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Joe Biden n'a pas que 81 ans

L'âge de Joe Biden lui joue des tours
images: getty, montage: watson
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Joe, il est temps de te poser la question la plus difficile au monde

Joe Biden a 81 ans ce lundi 20 novembre. Il en aura surtout 82 à l’issue d’une interminable campagne présidentielle, qui s'annonce comme de véritables Hunger Games de la démocratie. Ready papy?
20.11.2023, 05:5720.11.2023, 20:47
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Non, tu ne l'es sans doute pas. Personne ne le serait à ta place. La planète est en feu, ton pays est aussi fragile qu'une couche de glace sur un étang qui n'a besoin que d'une élection pour se briser, et on se fout constamment de ta gueule.

Aujourd'hui, 20 novembre 2023, quatre-vingt-une bougies attendent ton court souffle sur l'un de ces gâteaux que tu affectionnes tant. Précieux et inestimable! Un âge qui pousse d'ordinaire les proches à ménager le héros du jour, conscients du voyage. Un âge où l'on déballe son cadeau en même temps qu'un cachet pour le cœur. Un âge où l'on ouvre un album de photos, mais de moins en moins la fenêtre, de peur d'attraper un mauvais rhume. Un âge où l'on entend plus toujours les mots d'amour qui s'échappent du brouhaha d'anniversaire.

Un âge à siestes, toux grasses et coups d'œil dans le rétro.

Sauf que tu n'es pas papy René, qui râle dans des pantoufles en attendant la grande faucheuse: le Proche-Orient et l'Ukraine sont ton potager, Donald Trump incarne à merveille ce vieux compère de PMU devenu dangereusement infréquentable et il faut dire que les Américains jouent vachement bien le rôle des voisins ne supportant plus le bruit de la tondeuse. Le défi est gargantuesque.

Tu ne dois pas simplement supporter le quartier et gâter les petits-enfants, mais sauver le monde entier et mater des tyrans.

Tu es le président de la plus grande puissance mondiale, Joe. Et sans doute le meilleur chef d’Etat occidental aujourd’hui. A l'heure ou l'on parle Troisième guerre et extinction de l'humanité. Tu n’es pas la reine d'Angleterre qu'on démoulait deux fois par année pour rassurer son peuple. Ce qui t’attend sera bien plus lourd et difficile que le mandat que tu t’apprêtes à achever.

Souviens-toi. L'année dernière, tu crevais déjà de trouille à l'idée de déflorer ta huitième décennie. Au point d'ironiser sur ce putain de chiffre rond et maudit, déguisé en pétard politique qu'on cherche encore aujourd'hui à te glisser dans le costard.

«Quoi? Mon anniversaire approche? Non, non, ce n'est pas moi, vous faites erreur»
Joe Biden, quelques semaines avant ses 80 ans, en 2022.

Tes quatre-vingt-un printemps seront disséqués, analysés, moqués. Bien sûr, on va rembobiner ta carrière, ta vie, ton couple, ta famille. Oui, encore. Politico le fera, mais les tabloïds aussi. Et puis, on parie qu'un site internet jugera tordant de compiler tes dernières chutes pour te souhaiter un bon anniversaire? Peut-être même qu'un vague connard de ton entourage profitera de l'occasion pour balancer une petite anecdote bien sale et inédite au NY Post, le fleuron populiste du vieux Murdoch.

Tout ça pour faire cliquer et tiquer.

Evidemment que le garnement MAGA prépare depuis une bonne semaine les répliques assassines qu'il t'enverra à la tronche toute la journée. Sans compter tes conseillers qui, désormais, te déconseillent tout un tas de trucs. Les escaliers, les discours, les grands mots, les grandes décisions, le gras, le sucre et les réseaux sociaux. Ce n'est jamais simple de fêter une année de plus, alors quand elle se déguise en arme politique, c'est profondément injuste.

N'est-ce pas?

Tu sais, il y a quelques mois, ta douce épouse avouait à demi-mot qu'elle te suivrait dans tous tes choix, y compris celui de baisser la garde et lever le pied. Il est même probable que personne, aujourd'hui, ne te force concrètement à rempiler. Ta famille de cœur s'inquiète pour ta santé, ta famille politique pour celle de son parti. Certains de tes plus fidèles alliés vont même jusqu'à t'implorer d'arrêter les frais.

Lâcher le pouvoir c'est pire que d'arrêter l'héroïne. Un saut dans le vide, avec une bonne crise d'angoisse comme seul parachute. Y a qu'à voir la tronche des inconnus de la télé-réalité quand un projecteur s'éteint. Le pouvoir n'a jamais été une lumière qu'on braque sur sa tronche, mais un soleil qu'on se sent capable de faire briller sur les lendemains de son peuple.

Enfin, dans le meilleur des mondes.

En es-tu seulement encore capable? C'est quoi le plan? Etre élu, puis remplacé? Comme si personne ne pouvait terrasser Trump à ta place? Certes, la relève est encore un peu faiblarde, mais peut-être moins que ton endurance. C’est vrai, il y a bien un petit parfum romantique à vouloir mourir sur scène. Un peu moins quand c'est la scène internationale. Toi qui disais refuser la retraite «parce que la démocratie est en danger», te voilà en train de la catapulter violemment dans l'inconnu.

Et puis, Joe, «sauver la démocratie», ce n'est pas une excuse. Même pour toi. Au mieux, ça sonne terriblement prétentieux. Au pire, tu considères que Donald Trump a de réelles chances d'emménager une nouvelle fois à Washington.

Le boulot, tu l'as fait.
Et plutôt bien.

Alors, avant de traverser l'année 2024 sur un radeau aussi peu stable que la marche du monde et tes articulations, pose-toi peut-être une question conne. Sans Jill, sans Kamala, mais avec sincérité. Ce genre de questions qui déboulent toujours comme un fantôme, au moment de ranger ballons, bougies et allégresse. Quand il faut lécher les restes de ce gâteau à la noix de coco et en son honneur, seul, debout dans la cuisine et la pénombre.

Sans doute la plus difficile des questions. Que l'on soit papy René ou le président des Etats-Unis.

Pourquoi?

Joe Biden chute en public
Video: twitter
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