Andriy Yermak, conseiller de haut rang du président ukrainien Volodymyr Zelensky et compagnon de longue date, n'a pas mâché ses mots lorsqu'il a mis en garde contre une fin des aides financières américaines. Sans nouvelles aides en matière d'armes et de financement de la part des Etats-Unis, l'Ukraine court un «grand risque» de perdre la guerre contre l'armée russe, a-t-il déclaré lors d'une table ronde mardi à Washington. Il serait alors «impossible» d'atteindre l'objectif du gouvernement ukrainien de libérer tous les territoires occupés et annexés.
Jamais encore un représentant du gouvernement ukrainien n'avait été aussi explicite sur le sujet en plein cœur de la capitale américaine. Andriy Yermak se trouvait à Washington avec une délégation de Kiev qui devait rencontrer des députés de haut rang du Congrès et s'entretenir avec des représentants de l'industrie de l'armement américaine. Il a ainsi évoqué publiquement les conséquences d'un arrêt de l'aide de plusieurs milliards provenant des caisses de l'Etat américain.
Zelensky avait annulé mardi de façon inattendue une intervention prévue devant le Congrès américain. En revanche, il participera au début d'une téléconférence entre les dirigeants des pays du G7 organisée plus tard ce mercredi.
Le président ukrainien a perdu beaucoup de sa force de persuasion à Washington. Les représentants du peuple américain semblent se lasser des mises en garde de Kiev contre une victoire de Vladimir Poutine en Ukraine. Même une remarque bien sentie de la Maison Blanche n'a pas provoqué un changement d'avis. Celle-ci indiquait que les crédits accordés jusqu'à présent à l'Ukraine – plus de 100 milliards de dollars – seront épuisés à la fin de ce mois.
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A Washington, on s'attend à ce qu'un vote test sur un nouveau paquet d'aide à l'Ukraine de 106 milliards de dollars, qui devrait également inclure des fonds pour Israël et Taïwan, échoue mercredi au Sénat. La principale raison de cette impasse ne concerne pas l'Ukraine directement, mais les affaires politiques internes des Etats-Unis: les républicains, minoritaires au Sénat mais majoritaires à la Chambre des représentants, veulent arracher des concessions aux démocrates en matière de politique d'immigration et durcir les lois, face à la crise à la frontière avec le Mexique.
C'est ce que l'on peut lire dans une lettre adressée à la Maison Blanche et rendue publique mardi par le Speaker Mike Johnson. Dans cette lettre, le président républicain de la Chambre des représentants a affirmé qu'un «oui» à un nouveau paquet d'aide à l'Ukraine dépendait directement d'un compromis sur la question migratoire. Et pour les démocrates, il n'en est pas question. Ils ne veulent pas céder au chantage, comme l'a déclaré le sénateur Chris Murphy.
De son côté, Andriy Yermak, a affirmé lors de son intervention à Washington qu'une victoire de l'Ukraine sur le champ de bataille était proche.
Il a ainsi indirectement contredit les rumeurs sur la discorde entre Zelensky et le commandant en chef des forces armées, Valeri Zaloujny. Andriy Yermak est farouchement opposé aux négociations de paix avec Moscou. Il estime que l'Histoire montre que de telles négociations sont inutiles et que la Russie ne cherche qu'à gagner du temps pour redoubler d'efforts dans son invasion.
Le conseiller présidentiel a décrit les troupes russes comme affaiblies, mais il souligne que Poutine fera tout pour donner l'impression, avant les élections présidentielles russes du printemps prochain, que les forces armées ukrainiennes sont en état de faiblesse. Pour Andriy Yermak, la situation est claire: les Etats-Unis et l'Europe doivent tout faire pour lui donner tort.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci