
Trump a un atout dans sa mèche.image: shutterstock
Analyse
Les républicains ont obtenu de justesse et tardivement la majorité à la Chambre des représentants. La vendetta de Donald Trump, qui veut faire tomber Joe Biden, est désormais lancée.
Bastian Brauns, Washington, D.C. / t-online
Jusqu'au bout, les démocrates ont espéré. Lors des élections de mi-mandat, ils voulaient non seulement défendre leur majorité au Sénat, mais aussi à la Chambre des représentants. C'est désormais une certitude: les républicains obtiennent tardivement, et de justesse, la majorité dans cette chambre du Congrès américain. Après les premières réjouissances, c'est une véritable désillusion pour le parti de Joe Biden.
Si les vainqueurs au Parlement étaient les républicains d'autrefois, le résultat ne serait que le cours démocratique des choses. Biden aurait plus de mal qu'auparavant à faire passer ses lois et devrait, si nécessaire, gouverner par décrets présidentiels.
Malgré les critiques croissantes à l'encontre de Donald Trump, il s'agirait toutefois d'un «nouveau Grand Old Party» (ndlr: Parti républicain). Pour ses représentants, il ne suffit pas de bloquer Joe Biden: il faut éliminer l'adversité politique. Depuis longtemps, ils ne se focalisent plus sur un changement du système politique existant. Sans le cacher, une grande partie des républicains et de ses parlementaires aspirent à une version autoritaire des Etats-Unis.
Rien ne reflète mieux cette attitude que leur propagande de fraude électorale. Donald Trump, c'est certain, fera tout pour exercer son influence sur les parlementaires qui lui sont dévoués. La Chambre des représentants compte plus de 180 élus qui ont exprimé des doutes quant à la légitimité de l'élection de Joe Biden. Malgré les défaites de nombreux candidats de Trump, il s'agit là d'un événement unique et historique.
Leurs propositions de loi porteront sa signature, même s'il se trouve à Mar-a-Lago en Floride. Cela aura des conséquences pour le monde entier, y compris pour l'Allemagne. Avec la candidature de Trump, les Etats-Unis vont plus que jamais auparavant se concentrer sur eux-mêmes, afin que la démocratie ne leur explose pas à la figure. Le gouvernement Biden, qui s'efforce de mener une politique étrangère, en ressentira également les effets.
Des projets farfelus
Comme disent les Américains, un véritable «shitshow» va se dérouler à Washington. Une bataille de boue sans précédent au sein de la haute assemblée. Ce serait un désastre pour la démocratie. Grâce à leur pouvoir retrouvé à la Chambre des représentants, Trump et ses acolytes peuvent désormais marquer l'agenda politique et également le discours public. Certes, la majorité est très faible, mais elle est suffisante pour définir les thèmes.
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Tant de promesses ont été faites à la base radicale du parti pendant la campagne électorale que même une fraction de celles-ci suffirait à bloquer le système. Trump a besoin du soutien de sa base électorale déçue dans la campagne électorale interne du parti, en vue de sa lutte pour la Maison Blanche.
Voici ce qui peut se passer:
- Pour se venger de la procédure de destitution engagée à son encontre, Trump et ses partisans parlementaires pourraient s'atteler à la mise en place d'un tel impeachment contre Joe Biden. Pour quel motif? Peu importe. Les raisons seraient sans doute absurdes: conspiration avec la Chine, trahison du peuple, inflation. La liste des accusations répandues est longue. La vice-présidente Kamala Harris et le ministre de la Justice Merrick Garland pourraient également être visés. De tels projets risquent certes d'échouer au Sénat, mais le Parlement s'en occupera d'abord. Les médias en parleront. L'ex-stratège de Trump Steve Bannon qualifie cette démarche de «flooding the zone with shit» (inonder la zone de merde).
- Le fils de Joe Biden, Hunter Biden, ne sera pas épargné par les républicains. L'affaire autour de son ordinateur, ses prétendues affaires sales en Ukraine, avec la Chine et la consommation de drogue – le programme des chaînes de télévision de la droite conservatrice en est truffé. La stratégie: si rien ne peut être prouvé contre Joe Biden, il faut le faire tomber en attaquant son fils.
- Ce pourrait être l'un des premiers actes de Kevin McCarthy, le potentiel futur président de la Chambre des représentants: annuler la commission d'enquête convoquée par les démocrates sur la prise du Capitole le 6 janvier 2021. Trump doit y témoigner, mais risque de ne pas s'y présenter. Si la commission est annulée en janvier 2023, l'ex-président américain sera au moins hors de cette ligne de mire politique.
- A la Chambre des représentants, les républicains ont désormais la mainmise sur le budget de l'Etat. La pression de l'extrême droite est forte en ce qui concerne le soutien financier, économique et militaire à l'Ukraine. «Pas un penny de plus» a déclaré à ce sujet Marjorie Taylor Greene avant les élections. Ce projet pourrait lui aussi échouer, mais suscite tout de même des inquiétudes: au sein du parti républicain, aux Etats-Unis et dans toute l'Europe. Pour en savoir plus, cliquez ici.
- Soutenue par une Cour suprême composée de juges conservateurs, la plus haute juridiction des États-Unis, la législation des États républicains pourrait encore aggraver la situation des femmes, des migrants et des minorités: lois électorales discriminatoires, lois sur l'avortement et lois anti-LGBTQIA+.
- Stimulés par la nouvelle candidature de Trump et ses agitateurs au sein du Parlement, des groupes d'extrême droite comme les Proud Boys et les Oathkeepers pourraient se sentir plus motivés que jamais. Ces néofascistes répandent déjà la peur, la terreur et la violence dans le pays. S'adressant à ces groupes, Trump a dit un jour: «Stand back and stand by!», c'est-à-dire: «Restez en retrait, mais tenez-vous prêts.»
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Scénarios d'horreur
Cela ressemble aux pires scénarios d'horreur. Mais peut-être que les républicains ne sont pas en train de détruire la démocratie, mais plutôt de se détruire eux-mêmes. Les extrêmes au sein du groupe ne pourraient pas être plus opposés. Le résultat des élections de mi-mandat peut sembler salutaire pour la démocratie. Le profond fossé au sein de la société est toutefois loin d'être comblé.
Au contraire, lors de son discours de candidature, Donald Trump n'a laissé planer aucun doute sur sa volonté de creuser de nouveaux fossés. C'est uniquement parce que le peuple américain ne souffre pas encore assez que le résultat des élections de mi-mandat n'a pas été très bon, a-t-il déclaré. Les citoyens ne le comprendraient tout simplement pas encore. «Ils ne le sentent pas encore vraiment. Mais cela changera très bientôt», a déclaré Trump.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder
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Video: watson
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