Au début de l'année, le Parlement d'Erevan, la capitale arménienne, a adopté en deuxième et dernière lecture un projet de loi visant à ouvrir la voie à une éventuelle adhésion du pays à l'Union européenne (UE). Des années auparavant, le premier ministre arménien avait déjà déclaré, dans un discours devant le Parlement européen, que son pays était «prêt à rejoindre l'UE et à s'adapter autant que possible, aussi loin que l'UE le jugera possible».
La république du Caucase, qui a fait partie de l'Union soviétique jusqu'en 1991, est restée étroitement alliée à la Fédération de Russie qui l'a suivie. Mais lorsque l'Arménie a été attaquée par l'Azerbaïdjan en 2023, dans le cadre d'une nouvelle flambée du conflit du Haut-Karabakh, elle n'a pas pu compter sur le soutien militaire de Moscou. Depuis, le pays s'oriente de plus en plus vers l'Ouest.
Le ministre des Affaires étrangères, Ararat Mirzoyan, a loué le rôle de l'UE, et déclaré qu'elle avait prouvé qu'elle s'engageait pour les intérêts de sécurité et la stabilité de l'Arménie.
Cette dynamique politique a été soutenue par une initiative citoyenne, qui a recueilli plus de 50 000 signatures, soit suffisamment pour déposer une proposition de loi conforme à la Constitution. Le large soutien, dans ce pays d'à peine 3 millions d'habitants, qui montre que ses citoyens voient de l'avenir dans le rapprochement avec l'Europe. Le gouvernement n'a pas rejeté le projet, mais a souligné qu'une mesure d'une telle portée devait être définitivement décidée par le peuple lors d'un référendum.
La prochaine étape serait maintenant d'entamer un dialogue officiel avec l'UE afin d'élaborer une feuille de route pour l'adhésion. Pour cela, le gouvernement arménien devrait engager de vastes réformes de politique intérieure, par exemple pour renforcer l'Etat de droit, les droits de l'homme et les institutions démocratiques.
Si de nombreux experts estiment qu'un élargissement de l'UE dans un avenir proche est peu probable, l'Arménie signale néanmoins par ces mesures qu'elle se détourne clairement de la Russie. Avec l'éclatement de la guerre en Ukraine, l'UE a de nouveau tourné son regard vers l'Est, afin de contrebalancer l'influence russe.
La Russie reste cependant un partenaire économique central pour l'Arménie. Elle lui fournit la majeure partie de son gaz naturel, gère des parties importantes de l'infrastructure et est le principal pays de destination de nombreux travailleurs migrants arméniens, qui envoient des fonds dans leur pays d'origine. De plus, l'Arménie est membre de l'Union économique eurasienne, dominée par la Russie, ce qui renforce encore les liens économiques.
Avec le processus d'européanisation croissant de l'Arménie, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déjà fait comprendre sans équivoque qu'une double adhésion à l'Union économique eurasienne et à l'UE n'était pas acceptable pour la Russie.
Reste à savoir si l'Arménie parviendra à maintenir à long terme cet équilibre entre Est et Ouest. Une chose est toutefois claire, si l'UE veut soutenir l'Arménie dans cette voie, elle doit considérablement élargir son engagement dans la région du Caucase.
Bruxelles a déjà donné un signal dans cette direction: dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune, l'UE a envoyé la mission civile d'observation Euma en Arménie. L'objectif de la mission est d'instaurer la confiance sur place et de contribuer à la normalisation des relations tendues entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.
Traduit de l'allemand par Joel Espi