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Bordeaux: Non à la police du ramadan

Bordeaux: Non à la police du ramadan
Bordeaux, lieu du drame. 10 avril 2024.image: capture
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Non à la police du ramadan

Mercredi à Bordeaux, le jour où prenait fin le ramadan, un Algérien est mort poignardé, parce qu'il buvait de l'alcool. L'amalgame, pas celui auquel on pense, a tué.
11.04.2024, 17:0012.04.2024, 18:36
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Le ramadan, mois de jeûne en islam, s’est achevé de la pire des manières, mercredi soir, à Bordeaux. Un homme, vêtu d’un qamis et coiffé d’un chèche, un Afghan de 25 ans ayant obtenu l'asile en France en 2021, s’en est pris à deux ressortissants algériens flânant sur les quais de la Garonne. Armé d’un couteau, il a tué l’un d’eux, âgé de 36 ans, et blessé l’autre à la cuisse. La police a abattu le meurtrier. Sur une vidéo, on entend l’une des victimes supplier l'assaillant de lui laisser la vie sauve.

D’après les éléments recueillis par le ministère public, l’auteur des coups de couteau a reproché aux deux Algériens de «boire un coup», de la bière, en l'occurrence. Cette attaque est survenue le jour de l’Aïd el-Fitr, la fête marquant la fin du ramadan. Pour les musulmans qui ont observé le jeûne, un jour de joie, fait de visites et de retrouvailles. De tous les moments en islam, le ramadan est probablement celui où le mot «paix» prend tout son sens.

L'amalgame, celui qui tue, celui qui emprisonne

Malheureusement, parmi les musulmans, on trouve des miliciens et miliciennes dont l’activité principale consiste à faire la police de la charia parmi les musulmans présumés. L’amalgame, s’il y en a bien un – ce message s’adresse aux Quentin et Valentine qui crient à l’islamophobie à tout bout de champ –, c’est celui que pratiquent les flics autoproclamés de la vertu islamique auprès de leurs supposés coreligionnaires. L’apparence joue ici un rôle prépondérant: «musulman d'apparence».

«T’as une gueule de rebeu et tu fais pas le ramadan? Tu finiras en enfer»

Ces paroles ne sont pas agréables à entendre, mais elles valent mieux que la mort infligée avec un couteau. Le délit de faciès est l’une des plaies de l’islam politique.

C’est probablement ce maudit engrenage qui a été fatal à l’Algérien de 36 ans mercredi à Bordeaux. A peine le ramadan avait-il pris fin, que deux hommes d'origine maghrébine se permettaient de boire de l’alcool, le soir, sur la promenade? Le meurtrier leur aura rappelé ce qu’il en coûte d’enfreindre les lois de Dieu lorsqu’on est musulman. L'apostasie est punie de mort, dans une conception rigoriste de l'islam. Mais justement, que savait-il de leur foi, de leur pratique? Rien. En aurait-il su quelque chose, les auraient-il surpris en train de boire de l'alcool, alors qu'ils les avaient vus la veille observer le ramadan, que cela ne l'autorisait à rien. Strictement rien.

Cette habitude du «rappel» est une autre plaie de l’islam contemporain. Des croyants s'estiment autorisés à rappeler à l’ordre religieux des «frères» et «sœurs» oublieux de la pratique. En règle générale, ces rappels se veulent bienveillants. Ils n’en sont pas moins une intrusion insupportable dans le libre-arbitre des individus. De quoi se mêlent ces gens?

Ces «rappels» envahissants

Mardi, à Strasbourg, à un jour de la fin du ramadan, une jeune adolescente de 13 ans de confession musulmane a été agressée à la sortie d'un bus par quatre jeunes mineurs, musulmans eux aussi. Ils lui ont reproché de ne pas respecter le ramadan, ils l'auraient vue en train de manger, rapporte le site Francebleu. Ce rappel n’avait rien de «bienveillant», comme n’avait rien de «bienveillant» la gifle donnée à une serveuse, là encore supposée musulmane en raison de son apparence, au prétexte qu’elle servait de l’alcool. Les faits s’étaient passés à Nice, en 2016, au premier jour du ramadan.

Avant de victimiser les musulmans, on serait bien inspiré d’être lucide sur l’état actuel de l’islam, où la part politico-identitaire est bien trop prégnante, notamment parmi les jeunes.

Le ramadan est un mois à part, plein de sens et de vertus, mais gardons-nous d’idéaliser une pratique avec laquelle les musulmans et les musulmanes s’arrangent dans l’intimité de leur conscience. Sauvons l’intimité, soyons libres de critiquer l'idéologie.

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