«On sait ce que l'on cherche.» Six mois après la disparition très médiatisée du petit Emile dans le hameau du Haut-Vernet, les enquêteurs refusent d'abandonner. Le procureur de la République d'Aix-en-Provence va même plus loin, flirtant avec le jeu de mots de mauvais goût, en évoquant sur BFMTV un «dossier vivant, très vivant». Six mois après sa disparition, Emile, trois ans, est-il toujours vivant? L'espoir fait vivre les autorités qui s'en tiennent à un message qui sonne un peu comme une justification:
Six mois, c'est long. Le 8 juillet 2023, en fin d'après-midi, un petit garçon déjoue la surveillance de ses grands-parents pour s'aventurer dans les ruelles du Haut-Vernet. Rien d'anormal pour les habitants, qui ont l'habitude de le voir fouler le bitume des environs. Ce jour-là, un voisin va l'apercevoir une dernière fois aux alentours de 17h30. Ensuite, plus rien. Pas la moindre trace, pas le moindre indice à se mettre sous la dent. Emile, le «petit garçon au pissenlit sur l'oreille» s'est littéralement volatilisé.
Malgré les profondes et endurantes battues, l'écho médiatique international et la ténacité de toute une région sous le choc, les autorités buteront de longs mois sur un vide sidéral. A-t-il été kidnappé? Tué? Emporté par un animal sauvage? S'est-il simplement égaré?
Rapidement les regards se tourneront vers la famille, qu'on dit discrète, voire recluse, mais aussi très pratiquante. Les premiers éléments montreront que le père fréquentait certains milieux d'extrême droite. Suffisant pour tirer les premiers plans sur une comète désespérément déserte. D'abord unie dans l'angoisse et la tristesse, la communauté s'est peu à peu méfiée de tout et de tout le monde. Le village s'étant retrouvé sous cloche durant plusieurs longues semaines, une atmosphère de suspicion permanente s'est immiscée entre les bâtisses.
Et l'absence d'un véritable coupable provoquera une chasse au bouc émissaire, dans le voisinage, pour «définir le méchant de l'histoire», nous expliquait l'anthropologue française Fanny Parise.
Bien sûr, des perquisitions ont eu lieu. Et certaines pistes ont été fouillées plus que d'autres. Mais une fois les battues terminées, il fallait considérer «le temps long». Une expression judiciaire qui veut dire que l'enquête change de vitesse.
Six mois après la disparition d'Emile, cette vitesse n'a pas changé. «Nous sommes dans le temps long des analyses techniques» confirme Jean-Luc Blachon, procureur d'Aix-en-Provence, à BFMTV. Les mots des autorités n'offrent volontairement aucune précision. Un enquêteur a confié à la chaîne française qu'ils «sont à la recherche d'un détail qui pourrait faire basculer l'affaire».
Le procureur précise également que «la piste de l'accident, elle est toujours là, elle existe». Et qu'aucune «garde à vue n'a été décidée depuis le début de l'affaire». Mais Jean-Luc Blachon «refuse de faire des hypothèses».
Les enquêteurs comptent beaucoup sur «l'analyse de l'ensemble des éléments recueillis», dont un nombre «important» de données numériques et téléphoniques. Selon Midi Libre, «chaque vidéo issue des distributeurs de billets est soigneusement analysée: un suspect pourrait avoir retiré de l’argent dans ce laps de temps». Jusqu'à ce péage de l'autoroute A51, qui pourrait «déterminer si une personne dont le téléphone avait borné dans le secteur au moment de la disparition est passée par là», précise pour sa part Le Figaro.
Vont-ils retourner sur le terrain? BFMTV indique que, même six mois après la disparition du petit Emile, tout est encore «envisageable». Sur place, personne n'a l'intention de se décourager, parce qu'il y a cette «inquiétude de ne pas réussir à faire aboutir ce dossier». Que ce serait «une faute morale de ne pas garder espoir» et que «dans cette enquête, personne n'a abandonné», tentait de rassurer, mardi, le procureur de la République.
Les longues et imposantes analyses techniques semblent être la tâche de la dernière chance pour les enquêteurs. Comme pour évoquer l'impensable, une source policière chuchotera au Figaro qu'à l'interne «on se rapproche d’un cold case , je le crains...»