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Camps de ski et ramadan: Vaud a trouvé un compromis prometteur

Camps de ski et ramadan: Vaud a trouvé un compromis prometteur
Camp de ski.image: Keystone/Jean-christophe Bott
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Camps de ski et ramadan: Vaud a trouvé un compromis prometteur

Les autorités scolaires vaudoises et l'association faîtière des musulmans du canton ont trouvé une solution permettant aux élèves de déroger au jeûne durant les camps de ski. Pourquoi il faut saluer cet accord.
29.02.2024, 18:4901.03.2024, 07:24
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Dans le présent dossier, il y a deux manières de voir le verre: à moitié plein ou à moitié vide. Voyons-le à moitié plein. En pointant ce qu’il y a d’encourageant. Une «solution» – c’est 24 Heures qui nous l’apprend ce jeudi – a été trouvée entre l'Etat de Vaud et l’Union vaudoise des associations musulmanes (UVAM) de manière à dispenser les élèves musulmans pratiquants de l'«obligation» du jeûne durant la période des camps de ski.

Boire et manger

Le jeûne est l’autre nom du ramadan, le mois sacré en islam, pendant lequel les fidèles se pliant à la règle s’abstiennent de manger et de boire entre le lever et le coucher du soleil. Il commencera le 11 mars et pourra dans certains cas chevaucher des semaines de camp de ski prévues par les écoles vaudoises. Chacun l'imagine bien, la pratique sportive demande des forces. Il ne serait pas raisonnable que des adolescents s’abstiennent de se nourrir et s’hydrater alors qu’ils dévalent les pistes. Il pourrait y avoir là mise en danger de la personne pratiquante comme de tiers.

L’UVAM en a visiblement conscience. Il en va de sa crédibilité en tant qu’acteur religieux. L’UVAM, rappelons-le, souhaite être reconnue par le canton de Vaud comme institution d’utilité publique, au même titre que les Eglises catholique et réformée. Y parviendra-t-elle?

Déroger à une stricte lecture de l’islam

En soi, le ramadan est une pratique religieuse qui ne remet pas en cause l'ordre juridique suisse. Mais en acceptant de déroger à une lecture littérale de l’islam, en vogue dans les milieux musulmans pratiquants, elle fait preuve de responsabilité et participe d’un nécessaire travail de décentrement des individus par rapport à une conception rigoriste de la religion, conception difficilement compatible, dans les faits, avec le régime sécularisé des sociétés occidentales.

On ne peut aspirer à un rôle de partenaire des pouvoirs publics et s'en référer aux lois divines en toute circonstance. Au demeurant, les activités scolaires, camps de ski inclus, sont obligatoires dans le canton de Vaud

Un compromis – un bon compromis – a été trouvé. Il consiste à «rattraper» dans l’année les jours de jeûne manqués au moment du camp de ski.

Ne croyons pas que la chose aille de soi. Il suffit de se reporter au site de l’UVAM, qui fait grand cas de la solution trouvée. On comprend qu’il lui faut à présent convaincre les sceptiques de son bienfondé. «L’UVAM est à disposition des familles pour répondre aux questions», lit-on. Un numéro de téléphone est à leur disposition.

Pourquoi parle-t-on de cela maintenant? Parce qu’on entre dans une période qui mène jusqu’à 2030, durant laquelle le mois de ramadan, dont le début recule de 10 jours d’une année à l’autre, coïncidera avec la tenue de camps de ski. Il est donc préférable d’établir une règle dès à présent. Une règle assez facile à justifier en termes religieux, dans la mesure où l’activité sportive pratiquée loin de chez soi peut être assimilée à un «voyage», qui donne droit en islam à une exemption de ramadan.

Ne pas entrer dans le jeu victimaire

Encore faut-il accepter de faire cette lecture, à une époque où l’islam a pris chez certains une dimension identitaire prétendument non négociable. Des musulmans verront peut-être dans l'arrangement conclu par le canton et l'UVAM une intolérable pression «islamophobe» de la part des autorités vaudoises – on ne peut exclure en effet une certaine pression, qui serait légitime, des pouvoirs publics sur la faîtière musulmane. Il ne faudra pas entrer dans le jeu victimaire, s'il se manifeste. Ce n’est pas à la société d’accueil de s’adapter aux lois des arrivants, ces lois fussent-elles religieuses. C’est aux arrivants de se fondre dans le cadre préexistant, par ailleurs tolérant en Occident.

Les choses s’étaient mal passées en France à l’été 2012, alors que le mois de ramadan allait chevaucher pendant plusieurs années les semaines de colonies de vacances. Un scandale, provoqué par des islamistes, avait éclaté lorsque des moniteurs musulmans d’un camp de surf organisé au bord de l’Atlantique, avaient été renvoyés pour avoir dérogé à leur engagement de se nourrir et s’hydrater durant les jours de la colonie de vacances qui coïncidaient avec le ramadan. A l'époque, la durée quotidienne d'abstinence pouvait atteindre 16 heures d'affilée, sinon davantage. Comment animer un camp sportif du matin au soir sans se sustenter dans l'intervalle?

Flexibilité

On pourra toujours considérer que se nourrir et s’hydrater, quand on est un adolescent, à plus forte raison lorsqu’on est un enfant, devrait être une évidence pour tout le monde, les musulmans pratiquants inclus, dès lors qu’on participe à un camp de ski. On connaît à ce propos les difficultés rencontrées par des clubs de foot pendant le ramadan. Mais là, on a affaire à un cadre scolaire. Il est bon que l'autorité du pouvoir politique démocratiquement élu l'emporte sur une prescription religieuse, flexible en l'espèce. Il faut saluer le pas accompli par l'UVAM.

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