Le 28 février, le Conseil fédéral a décidé de reprendre les sanctions prononcées par l'Union Européenne (UE) contre la Russie en réaction à l'invasion de l'Ukraine. Le gel d'avoirs, l'interdiction d'octroi de prêts, l'obligation de refuser des dépôts de plus de 100 000 francs figurent notamment dans le catalogue des mesures frappant les personnes morales ou physiques ayant un lien avec les autorités russes, selon le site du Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco).
Visiblement soucieuses d'éviter tout risque réputationnel causé par la guerre en Ukraine, certaines banques semblent avoir opté pour un excès de prudence, selon les informations recueillies par AWP.
Guy Mettan, président de la Chambre de commerce Suisse-Russie & CEI, dont les activités en lien avec la Russie ont été suspendues le 3 mars, confie:
Le député genevois évoque également une société d'investissement «destinée au financement de jeunes pousses locales» portée par un ressortissant russe et se trouvant en «phase finale d'acceptation», ou encore celui d'un citoyen russe installé en Suisse depuis plus de dix ans, dont les relations bancaires ont été gelées, alors que ces personnes «ne sont bien entendu pas visées par des sanctions».
Contactée par AWP, la banque aux trois clés a rappelé avoir renoncé à la réalisation de nouvelles affaires avec des résidents russes, tout en prêtant main-forte à ses «autres clients russes» pour réduire le risque de leur portefeuille. L'établissement assure travailler «avec soin et application afin de se conformer à toutes les exigences requises, en particulier les sanctions, et afin de faire face à leurs conséquences potentielles».
L'Association suisse des banquiers (ASB) reste sur la réserve, se limitant à rappeler que le secteur respecte «les lois et les réglementations en vigueur» et indique appliquer:
La faîtière n'a pas adressé de recommandations particulières à ses membres et n'est pas en mesure de fournir des commentaires sur l'évolution des relations d'affaires des banques suisses avec les clients russes depuis début mars.
Plusieurs témoignages recueillis sous couvert d'anonymat par AWP auprès de la communauté russe domiciliée en Suisse font également état de comptes bloqués et d'avoirs temporairement inaccessibles, sans la moindre information préalable. Les personnes concernées ont dû prendre contact avec leurs établissements bancaires – en l'occurrence Postfinance et Banque Migros – qui leur ont demandé de prouver leur résidence en Suisse.
Banque systémique au même titre qu'UBS, Postfinance résilie toutes les relations avec des clients se trouvant sur territoire russe pour «des raisons de politique commerciale». Le bras financier de la Poste précise:
Banque Migros assure appliquer intégralement les sanctions liées à la guerre en Ukraine. «La nature et l'étendue des mesures correspondantes découlent des dispositions en la matière», note la filiale bancaire du géant orange. Détail piquant, une cliente qui a vu son compte bloqué de façon préventive par l'établissement, détentrice d'un passeport russe, héberge elle-même trois réfugiés.
Une autre cliente rapporte la suspension d'un compte pendant environ 24 heures, apparemment en raison de la nationalité biélorusse de son mari. Selon elle, c'est la seconde citoyenneté suisse «qui nous a sauvés».
Pour sa part, la Fédération romande des consommateurs (FRC) indique ne pas avoir pris position sur «la garantie de services concernant les clients russes», rappelant que ses membres bénéficient d'une protection juridique et de conseils.