Pour le jet américain F-35, les temps sont durs et ce n'est pas nouveau. Une semaine après qu'un engin «disparu» se soit finalement écrasé sans maître à bord en Caroline du Sud, de sérieux doutes surgissent concernant la capacité de production du constructeur Lockheed Martin.
Le lieutenant-général américain Richard Moore s'est exprimé dans un entretien avec le média spécialisé Breaking Defense.
Le chef adjoint de la planification de l'armée de l'air américaine sort des chiffres concrets: pour pouvoir construire à temps les plus de 2 500 F-35 commandés dans le monde au cours des 14 prochaines années, Lockheed devrait produire au moins 180 appareils par an. Mais problème, la capacité maximale actuelle, qui vient d'être augmentée, n'est que de 156.
Seconde ombre au tableau: tous les appareils construits ne peuvent pas être livrés dans les délais. Cette année, des problèmes de logiciel retardent la livraison. Conséquences: seuls 100 à 120 avions sortiront des ateliers, selon les indications du constructeur, ce qui se traduit par une perte pouvant atteindre 350 millions de dollars, a déjà estimé l'entreprise.
La demande pour cet avion de combat ne cesse d'augmenter, tant de la part de clients existants que de nouveaux. Il y a dix jours, la Corée du Sud a commandé 25 exemplaires supplémentaires en plus de ses 40 appareils déjà en service. Cet été, Israël a également rempilé, avec 25 appareils supplémentaires pour porter sa flotte existante de F-35 à 75 jets.
Enfin, le gouvernement roumain vient de demander au Parlement 5,93 milliards de francs pour l'achat de 32 jets. La Roumanie est déjà le quatrième nouveau client depuis l'invasion russe de l'Ukraine. Jusqu'à présent, 22 pays ont acheté ou commandé des F-35, dont la Suisse. Selon les experts militaires, le potentiel d'acheteurs est loin d'être épuisé, en particulier en Europe de l'Est, au Proche-Orient et en Asie.
En réponse, le fabricant Lockheed Martin a affirmé à Breaking Defense qu'il était en train d'évaluer les moyens d'augmenter ses capacités. Dans les milieux spécialisés, une telle déclaration est accueillie avec la plus grande réserve. Pour cause, l'extension des lignes de production est un projet extrêmement complexe, car non seulement Lockheed Martin, mais aussi les nombreux fournisseurs des différents composants – comme le fabricant de moteurs Pratt & Whitney – doivent augmenter leur production.
Selon Richard Aboulafia, expert américain en aéronautique, un tel accroissement de la production prend des années et comporte d'importants risques économiques. La présentation des tout derniers avions de combat de sixième génération est attendue à partir de 2030, et c'est à ce moment-là que les clients présumés du F-35 pourraient passer au nouveau produit.
Pour le général Richard Moore, Lockheed Martin peut réagir de trois façons. Premièrement, en plaçant les commandes américaines en attente pour favoriser les clients étrangers. Deuxièmement, en se concentrant sur les commandes des Etats-Unis. Ou finalement en augmentant effectivement sa production afin d'honorer toutes les commandes en même temps.
La Suisse est concernée par le deuxième scénario, car elle a passé une commande de 36 appareils, pour 6,035 milliards de francs, auprès du gouvernement américain. Les livraisons ne se font pas en fonction de l'arrivée des commandes, mais selon ce que le ministère américain de la Défense, le Pentagone, juge bon.
Malgré la situation énoncée, tant Lockheed Martin qu'Armasuisse ont récemment affirmé au Tages-Anzeiger que:
Dans le quotidien alémanique, on peut encore lire que la Suisse n'a pas la possibilité de réclamer une peine conventionnelle si les Etats-Unis devaient effectivement livrer plus tard que prévu par le contrat.