Tout avait pourtant si bien commencé.
Il y a six mois encore, Ron DeSantis était tout ce qu'il fallait au parti républicain. Un politicien dur, ambitieux, vendeur, dynamique, pas trop moche, pas trop vieux et populaire dans son Etat de Floride. Un «Donald Trump sans les bagages», ni les casseroles. Un conservateur capable de rallier et d'unifier les différentes factions de son parti éclaté. Bref, un type qui en a dans le ventre - malgré sa forme de boulette de viande - pour s'imposer sur la scène politique nationale.
Et puis, patatatra. Sur le point d'être officialisée le 24 mai, selon CBS News, sa candidature s'essouffle déjà. Le soufflé DeSantis tombe à plat.
Projeté depuis six mois sur le devant de la scène nationale comme LE «potentiel rival de Trump», le pas-encore-candidat a accumulé les maladresses et s'est pris les pieds dans tous les dossiers qui fâchent. Avortement, peine de mort, accès aux armes, relations vis-à-vis de la Russie.
Résultat: les sondages le placent de plus en plus loin derrière Donald Trump - actuellement en hausse de 36,9 points, selon Real Clear Politics.
Pour se profiler contre son rival, l'instinct du gouverneur de Floride l'a poussé à adopter une position toujours plus radicale et conservatrice. Son Etat lui a servi de panneau d'affichage de campagne géant.
Une aubaine? Pas tant que ça.
Désireux de dérouler une solide liste de réalisations politiques en guise d'argument de campagne, Ron DeSantis a voulu agir. Beaucoup. Trop, sans doute. En quelques mois, le gouverneur n'a pas chômé, entre sa croisade acharnée contre les «woke» et les trans, l'assouplissement des lois sur les armes à feu, l'application facilitée de la peine de mort et, pour couronner le tout, une loi restreignant l'avortement au-delà de six semaines de grossesse.
L'une des plus draconiennes des Etats-Unis, si extrême qu'il a carrément arraché un «wow!» à l'ancienne présidente du Parti républicain du Nevada, Amy Tarkanian. «Beaucoup de femmes ne savent même pas qu'elles sont enceintes à six semaines. Je suis pro-vie, mais ça, c'est assez extrême», a-t-elle admis la semaine dernière, en marge d'un déplacement de Ron DeSantis dans son Etat.
Bref, à trop vouloir en faire, Ron DeSantis effraie au sein-même de son propre camp.
Sans oublier sa bataille obsessionnelle contre «Woke Disney». Une victoire contre le géant du divertissement annoncée comme facile et rapide, qui s'est transformée en un bain de sang judiciaire sans fin. En passant pour un petit tyran rancunier obsédé par la décapitation de Mickey Mouse, le gouverneur s'est attiré les moqueries de tout le pays.
Au-delà de sa tendance à pousser le bouchon, l'un des principaux problèmes de Ron DeSantis est sans doute ailleurs: humainement parlant, il y a du travail. Pas seulement parce qu'il affiche de curieuses manies alimentaires.
«Au lieu d'incarner une version plus sympathique, sérieuse, réfléchie et honnête de Trump, le gouverneur de Floride l'imite. DeSantis semble toujours chercher un combat et agit généralement comme un égocentrique», souligne le journaliste politique Stuart Rothenberg dans une chronique pour Roll Call.
Ni artiste et showman comme Trump, ni compagnon de bière comme Bush, le quasi-candidat DeSantis va devoir bosser sur son capital-sympathie s'il veut aller plus loin dans la campagne.
Ses derniers déplacements ont révélé un politicien peu doué pour le serrage des mains et le contact rapproché avec les électeurs. Ce qui n'est pas un problème dans un Etat aussi grand que la Floride pourrait coûter cher dans de plus petits Etats, comme l'Iowa ou le New Hampshire.
Attention toutefois à ne pas vendre la peau de DeSantis avant de l'avoir tué. Selon certains analystes, y compris dans l'entourage de Donald Trump, le candidat pourrait regagner du terrain sitôt sa candidature officiellement annoncée.
La campagne ne fait que commencer. Et si ces derniers mois ont bien révélé quelque chose du républicain de Floride, c'est qu'il est du genre hargneux.