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Charlie Hebdo: 10 ans après, il reste la peur et la lâcheté

Thousands of people gather at Republique square in Paris, France, Sunday, Jan. 11, 2015. Thousands of people began filling France's iconic Republique plaza, and world leaders converged on Paris i ...
Ce 11 janvier 2015, 4 millions de Français descendirent dans la rue pour rendre hommage à Charlie Hebdo et à toutes les victimes des attentats des 7, 8 et 9 janvier, cette année-là.Image: AP
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Charlie Hebdo: luttons contre la peur et la lâcheté

La commémoration des dix ans de l'attentat contre Charlie Hebdo nous invite à nous retrouver autour d'une vision universaliste et laïque. Malheureusement, une partie de la gauche s'est perdue en cours de route, offrant un boulevard à l'extrême droite.
06.01.2025, 16:5806.01.2025, 23:49
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Depuis la parution, en 2006, dans ses colonnes, des caricatures du prophète Mahomet, en solidarité avec un journal danois menacé pour les avoir publiées précédemment, la rédaction de Charlie Hebdo se savait en danger. Charb, son rédacteur en chef, figurait même, avec Salman Rushdie, sur une liste de condamnés à mort établie par Al-Qaïda.

Mais il demeurait une forme d’insouciance au sein de l’hebdomadaire satirique, même si ses déménagements successifs, l’équipe passant de locaux ouverts sur la rue, à des adresses toujours plus confidentielles, témoignaient d’un étau se refermant sur lui. Aujourd’hui, nul ne sait où se trouve la rédaction de Charlie Hebdo. Le secret est bien gardé, et pour cause.

Ce 7 janvier 2015, le totalitarisme islamiste s’en prit à ce que nous avons de plus cher, la liberté de critiquer tous les pouvoirs, les profanes comme les religieux. Le 8, ce même totalitarisme récidiva en tuant une agente municipale. Le 9, il fit irruption dans un commerce juif. Bilan: 17 morts, 18 si l’on y ajoute Simon Fieschi, gravement blessé lors de l’attaque contre Charlie Hebdo, mort le 17 octobre dernier à 40 ans.

A un immense élan de solidarité succéda la peur. On peut même affirmer que les 4 millions de Français qui se rassemblèrent dans la rue, le 11 janvier 2015, pour témoigner leur attachement à la liberté d’expression, éprouvaient de la peur. On n’eut pas affaire ce jour-là à une démonstration de force, mais à un profond sentiment d’inquiétude.

Politiques et médias gagnés par la peur

Depuis, la peur n’a cessé de gagner la société, les politiques et les médias. Les terroristes ont en ce sens atteint leur objectif. Le soutien à Charlie Hebdo s’est craquelé comme un mur repeint trop vite. Les assassins du 7 janvier, les frères Kouachi, n’avaient-ils par voulu «venger le prophète», qui avait été «insulté»? Les caricaturistes et chroniqueurs du satirique ne l’avaient-ils pas un peu, un peu beaucoup, «cherché»?

Résultat: on n’a jamais autant entendu parler d’islamophobie que depuis les attentats des 7, 8 et 9 janvier 2015. La crainte d’être taxé d’islamophobe en raison d’une opposition à des revendications islamistes, vestimentaires notamment, a produit beaucoup de lâchetés.

Une partie de la gauche a abandonné à l’extrême droite la critique de l’islamisme, quand elle ne s’est pas alliée à lui sous ses formes politiques et sociétales. Des médias n’ont pas fait preuve de plus de courage en omettant, au fil des ans, de qualifier d’islamistes des attentats terroristes se rapportant à cette idéologie ou en détournant le regard de réalités anxiogènes.

Ne pas renoncer à son devoir

Ayant l'obsession de ne jamais se salir les mains sur ces questions par définition sensibles, certains en sont venus à faire croire, faussement, que les musulmans et les islamistes, c’est du pareil au même. En refusant de traiter l’idéologie islamiste qui se diffuse sur les réseaux sociaux, touchant une partie de la jeunesse musulmane, ils ont renoncé à leur devoir: former des citoyens libres, d’une part, informer le public sur l’état de la société, d’autre part.

La haine dont Manuel Valls fait l'objet, son opportunisme en politique n'en étant que le prétexte, renvoie à ce jour de 2015 où il avait tracé une ligne rouge entre la gauche universaliste et celle qui se compromettait, déjà, avec l'islamisme, par intérêt électoral ou par un vieux réflexe tiers-mondiste.

Un détour par l’actuelle Syrie libérée de son tyran Bachar Al-Assad, nous indique, en direct pourrait-on dire, comment l’idéologie islamiste procède pour s’imposer: par le couvrement des femmes et la réécriture de l’Histoire. En Occident, elle se sert de l’Etat de droit et des ouvertures offertes par le monde académique pour développer ses vues.

L’attentat contre Charlie Hebdo, la commémoration des dix ans de ce massacre, nous rappellent à quel point l’universalisme et la laïcité nous préservent, croyants comme incroyants, du communautarisme, qui mène à l’affrontement. «Etre Charlie», ce n’est pas approuver des dessins qu'on n'aime pas, c’est se lever contre toute entreprise totalitaire.

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