Bienveillance, chapeau beaucoup trop grand, rap émotif, «jean en bouillabaisse», du rose Cajoline partout, aucun doute, nous voilà dans l'univers du styliste provençal Jacquemus. «Injuste!», diront les modeux, tant le poulain le plus talentueux de la fringue française est un être humble et délicieux. Hélas, c'est le jeu. Enfin, celui de l'humoriste Malik Bentalha, qui vient d'armer sa nouvelle parodie, à l'occasion de la Fashion Week.
Après avoir taillé le costard du populisme chez Pascal Praud et de la pâtisserie hors de prix chez Cédric Grolet, l'humoriste français nous présente Moustapha Jacquemard dit «Jacques-Mouss».
Nous sommes «à deux jours» du défilé de ce «prodige» qui fête les quinze ans de sa griffe et, logique, rien n'est maîtrisé.
Gestes délicats, sourires appuyés, inclusion vestimentaire allant jusqu'à mettre «le bas des hommes sur le haut des femmes», petit snif inspiré dans un pot-pourri du Sud de la France, franchement, de loin, notre Jacques-Mouss est un exemple d'intelligence émotionnelle. L'envers du décor est (forcément) plus sombre. Les mannequins sont payées avec «les huiles d'olive de sa mère» et forcées de se déplacer à vélo, le créateur confond une «Chinoise qui parle français» avec une Coréenne qui ne comprend rien et la tension est à son comble.
Comme l'original, Jacques-Mouss a grandi non loin de Marseille. Pas comme l'original, il n'a rien gardé de cette époque, mais fait admirablement semblant, sans y croire une seconde: «Le pastaga oh dis-donc, la pétanque tout ça».
Bien sûr, tout le gratin sera présent à ce premier défilé en ses terres, la Provence, dont «Christophe and the Queens». Pas mal de rappeurs aussi, mais «ils seront placés au fond. Très au fond. Même pas dans le défilé, ce sera une annexe, un chapiteau, ils feront des photos entre rappeurs et nous ça nous permettra de toucher un public urbain».
En gros, tout y est. Même les lourds clichés sur le monde de la mode, les jolis rappels à la pop culture et cette séquence culte de l'émission Quotidien, avec un automobiliste drôle et fâché, lors d'une précédente Fashion Week.
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Puis vient sa «chouchoute, Alexandra» (qui s'appelle en réalité Amélie). Cette mannequin est «ukrainienne, elle a vécu la guerre et ça, ça a été atroce pour elle. Hein, t'as vécu la guerre?».
La Suisse, ce beau et ronflant pays où il ne se passe tellement rien qu'on peut y faire atterrir une fausse Ukrainienne qui aurait vécu une fausse guerre.
Comme à son habitude, Malik Bentalha excelle dans le langage, les petits riens, les dérapages syllabiques et les moments où tout semble dérisoire et farouchement improvisé. En fin de sketch, l'équipe de tournage se rendra au domicile des parents de Moustapha Jacquemard: une mère aimante et un père qui ne comprend pas les choix de son fils.
Certains tiqueront probablement sur une blague à propos du «mégenrage» de son bras droit, par le (faux) preneur de son de Konbini, qui n'a pas compris instinctivement que ce bras droit s'identifiait à «une flaque de couleur, parme», puis à une «ramette de papier A4».
Comme à son habitude aussi, Malik Bentalha est furieusement synchro avec l'actualité et fait un véritable carton. Sa parodie de près de treize minutes accumulera plus de 500 000 curieux, en seulement quelques heures. Pas mal pour cette ambiance doucement vintage, époque Palmashow et, soyons fous, des Inconnus.