C’était sous nos yeux et nous n’avons pas voulu voir. Et si cette petite musique, donnée sur les plateaux-télé depuis jeudi matin à la suite de l'entrée des troupes russes en Ukraine, sonnait juste? En Europe, en Suisse, ces derniers jours encore, ne s’est-on pas gaussés de l’alarmisme américain face aux graves menaces que faisait peser Vladimir Poutine sur son voisin ukrainien? Lorsque le président russe a fait mine de retirer ses troupes amassées à la frontière ukrainienne, nous avons voulu croire que la paix était sauvée. Il n’en était rien.
L’invasion déclenchée dans la nuit de mercredi à jeudi était programmée, mais était-elle écrite? En tout cas, Poutine, ex-officier du KGB, qui a vécu comme une humiliation la chute de l’URSS en 1991, n’a jamais caché ses vues sur l'Ukraine. Pour les nationalistes russes, elles est le berceau de la Sainte Russie. En 2008, Vladimir Poutine affirmait l’unité de la Russie et de l’Ukraine au regard de l’Histoire. Il enrageait à l’époque contre l’attirance de l’Ukraine pour l’Occident.
Mais surtout, note un diplomate occidental sous couvert d’anonymat et joint par watson, nous n'aurions pas voulu prendre en compte des signes selon lui «très clairs» et annonciateurs des événements en cours:
En quoi est-ce un moment favorable?
Le président russe aurait-il réfléchi à deux fois avant de lancer son offensive contre l’Ukraine si Donald Trump était toujours à la tête des Etats-Unis? Alors que l’invasion était imminente, l’ex-président américain, tout en louant le sens tactique du chef de l’Etat russe, a assuré dans un podcast qu’avec lui au pouvoir, «cela ne serait jamais arrivé».
«C’est en effet une question qu’on peut se poser», reprend ce diplomate occidental. «Trump est un être imprévisible. Poutine, même couvert d’éloges par Trump, n’aurait peut-être pas agi de la sorte si celui-ci était encore au pouvoir à Washington.»
Et d'ajouter:
Il y aurait donc eu des signes et nous n’y aurions pas été attentifs. Ces signes n’étaient pas seulement le fait de l’adversaire, la Russie. Ils clignotaient, côté occidental, telles des balises dans les mers froides de l’Europe du Nord. Qu’ont décidé, ces dernières années, les Scandinaves (Suède, Norvège, Finlande) sentant la montée des périls avec Moscou? Tous ont décidé d’augmenter leurs dépenses militaires.
Les Suédois, jusqu’à 40%, d’ici à 2025. En 2017, les mêmes, après l’avoir abolie en 2010, ont pris la décision de rétablir la conscription, autrement dit le service militaire obligatoire, par le truchement d’une sélection annuelle. «La Suède replonge dans l'ambiance de la guerre froide», ne croyait pas si bien dire le site Franceinfo, qui relayait la nouvelle cette année-là.
En Suisse, les événements d'Ukraine devraient réveiller, comme ailleurs, des souvenirs de guerre froide.