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IA: cette image de Trump cache une stratégie insidieuse

Trump qui prend la pose avec des Afro-Amériains? Ces images ont été générées par intelligence artificielle. Des deepfakes qui lui permettent de prétendre à une certaine popularité dans la communauté n ...
[Il s'agit d'un deepfake, cette photo n'a jamais été prise.]Image: dr

Cette image de Trump cache une stratégie insidieuse

Le candidat républicain à la Maison-Blanche n'est pas le plus populaire vis-à-vis des électeurs noirs. Mais de fausses images circulant sur les réseaux sociaux pourraient changer la donne. Décryptage.
04.03.2024, 18:4805.03.2024, 12:11
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Tous les coups sont permis dans la course à la Maison-Blanche, et Donald Trump peut compter sur ses soutiens pour avancer quelques pions supplémentaires. Des photos de l'ex-président, empêtré dans plusieurs affaires judiciaires, circulent sur les réseaux sociaux. On y voit le candidat républicain posant avec des Afro-Américains.

Il est vrai que le milliardaire, qui brigue un nouveau mandat, après celui de 2016, cherche à draguer cet électorat qui vote majoritairement pour le camp démocrate. Mais ces photos montrant Trump tout sourire n'ont jamais été prises lors de rencontres avec cette communauté noire qui lui fait défaut.

Ces photos de Trump entouré d'électeurs noirs ont été générées par intelligence artificielle.
Cette image a été publiée sur Facebook par Mark Kaye. [Il s'agit d'un deepfake, cette photo n'a jamais été prise.]dr

En réalité, ces images ont été générées par intelligence artificielle.

On doit la publication de l'un de ces clichés à Mark Kaye, un animateur radio conservateur hyper actif sur les réseaux sociaux. Interrogé par la BBC, celui qui a partagé les photos sur son compte Facebook suivi par plus d'un million de personnes se défend d'être un photojournaliste.

«Je ne suis pas là pour prendre des photos de ce qui se passe réellement. Je suis un conteur»
Mark Kaye auprès de la BBC.

Selon le média britannique, le post Facebook comprenait un article sur les électeurs noirs qui soutiennent Trump, ainsi qu'une photo deepfake du candidat républicain. L'animateur radio se défend d'avoir prétendu qu'il s'agissait de la réalité.

«Si quelqu'un vote d'une manière ou d'une autre à cause d'une photo qu'il voit sur une page Facebook, c'est un problème avec cette personne, pas avec la publication elle-même.»
Mark Kaye auprès de la BBC.

D'autres deepfakes avec des Afro-Américains

Sur les réseaux sociaux, la BBC a découvert d'autres photos générées par IA. Des images qui ont un but précis: laisser entendre que l'ex-président américain jouit d'une certaine notoriété auprès des électeurs noirs. C'est ce que confirme le co-fondateur de Black Voters Matter, un groupe qui encourage les noirs à voter. Il a déclaré que ces images manipulées étaient le fruit d'un «récit stratégique» destiné à montrer que Trump est populaire dans la communauté noire.

Trump avait déjà tenté de s'attirer les faveurs de cette communauté en 2020, lorsqu'il visait à se faire réélire. En vain; ces électeurs avaient alors contribué à la victoire de Biden. Mais leur soutien à l'actuel locataire de la Maison-Blanche s'essouffle. Selon un récent sondage du New York Times et du Sienna College, dans six Etats clés, seuls 71% des électeurs noirs soutiendraient Biden en 2024. Il s'agit d'une baisse conséquente par rapport aux 92% qui l'ont aidé à remporter les dernières élections.

Ces photos de Trump entouré d'électeurs noirs ont été générées par intelligence artificielle.
Selon ses partisans, Trump a arrêté son cortège pour poser avec ces hommes. [Il s'agit d'un deepfake, cette photo n'a jamais été prise.]dr

Il n'a toutefois pas pu être démontré que ces deepfakes avaient été directement orchestrés par l'équipe de campagne du candidat républicain. Il n'est pas le seul à avoir été ciblé par des détournements. En janvier, un appel audio automatisé, prétendument émis par Biden, a exhorté les électeurs à sauter la primaire du New Hampshire à laquelle il se présentait. Selon la BBC, un partisan démocrate avait alors lui-même reconnu en être responsable afin, selon ses dires, de démontrer le potentiel d'abus de cette technologie. En dehors des politiques, d'autres célébrités ont elles aussi été victimes de ces deepfakes, comme Taylor Swift.

Des images et un récit trompeurs

Les images générées par l'IA ne viennent vraisemblablement pas directement de l'équipe de Trump, mais de partisans républicains désireux de montrer leur héros sous un jour favorable auprès d'une communauté qu'il peine, jusqu'à présent, à séduire. Mais ces deepfakes s'inscrivent dans un récit qui émane bien de l'ex-président.

En février, Trump a raconté que ses inculpations pénales le rendaient populaire auprès des électeurs noirs, car ces derniers le considéreraient comme une «victime de discrimination». Comme le rappelle le Daily Mail, le candidat républicain est allé jusqu'à «comparer les risques juridiques qui pèsent sur lui à l'héritage historique des préjugés anti-noirs dans le système judiciaire américain».

«J'ai été inculpé pour rien, pour quelque chose qui n'est rien»
Trump auprès des conservateurs noirs de Caroline du Sud.

Et d'ajouter encore: «Beaucoup de gens ont dit que c'est pour cela que les noirs m'aiment bien, parce qu'ils ont été tellement blessés et discriminés, et qu'ils m'ont vu comme si j'étais discriminé. C'est assez étonnant, mais il y a peut-être quelque chose à en tirer».

Cette vraie photo montre Trump en 2020, lors de sa seconde campagne présidentielle, dans le Cabinet Room. Il avait affirmé être «le meilleur président pour les noirs américains en dehors d’Abraham Lin ...
Cette vraie photo montre Trump en 2020, lors de sa seconde campagne présidentielle, dans le Cabinet Room. Il avait affirmé être «le meilleur président pour les noirs américains en dehors d’Abraham Lincoln». Image: ap

Une corrélation effectivement étonnante au vu du racisme dont l'ex-président a pu faire preuve. Le Daily Mail rappelle également qu'en 1989, Trump avait fait publier des annonces dans les journaux pour demander à New York de rétablir la peine de mort. Cinq adolescents noirs et latinos devaient être jugés pour avoir battu et violé une femme blanche à Central Park. Les cinq hommes ont finalement été disculpés en 2002, après qu'un autre homme a admis le crime et qu'il a été établi que leurs aveux avaient été obtenus sous la contrainte.

En 2019, le New York Post écrivait que Trump avait déclaré ne pas vouloir présenter ses excuses pour ses propos en 1989.
En 2019, le New York Post écrivait que Trump avait déclaré ne pas vouloir présenter ses excuses pour ses propos en 1989.Image: new york post

Par ailleurs, toujours selon le journal britannique, sous sa présidence, Trump avait qualifié certains pays d'Afrique de «pays de merde» et déclaré que quatre membres du Congrès devraient retourner dans les pays «délabrés et infestés de crimes» d'où elles viennent. Ces quatre femmes sont Américaines, trois d'entre elles sont d'ailleurs nées aux Etats-Unis.

Les électeurs noirs se laisseront-ils berner par les volte-face du candidat républicain et les deepfakes générées par une partie de ses partisans? Réponse, peut-être, dès ce mardi 5 mars lors du «Super Tuesday», un jour qui concentre les primaires et les caucus dans quinze Etats et un territoire. Les électeurs américains y sont appelés à choisir le candidat de chaque parti.

Chez les Républicains, il ne reste que Nikki Haley pour défier Trump. A Washington, l'ancienne ambassadrice de l'ONU vient de décrocher sa première victoire dans la course à l'investiture face à l'ex-président. Une victoire symbolique, car courue d'avance dans cet Etat historiquement acquis à la cause démocrate. Jusqu'ici, Trump était sorti victorieux dans tous les Etats qui ont déjà voté pour leurs primaires.

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