Plonger est la devise de Hanneke Faber. Plonger dans le monde des claviers d'ordinateur, des souris et des webcams, qu'elle ne connaissait jusqu'à présent que comme consommatrice. A 54 ans, elle s'y connaît un peu en matière de saut dans l'inconnu.
Et maintenant, le saut dans l'étang de Logitech, où les vagues se déchaînent actuellement. La manager d'Unilever prendra le poste de CEO en décembre, comme l'annonce le groupe suisse romand.
Elle succède ainsi à l'Américain Bracken Darrell qui, en juin, après onze années marquantes et majoritairement couronnées de succès, a quitté ses fonctions à la surprise générale et avec effet immédiat pour rejoindre le groupe de mode VF Corporation. Le cours de l'action s'est alors effondré.
Au sein du groupe anglo-néerlandais de biens de consommation Unilever, Hanneke Faber porte, depuis 2022, le titre de Business Group President, Nutrition. Elle est ainsi responsable des activités de plus de 200 usines et d'un chiffre d'affaires de 12 milliards d'euros dans plus de 150 pays.
Et – fait intéressant du point de vue suisse – la quinquagénaire est également à la tête de la marque Knorr, qui a ses origines dans notre pays. Cette dernière entretient toujours une grande production à Thayngen (Schaffhouse) et fait de la publicité en Suisse depuis des décennies avec la mascotte Knorrli.
Outre les soupes et les épices Knorr, l'unité commerciale de Hanneke Faber vend également du beurre de cacahuètes, de la mayonnaise et de la sauce soja.
La question est maintenant de savoir si Faber trouvera la recette pour remettre Logitech sur la voie du succès et apaiser la colère du cofondateur de l'entreprise, Daniel Borel. Celui-ci a déclenché une bataille au cours des derniers mois, comme l'écrit Bilanz. Dans son collimateur, la présidente de Logitech Wendy Becker.
Pour Daniel Borel, 73 ans, il est clair que Wendy Becker n'a pas été à la hauteur de sa tâche. Sous la direction de Bracken Darrell, l'entreprise aurait cru trop longtemps que le boom du chiffre d'affaires des années Covid se poursuivrait et que la clientèle continuerait d'équiper électroniquement son bureau à domicile.
Ainsi, pendant la pandémie, le chiffre d'affaires a grimpé de 3 à 5,5 milliards de dollars et la valeur boursière a quadruplé de 5 à 20 milliards de dollars. Mais les huit derniers trimestres se résument en un mot: baisse du chiffre d'affaires.
La présidente a réagi trop tard, selon Daniel Borel, qui possède encore 1,5% des actions. Au lieu d'une réduction rigoureuse des coûts, seules des économies sporadiques ont été réalisées dans certains domaines. La suppression de 300 postes au printemps dernier n'a pas non plus apaisé Borel.
En effet, les prévisions de croissance ont dû être corrigées plus d'une fois par rapport aux analystes. De plus, la présidente de Logitech n'était pas assez préparée au départ de Bracken Darrell. La recherche d'un successeur s'est déroulée beaucoup trop lentement.
Le Romand, qui s'est entre autres consacré à sa passion pour la voile après avoir quitté l'entreprise, a tout de même pu parler personnellement quatre fois à Wendy Becker et lui faire part de ses soucis. Mais cela n'a guère aidé non plus. «Un robot aurait plus d'émotions», dit Daniel Borel, chez qui on voit littéralement, selon Bilanz, sa tension artérielle augmenter de plusieurs hectopascals lorsqu'il s'agit de Wendy Becker.
Selon le magazine, sa campagne n'a pas été menée de manière très professionnelle. Ainsi, lors de la dernière assemblée générale, il n'a pris la parole que lorsque Wendy Becker avait déjà été réélue avec 96% des voix. Et ses options pour une révolte réussie sont considérées comme limitées, car les dix plus gros actionnaires après Logitech, y compris Borel, ne détiennent que 27,3% des actions.
«Logitech est paralysée, les gens attendent que quelqu'un prenne des décisions», rapporte le magazine économique en citant un responsable de l'entreprise. Les postes importants ne sont pas pourvus et les adaptations organisationnelles ne sont pas effectuées. De plus, le groupe, dont les sièges sont à Lausanne et dans la Silicon Valley, serait assis sur près de 1,2 milliard de dollars de liquidités.
Compte tenu de la faiblesse de l'évaluation de certaines entreprises tech, ce serait le bon moment pour des acquisitions. Mais actuellement, personne ne prend de décisions d'investissement stratégiques. Les conséquences de cette impasse ne se font pas sentir à court terme, dit Daniel Borel, mais il ajoute:
C'est donc maintenant à Hanneke Faber d'assurer cet avenir. On verra dans quelle mesure elle parviendra à résoudre le conflit entre la légende de Logitech, Daniel Borel, et la présidente du conseil d'administration, Wendy Becker.
Et face au personnel et aux analystes, elle devra rapidement prouver que le changement de branche est facile pour elle, comme ce fut le cas pour Bracken Darrell, qui travaillait auparavant pour Procter & Gamble, Braun et Whirlpool.
Jusqu'à présent, la carrière de Hanneke Faber a été étroitement liée au commerce de détail. Elle a travaillé pendant 21 ans pour le géant américain des biens de consommation Procter & Gamble, notamment au siège européen à Genève. Elle a ensuite occupé des fonctions au sein de la chaîne de supermarchés néerlandaise Ahold Delhaize. Depuis six ans, elle travaille chez Unilever.
En 2021, le célèbre magazine Fortune l'a classée 23e dans la liste des femmes d'affaires internationales les plus influentes. Elle siège également au conseil d'administration du groupe américain de mode de luxe Tapestry.
Andreas Müller, analyste de la ZKB, considère Hanneke Faber comme un bon choix et un signe important après des mois marqués par une baisse des ventes et un vide de pouvoir au sommet:
Après l'annonce de la nomination de Hanneke Faber, le cours de l'action Logitech a augmenté de près de 2% mardi. Elle dirigera le groupe depuis la Suisse dans un premier temps, puis s'installera en Californie l'année prochaine. (aargauerzeitung.ch)
Traduit et adapté par Noëline Flippe