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Une histoire de cul pourrait sauver Donald Trump

Une histoire de cul pourrait sauver Donald Trump
La vie privée de la procureure Fani Willis, qui a inculpé Trump, pourrait se retourner contre elle.images: keystone et getty, montage: watson

Une histoire de cul pourrait sauver Donald Trump

Fani Willis a réussi à inculper Donald Trump. Mais le procès risque désormais de tomber à l'eau, car la procureure a commis une erreur impardonnable.
29.02.2024, 18:5129.02.2024, 18:51
Philipp Löpfe
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Pas de doute, Fani Willis a la jurisprudence dans le sang. Son père était un avocat renommé et a forgé sa réputation en défendant les membres des Black Panthers, un mouvement radical de défense des droits civiques. C'est également lui qui a largement élevé sa fille. C'est pourquoi Fani Willis, aujourd'hui âgée de 53 ans, s'est très vite sentie plus à l'aise dans les palais de justice que sur les bancs d'école. Logiquement, elle a, elle aussi, choisi de faire des études de droit, qu'elle a terminées en 1996.

Depuis 2018, Willis est procureur à Fulton, en Géorgie. Ce comté, majoritairement noir, a fait la une des journaux après les élections présidentielles de 2020. Sans preuve, le camp Trump affirmait qu'il y avait eu des fraudes électorales massives. L'ex-président s'est donc adressé personnellement au secrétaire d'Etat Brad Raffensberger et a exigé de ce dernier, lors d'une conversation téléphonique mémorable, qu'il lui procure les 11 780 voix qui lui manquaient pour remporter les élections en Géorgie.

Hélas pour Trump, ce coup de fil a été enregistré par l'une de ses jeunes collaboratrices. Après le 6 janvier 2021, elle a eu tellement mauvaise conscience qu'elle a fait en sorte que les bandes soient rendues publiques. Le milliardaire avait désormais un gros problème. Et Fani Willis une nouvelle affaire.

Le moins que l'on puisse dire, c'est que la procureure a pris les devants. Alors que l'enquêteur spécial Jack Smith se focalisait sur Trump, elle a ouvert un dossier communément appelé «Rico». Ce code de procédure, conçu pour le crime organisé, permet d'accuser plusieurs personnes en même temps et de les monter les unes contre les autres. La peine minimale encourue en cas de condamnation dans une affaire «Rico» est de cinq ans de prison, sans possibilité de libération conditionnelle.

Plusieurs juristes américains de renom ont donc estimé que l'affaire de Willis constituait la plus grande menace pour Donald Trump, d'autant que ce dernier n'a pas la possibilité, même s'il est réélu, d'annuler une éventuelle condamnation. L'astuce? Les présidents ne peuvent gracier que les crimes nationaux.

Après presque deux ans d'enquête et d'innombrables auditions de témoins, Fani Willis a réussi à convaincre un grand jury que non seulement l'ex-président, mais aussi 18 autres personnes devront répondre de leurs actes. Au début, les choses semblaient très bien se passer pour la procureure.

Comme c'est souvent le cas dans les affaires «Rico», les premiers accusés ont rapidement commencé à plaider coupables en échange d'une peine clémente. C'est le cas de l'avocate Sidney Powell, qui a défendu la thèse absurde selon laquelle les machines à voter auraient été manipulées par Hugo Chávez, le dictateur du Venezuela décédé en 2013.

Les deux anciens avocats de Trump, Kenneth Chesebro et Jenna Ellis, ont également plaidé coupables.

C'est également grâce à Willis que Trump a eu droit à son fameux mugshot, la photo d'identité judiciaire qui lui rapportera, au passage, quelques millions de dollars en merchandising.

Tous ceux qui doutaient encore de l'action de Willis (et ils étaient nombreux) ont commencé à se demander quel procès était le plus menaçant pour Trump: le procès à Washington, où il est question de son rôle dans la prise du Capitole, ou celui de Fulton? Le débat pourrait bientôt s'éteindre tout seul, car le procès en Géorgie est à deux doigts de se casser la gueule. La faute à Fani Willis qui, une fois n'est pas coutume, a écouté ses tripes plutôt que son cerveau.

L'un des accusés, un certain Michael Roman, a appris que la procureure avait une liaison avec Nathan Wade, qui n'est autre que l'homme à la tête de l'enquête qui a visé Trump. Willis a non seulement engagé cet avocat privé, pourtant dénué de toute expérience des affaires Rico, mais lui a offert une rémunération totale de 650 000 dollars. Rien d'illégal ici: cela correspond aux tarifs habituels. Le problème est plus charnel que vénal.

Au point qu'un autre juge a dû intervenir. Son job? Déterminer si la procureure a fait travailler son ancien amant (leur relation est terminée), si elle en a elle-même profité et si les deux anciens tourtereaux ont commis un parjure. Willis assure que leur idylle n'a commencé qu'après l'embauche de Wade. Ils s'accordent également à dire que lors de leurs sorties communes - notamment des vacances aux Caraïbes - les frais ont été partagés.

Le contraire n'a pas encore pu être prouvé. Quant à la date du début de leur idylle, Willis a même signé une déclaration sous serment. Le hic, c'est qu'une ancienne collaboratrice et amie de la procureure a déclaré le contraire, elle aussi sous serment. Son témoignage présente toutefois un grave défaut: la témoin a été licenciée par Willis pour son manque de performance. Il existe cependant d'autres preuves.

L'ancien associé de Wade, un certain Terence Bradley, avait aussi déclaré que la relation entre les deux avait commencé avant l'embauche de Wade. Bradley est toutefois revenu sur ces propos devant le tribunal. Maintenant, il assure que son témoignage initial n'était que pure spéculation.

Le parjure est un grave délit. Si le juge conclut que Willis a menti sous serment, la soupe sera amère pour la procureure. Le procès de Trump lui serait alors retiré et elle serait exclue du barreau. Ce serait seulement la fin peu glorieuse d'une procureure extrêmement douée, mais aussi un cadeau inespéré pour Donald Trump et ses coaccusés.

Donald Trump dédicace la poitrine d'une jeune femme
Video: watson
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