Evgueni Prigojine a-t-il pris trop de risques? Depuis des mois, le chef de la troupe de mercenaires Wagner s'attaque au Kremlin en raison de la tournure que prend la guerre en Ukraine. Dans une vidéo, il montrait des combattants morts près de la ville ukrainienne de Bakhmout, désignait leurs cadavres, criait les noms de Choïgou et Guerassimov.
Le chef du groupe Wagner accuse le ministre de la Défense Sergueï Choïgou et le chef d'état-major général Valeri Guerassimov de ne pas fournir suffisamment de munitions et de sacrifier la vie des combattants de Wagner. Il a annoncé le retrait de ses combattants de Bakhmout le lendemain du défilé de la victoire du 9 mai. Il a également déclaré ne pas avoir peur de s'opposer aux «bureaucrates».
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Toutefois, il ne semble pas que les mercenaires de Wagner se soient complètement retirés. Prigojine lui-même a annoncé que ses combattants avaient gagné du terrain, et les Ukrainiens font toujours état d'une présence de Wagner sur le front. Ce que certains observateurs contredisent.
Aujourd'hui, ceux que Prigojine qualifie de «bureaucrates» répliquent. Le cercle du pouvoir russe commencerait à s'en prendre ouvertement au chef Wagner. Comme le rapporte l'Insitute for the Study of War (ISW), Prigojine est probablement mis sous pression par certains siloviki, des hommes issus des services secrets et de l'armée qui se sont enrichis dans l'entourage du président russe Vladimir Poutine.
Des allégations concernant ses ambitions politiques circulent désormais sur des canaux Telegram liés à l'administration présidentielle russe et au ministère de la Défense. Prigojine est accusé de profiter de la guerre en Ukraine et de la bataille de Bakhmout pour s'établir politiquement. Lui-même a confirmé que ce reproche était très répandu au sein du Kremlin, comme le souligne l'ISW.
Les siloviki font également pression sur les politiciens et les fonctionnaires politiques pour qu'ils cessent de collaborer avec Prigojine — et avec succès, semble-t-il. Le président de la Douma russe, Wjatscheslaw Wolodine, aurait cessé de le soutenir. Et ce ne serait pas le seul.
Il est légitime de se demander pourquoi Prigojine peut se permettre d'agir aussi librement, malgré l'étau qui se resserre autour de lui. Récemment, une enquête du Washington Post révélait que le chef de Wagner aurait tenté de passer un accord avec les Ukrainiens. Il proposait d'échanger des informations sur les positions russes contre le retrait des troupes de Kiev de Bakhmout. L'Ukraine aurait refusé, car elle n'avait pas confiance en Prigojine. Le principal intéressé ainsi que le Kremlin démentent.
Mais selon les experts de l'ISW lundi, le Kremlin était probablement au courant des communications entre le chef Wagner et l'Ukraine avant même la publication de l'article du média américain. Pourquoi n'a-t-il rien fait? La Russie est actuellement dépendante des mercenaires de Wagner, notamment dans la ville de Bakhmout.
Tant que cela sera le cas, le Kremlin ne s'en prendra pas au chef du groupe Wagner, rapporte l'ISW. Mais il est probable que des mesures soient préparées pour le discréditer en le faisant passer pour un traître.
t-online, cck / Traduit et adapté par Pauline Langel