La Finlande fait ce qui semble encore impensable en Suisse: elle soutient l'Ukraine, envahie par la Russie, avec une technologie militaire innovante. Et les forces armées nationales et l'industrie de l'armement locale en profitent également. En effet, selon la chaîne de télévision finlandaise Yle, ainsi que le média britannique United24, un nouveau drone de combat a été présenté mercredi à Helsinki et devait bientôt être utilisé sur les champs de bataille en Ukraine. La production en série serait en cours.
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Mais d'autres pays de l'Otan profitent également du nouveau savoir-faire militaire de la Finlande en matière de drones. Le pays a rejoint l'alliance de défense transatlantique en 2023 alors que la Suisse fait cavalier seul en matière de drones de combat – ce qui lui vaut des critiques de la part des milieux spécialisés.
Ce nouveau type de drone de combat est appelé Steel Eagle ER. L'abréviation signifie «Extended Range» et indique qu'il a une portée étendue par rapport au modèle précédent. Ce qui rend le drone si dangereux, c'est la charge explosive qu'il transporte. Celle-ci est appelée «Steel Burst» et son fonctionnement rappelle la charge à fragmentation américaine «Claymore».
Des ingénieurs finlandais ont mis au point la charge qui contient des explosifs et qui «tire» de nombreux projectiles en acier et en tungstène lorsqu'elle explose. Le tungstène est un métal lourd qui était autrefois utilisé comme filament dans les lampes et qui joue aujourd'hui un rôle central dans la production d'armes. Il possède les points de fusion et d'ébullition les plus élevés de tous les éléments chimiques.
Selon les informations fournies par l'entreprise, de telles balles peuvent transpercer le toit d'une voiture ordinaire ou légèrement blindée. Ce drone de combat serait destiné à attaquer l'infanterie. Si des soldats se trouvaient sur une surface de la taille d'un terrain de football, trois drones avec de telles charges pourraient suffire à les tuer ou à les blesser tous.
On ne connait pas la portée du Steel Eagle ER. Toutefois, le drone de combat serait résistant aux interférences, la guerre électronique menée par les Russes ne devrait donc pas l'affecter.
Selon l'association finlandaise des industries de la défense et de l'aéronautique (PIA), plus de dix entreprises de défense finlandaises travaillent directement avec des entreprises ukrainiennes. L'entreprise high-tech qui fabrique les drones de combat innovants pour l'Ukraine en fait partie. Elle s'appelle Insta et serait une partenaire stratégique des forces armées finlandaises.
Depuis l'invasion de la Russie en 2022, l'Ukraine n'a cessé de s'adapter aux défis du champ de bataille et de modifier les drones commerciaux pour des missions de reconnaissance et d'attaque.
Un représentant d'Insta a reconnu que de nombreux Etats, typiquement ceux dont les programmes d'acquisition sont traditionnellement assez lents, sont dépassés par l'évolution rapide des exigences – en particulier en ce qui concerne la guerre des drones.
La Finlande estime avoir un avantage dans le développement de drones militaires. Une porte-parole de l'industrie de défense finlandaise a déclaré l'année dernière que le pays disposait de l'espace nécessaire pour tester les drones, contrairement à l'espace aérien très chargé de l'Europe centrale.
La chaîne de télévision finlandaise constate:
Il faut noter que la Suisse joue depuis des années un rôle de premier plan dans la recherche et le développement de la technologie des drones civils. Mais jusqu'à présent, les responsables n'ont pas eu la main heureuse en ce qui concerne les drones militaires. Les drones de reconnaissance achetés par l'armée (sous le conseiller fédéral Ueli Maurer) en Israël posent problème.
De plus, le transfert de connaissances de la recherche vers l'industrie de l'armement coince, comme l'a déclaré le directeur du Centre suisse des drones et de la robotique (CSDR) du Département de la défense (DDPS) 2023.
En 2024, l'Office fédéral de l'armement et d'autres hauts représentants de la Confédération ont créé une «Taskforce Drones» afin de réagir à l'évolution de la menace autour des petits drones militaires. Il a ensuite été dit que l'armée devrait pouvoir tester les premiers drones de combat de sa propre production dès 2025.
Roland Siegwart, expert en drones et professeur à l'EPFZ, a récemment fait part de son scepticisme à la Radio Télévision Suisse (RTS):
Au niveau mondial, la Suisse est certes à la pointe de la technologie des drones, a confirmé l'expert. Mais c'est justement dans le domaine des petits drones militaires que les choses bougeraient le plus, car d'autres pays investissent massivement. C'est pourquoi il estime qu'un changement de mentalité est nécessaire dans notre pays.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci