldson (Mike Faist vu dans West Side Story) et Patrick Zweig (Josh O'Connor, le Charles jeune de The Crown). Deux anciens et inséparables amis, alors étudiants, dont l'amitié s'est brisée une décennie plus tôt, lorsque l'ancien prodige du tennis Tashi Donaldson (Zendaya) s'est immiscé dans leur vie. Au centre de l'histoire et du terrain, elle est la femme qui les observe depuis la tribune.

Zendaya, l'incontournable star de Dune, incarne une jeune espoir obsédée par son sport et dont la trajectoire s'est arrêtée le jour où son genou l'a lâchée. D'abord en couple avec Patrick dont l'ambition n'allait pas plus haut que le filet, elle vit désormais son obsession au travers d’Art dont elle partage la vie et manage sa carrière aujourd'hui déclinante.

Si Art est un champion fortuné qui a gagné le cœur de son amour de jeunesse, Patrick est quant à lui un joueur qui végète dans des tournois de seconde zone, mais qui s'avère être un adversaire redoutable puisque celui-ci connait le jeu de son ancien ami par cœur. Cette rencontre entre les deux anciens rivaux va tout chambouler, et les origines de ce triangle amoureux toxique nous sera révélé à coups de flash-back entre deux revers jusqu’aux instants clés où les couples se sont faits et défaits.

La bande-annonce:

Vidéo: watson

Raquettes et bistouquettes

Le film de Luca Guadagnino est bien loin des poncifs hollywoodiens et des films de sports. Si vous espériez voir un film centré sur le tennis, vous risquez de rester sur votre faim. Le sport de notre Roger Federer national n'est ici qu'une toile de fond. Les raquettes ne sont que des épées contemporaines pour régler un duel chevaleresque entre deux prétendants qui aspirent à laver leur honneur en gagnant le cœur d'une damoiselle qui n'accepte pas les losers.

«Pour moi, il était donc important de ne pas raconter l'histoire de deux hommes qui cherchent à conquérir la même femme. Il s'agit de trois personnes qui se rencontrent chimiquement et qui ne peuvent plus être séparées»
Luca Guadagnino

Le cinéaste sicilien s'est révélé il y a une dizaine d’années avec A Bigger Splash (2015), le remake du classique La Piscine (1969) de Jacques Deray. Mais c'est véritablement avec la romance gay Call Me By Your Name (2017) entre Elio (Timothé Chalamet) et Oliver (Armie Hammer) que le réalisateur va se faire une place. Un immense succès critique qui ne sera pas renouvelé dans ses films suivants, malgré la présence de Timothé Chalamet dans Bones & All (2022), un road-movie horrifique passé inaperçu.

Le cinéma de Guadagnino est imprégné d'érotisme et d'une aura queer. Celui-ci filme ses personnages masculins en les sublimant. Tout est sensuel, tactile et toujours dans la suggestion. Les plaisirs de la chair se camouflent souvent par de métaphores visuelles, notamment au travers de la nourriture. Dans Challengers, on ne comptera plus les scènes de peaux suintaintes et de nourriture phallique ingérée. Malgré l'orientation hétérosexuelle des personnages, une romance crypto-gay semble hanter les deux hommes.

«Mais qu'est-ce qui nous arrive?»
«Mais qu'est-ce qui nous arrive?»Image: MGM

Cette tension sexuelle est renforcée par d’incroyables scènes de tennis dont la mise en scène sublime ce sport comme rarement vu auparavant, à tel point qu'on a l'impression d'assister deux heures durant à une publicité pour Nike ou Lacoste. La caméra virevolte, les angles sont choisis avec une audace et une créativité toujours plus grande, allant de pair avec l'intensité du match. Une montée en puissance qui attendra son climax à la balle de match avec une séquence finale à couper le souffle, bien qu'interminable. Un choix de mise en scène où rien n'est laissé au hasard, comme l'explique le réalisateur:

«Lorsque vous assistez à un match de tennis, que ce soit en direct ou à la télévision, c’est une expérience très objective. J'ai pensé à la rendre très subjective. J’ai immédiatement pensé à pouvoir être à l'intérieur du jeu, mais aussi à l’intérieur du jeu avec ces personnages»
Luca Guadagnino

Zendaya retrouve depuis Euphoria un rôle à contre-emploi et à la hauteur de son talent. En objet de désir conscient de son pouvoir, elle est le centre d'un triptyque où deux personnalités qui s'opposent font face: Art en champion riche et valeureux et Patrick, joueur à la sauvette qui arrive toujours à ses fins. Deux revers d'une même pièce manipulée de la main du personnage de Tashi. D'ailleurs, on ne sait pas trop si elle tire les ficelles ou tient la chandelle de ce duel homoérotique. Ce trio d'acteurs est terriblement crédible raquette en main, aidé bien évidemment par des doublures et des effets spéciaux indétectables qui font illusion. Malheureusement, l'écriture pêche sur le développement de ces personnages qu'il est impossible d'aimer tant ils sont soit lisses soit détestables.

A noter également la bande originale de Trent Reznor et Atticus Ross, oscarisés pour The Social Network et Soul de Pixar, aux antipodes des musiques symphoniques hollywoodiennes. La BO de Challengers est électronique, dansante et apporte une énergie au métrage qui pourrait donner de l'urticaire à tous les allergiques de la mise en scène façon clip musical.

La BO, plutôt cool:

La balle en mousse

J'aurais adoré aimer Challengers. Malgré sa mise en scène audacieuse, sa musique qui pourrait accompagner chacune de mes séances de fitness et son casting sexy qui pourrait me faire céder à la bisexualité, Challengers est un film si ringard sur le fond qu'il le devient également sur la forme.

Zendaya, jouant à merveille l'expression dites du «seum».
Zendaya, jouant à merveille l'expression dite du «seum».Image: MGM

Il y a quelque chose de terriblement agaçant dans le fait de suivre des personnages qui placent la performance et l’attirance au même niveau, tout ça pour raconter une histoire dont les enjeux ne sont objectivement pas si dramatiques.

Le trophée de la tête à claques revient notamment au personnage Zendaya, en épouse et coach castratrice qui aime le tennis plus que son mari et dont la défaite face à son ancien meilleur ami serait un motif de rupture. Ce qui ne l'empêche évidemment pas de mouiller sa culotte lorsqu'elle retrouve son ex, pour la simple raison qu'il ne se laisse pas dominer par elle, contrairement à son mari si lisse et romantique. Des schémas qui auraient pu paraître sulfureux à une époque où le sexe était au centre de tout, mais qui aujourd'hui paraissent risibles.

Avec sa mise en scène criarde et ses sonorités électros, Luca Guadagnino s'amuse à érotiser le moindre élément du tennis, à tel point qu'on a l'impression d'assister à un porno soft. De vous à moi, deux heures de porno, c'est quand même très long.

Challengers de Luca Guadagnino est sorti sur les écrans le 24 avril 2024. Durée: 2h 12m

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