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Ces deux Suisses racontent pourquoi ils marchent vers Gaza

Marche vers Gaza: Ne pas agir c'est être complice
Des milliers de personnes se sont données rendez-vous au Caire en Egypte pour La Marche Mondiale vers Gaza, prévue le 15 juin prochain. En médaillon, le photographe Frédéric Choffat, l'un des marcheurs. montage watson

Ces deux Suisses racontent pourquoi ils marchent vers Gaza

Des milliers de personnes se sont donné rendez-vous au Caire en Egypte pour La Marche Mondiale vers Gaza, prévue le 15 juin. Leur objectif? Rejoindre la frontière entre l'Egypte et Gaza pour exiger la fin du blocus de l'aide humanitaire. watson a contacté deux marcheurs suisses, Samuel Crettenand et Frédéric Choffat. Récit.
13.06.2025, 20:5114.06.2025, 13:07
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Samuel Crettenand, militant pacifiste neuchâtelois, et Frédéric Choffat, photographe genevois, sont au Caire pour la marche vers Gaza. Les deux hommes sont poussés par un but commun, «celui de réagir face au génocide en cours à Gaza», expliquent-ils. Qu'espèrent-ils de leur venue en Egypte, quels sont leurs objectifs et comment comptent-ils arriver à la frontière entre l'Egypte et l'enclave?

Détention et refoulement

La connexion téléphonique est mauvaise, la voix de Frédéric Choffat est saccadée, le Genevois de 52 ans est arrivé le 11 juin au Caire, il a passé la douane sans encombre.

«Je suis un homme blanc, privilégié, habillé en touriste, aucun signe montrant que je venais pour marcher vers Gaza, on ne m'a pas posé de questions particulières à l'aéroport»
Frédéric Choffat

Il ajoute que, selon les informations partagées sur les différents canaux de communications des marcheurs, plusieurs personnes ont été détenues, d'autres arrêtées dans leur hôtel et certaines refoulées directement depuis l'aéroport du Caire. Samuel Crettenand, l'un des coordinateurs de la Marche vers Gaza nous explique qu'il a été informé de ce qui se passait à l'aéroport, des personnes détenues des heures en zone internationale, puis relâchées sur le territoire égyptien, il ajoute que des délégations entières ont été remises de force dans l'avion, «sans aucun motif».

Le Genevois précise que, selon ses informations, les refoulements systématiques concernaient principalement les personnes d'origine maghrébine ou venant des pays du Maghreb. «Ces refoulements sont absolument arbitraires», Samuel Crettenand nous glisse qu'un marcheur arabophone a entendu des policiers à l'aéroport dire qu'ils avaient reçu l'ordre de renvoyer 300 personnes.

Ni autorisé ni interdit

Les deux hommes qui n'ignorent pas que cet événement international met sous pression les autorités égyptiennes, mais tiennent à souligner qu'il n'est pas question de fâcher le pays hôte ni de rallier la population égyptienne à ce mouvement.

Samuel Crettenand raconte que chaque délégation a contacté en amont les autorités égyptiennes «pour expliquer que ce génocide était perpétré par Israël avec le soutien des pays occidentaux». Pour l'instant, «l'Egypte n'a ni autorisé ni interdit la marche» relève Samuel Crettenand. En effet, selon France info l'Egypte «souligne qu'il importe de faire pression sur Israël pour lever le siège de la bande de Gaza et permettre l'accès humanitaire», mais il a aussi rappelé la nécessité de respecter les procédures pour les «visites de délégations étrangères voulant exprimer leur soutien au droit des Palestiniens dans la zone frontalière adjacente à Gaza », qui doivent obtenir une «autorisation préalable». Un véritable jeu d'équilibriste compris par les militants.

«Nous ne souhaitons pas donner de leçons à l'Egypte qui subit des pressions d'Israël et des Etats-Unis, nous savons que sa position est difficile, mais ce qui nous importe c'est d'ouvrir un couloir humanitaire vers Gaza.»
Samuel Crettenand

Frédéric Choffat et Samuel Crettenand affirment que rien ne pourra être fait sans l'accord des autorités égyptiennes. En effet, l'organisation de la marche a préalablement donné son planning et son plan aux autorités égyptiennes pour arriver jusqu'à la frontière avec Gaza. Les militants se déplaceront en bus du Caire à la ville d'El-Arich (à 245 km de la capitale égyptienne), puis marcheront 50 km entre le nord du désert du Sinaï jusqu'à la frontière avec la ville de Rafah à Gaza.

Là, les militants négocieront avec les autorités égyptiennes l'ouverture du terminal de Rafah.

«Nous n'avons pas l'intention de forcer le passage, nous sommes pacifistes, mais voir autant d'enfants blessés, mutilés et affamés volontairement, alors que des centaines de camions humanitaires sont bloqués à la frontière égyptienne, cela défie l'entendement»
Samuel Crettenand

Marcher pour ne pas sombrer

Mais pourquoi ces deux Suisses ont-ils décidé de se rendre jusqu'en Egypte pour faire entendre leur voix? Au bout du fil, Frédéric Choffat semble prendre quelques seconde de réflexion. «J'ai toujours été une personne avec un curseur d'injustice élevé, entendez par cela que cette situation me révolte et que l'inaction de nos politiques face à ce massacre de civils me touche profondément», il poursuit en évoquant le Dr Hicham El Ghaoui, praticien valaisan revenu de Gaza qui a témoigné des horreurs vécues par la population assiégée.

«Dr Ghaoui a vu des enfants tués par des drones, vous vous rendez-compte du niveau de barbarie? Chez nous, un enfant tué est un scandale absolu, pourquoi devrait-on se taire concernant les enfants palestiniens? »
Frédéric Choffat

Samuel Crettenand qui manifeste pacifiquement depuis le début des bombardements dès la fin 2023, a lui aussi été bouleversé par la souffrance des familles palestiniennes.

«J'ai vu des vidéos montrant des petits enfants chercher les morceaux de chairs de leurs parents dans les décombres et les mettre dans des sacs. Ces morceaux de corps sont pesés et s'ils atteignent 7 kg, on considère que c'est une personne et elle est recensée comme victime. Ces images horribles existent et elles m'ont mis en marche. Marcher, ça aide à ne pas sombrer.»
Samuel Crettenand

Alors que Samuel Crettenand est animé par un sentiment de révolte face à l'inaction de la communauté internationale, Frédéric Choffat admet avec émotion que son voyage en Egypte lui permettait d'échapper à un sentiment d'inaction et de maintenir en quelque sorte un équilibre psychologique, car «marcher vers Gaza, c'est aussi ne pas rester immobile face à ces horreurs évitables». Le Genevois conclut: «J'espère que notre action changera le cours des événements, car comme le disait Max Frisch ‹pire que le bruit des bottes, c'est le silence des pantoufles qui fait peur›. Dans cette situation, ne pas agir, c'est se rendre complice.»

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source: sda / frustaci
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Video: watson
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