Une nouvelle «nuit bleue» a frappé la Corse, avec une vingtaine d'explosions visant des habitations dans la nuit de dimanche à lundi. Des actions revendiquées par le FLNC dix jours après la venue de Macron qui a proposé à l'île une «autonomie dans la République»:
Une enquête a été ouverte pour tentative d'assassinat, destruction et tentative par moyen dangereux pour les personnes, fabrication d'engin explosif, le tout en relation avec une entreprise terroriste, ainsi que pour participation à une association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation d'une destruction par substances explosives ou incendiaires susceptible d'entraîner la mort et d'un acte de terrorisme.
Le parquet national antiterroriste enquête sur 22 explosions et leur revendication par le Front de libération nationale corse (FLNC).
Dès lundi midi, le Front de libération nationale corse (FLNC) a revendiqué ces explosions dans un communiqué transmis au quotidien régional Corse-Matin, avec ces deux uniques phrases en français: «Nous n'avons pas de destin commun avec la France. Revendiquons la série d'actions de la nuit du 08 au 09 octobre 2023». Le texte se terminait par cette mention en corse: «A Francia Fora» («la France dehors», ndlr).
Ce communiqué est signé par les slogans respectifs, en langue corse par deux mouvements clandestins autrefois rivaux, qui avaient déposé les armes au milieu des années 2010 et sont aujourd'hui réunis sous la même bannière du FLNC.
Dans le détail, une «dizaine d'attentats» ont été recensés en Corse-du-Sud, touchant des résidences secondaires et un ancien centre des impôts désaffecté à Ajaccio, a indiqué le procureur de la République, Nicolas Septe:
En Haute-Corse, une douzaine de faits ont été dénombrés, touchant des maisons en construction, une résidence secondaire et un lotissement partiellement occupé.
De nouvelles explosions dans la nuit fait monter le nombre d'attentats et de tentatives d'attentats en Corse à au moins 18. Ce chiffre pourrait être amené à évoluer à nouveau ⬇️ https://t.co/yF10OJQwe1
— Corse-Matin (@Corse_Matin) October 9, 2023
«Cela ressemble à ce qu'on a pu voir ces derniers mois. (...) Il y a notamment un dispositif avec un extincteur modifié, qui n'a pas explosé. La plupart des explosions sont dues à des bouteilles de gaz, mais les choses restent à déterminer. Ce sont des dispositifs artisanaux», a expliqué François Thévenot, procureur de la République par interim de Bastia.
Cette «nouvelle nuit bleue» évoquée par une source proche du dossier intervient une dizaine de jours après la visite du président de la République qui a proposé à la Corse «une autonomie dans la République», tout en prévenant que ce «moment historique» ne se fera pas «sans» ou «contre» l'Etat français.
Il venait clore 18 mois de discussions qui avaient débuté après l'explosion de violences insulaires de 2022, consécutives à la mort du militant indépendantiste Yvan Colonna, agressé en prison où il purgeait une peine à perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac en 1998.
La Corse connaît depuis près de deux ans une recrudescence d'incendies criminels et d'explosions visant principalement des résidences secondaires, le plus souvent assortis de tags nationalistes. Ces explosions ont été souvent revendiquées, certaines par le FLNC, d'autres par le mouvement GCC (Ghjuventù Clandestina Corsa), un mouvement clandestin de jeunesse corse.
Selon une source judiciaire en août, 50 enquêtes «en lien avec des incendies criminels ou faits de destruction» en Corse ont été ouvertes par le parquet national antiterroriste depuis janvier, contre 22 en 2022, trois en 2021 et quatre en 2020.
Dans une autre revendication début août, le groupe appelait à la création d'une «plateforme de résistance patriotique» estimant qu'«aucun accord entre la Corse et la France ne pourra être qualifié d'historique tant qu'il n'entérinera pas la reconnaissance des droits du peuple corse sur sa terre».
Le FLNC était apparu pour la première fois le 6 mai 1976, jour où policiers et gendarmes trouvèrent la profession de foi de ce nouveau groupe dans les décombres de 18 attentats à l'explosif commis lors d'une première «nuit bleue». Il est depuis devenu une nébuleuse opaque, résultat de scissions, luttes fratricides et recompositions.
La dernière «nuit bleue» de ce genre remonte à la nuit du 9 au 10 mars 2019, avec sept habitations endommagées. (ats/jch)