Le rituel est devenu familier. Ouvrir le kit, faire tourner l'écouvillon, le plonger dans la solution et mélanger, puis attendre impatiemment le résultat. Sauf que cette fois, c'est au creux de la bajoue que l'on prélève le frottis et, surtout, il ne s'agit pas d'un dépistage du Covid-19 mais d'un test ADN pour chien.
La popularité de ces tests, apparus il y a une quinzaine d'années, a récemment explosé aux Etats-Unis.
Embark Vet, fondée en 2015 et qui commercialise l'un des kits les plus populaires aux Etats-Unis, assure avoir connu une croissance de 235% entre 2019 et 2020. Et la pandémie a encore amplifié le mouvement, confie une vétérinaire.
Ils ne sont pas donnés, de 100 à 200 dollars selon les kits (entre 94 et 188 francs). Mais au pays où le chien est roi, ce n'est pas un problème: les Américains ont dépensé près de 104 milliards pour leurs animaux en 2020, selon l'American pet products association, soit l'équivalent... du PIB de la Slovaquie.
Une fois l'échantillon envoyé par la poste, l'attente pourra durer entre deux semaines et un mois. Premier objectif, avoir le coeur net quant à la race du toutou.
Parfois, lorsque le maître a acquis un chien de race, il s'agit de vérifier qu'il n'y a pas eu erreur sur la marchandise. C'est le cas d'Ashley Ternyila, qui vit dans le New Jersey. Le berger allemand qu'elle avait acheté auprès d'un éleveur ressemblait un peu trop à un loup, malgré sa fourrure blanche, alors «pour mettre fin aux rumeurs, on l'a fait tester».
Mais pour les propriétaires ayant fait le choix de l'adoption auprès de refuges, il s'agit plutôt de tenter de combler les zones d'ombres de la vie d'avant de celui qui fait désormais partie intégrante de la famille.
Mila Bartos, une avocate de 51 ans, a adopté ses trois chiennes, Natty, Maisie et Mabel, et pour chacune a procédé à un test ADN, s'offrant ainsi un aperçu de leur arbre généalogique:
Elle a ainsi découvert que Natty, mélange de pitbull, beagle, chow-chow et berger allemand, avait un cousin vivant tout près, à Baltimore, ou encore que Maisie, pour moitié labrador et au brun pelage lustré, descendait d'une longue lignée de chiens de concours.
C'est notamment ce «désir de comprendre, prédire et anticiper les actions de leurs chiens» qui renforce la curiosité des propriétaires à l'égard de la race de leur toutou, analyse Allen McConnell, professeur de psychologie spécialisé dans le rapport des humains à leurs animaux de compagnie.
Les races de chiens sont en effet porteuses de stéréotypes - «les labradors interagissent bien avec les enfants, les pitbulls sont des chiens de garde agressifs» – qui, même s'ils se révèlent parfois inexacts, peuvent aider à interpréter la conduite de l'animal, détaille-t-il.
Levi Novey a aussi été rassuré de voir que Summer ne présentait pas de prédisposition à une quelconque maladie génétique. Car c'est l'un des arguments de vente pour ces tests: les plus chers permettent de passer en revue l'ADN à la recherche des gènes provoquant anomalies cardiaques, trouble des fonctions rénales, surdité prématurée...
L'association des vétérinaires américains encourage d'ailleurs à consulter l'un de ses praticiens «avant de prendre une quelconque décision sur la foi des résultats de ces tests».
Et puis, les apprentis testeurs devraient peut-être aussi prendre garde aux répercussions... juridiques. Aux Etats-Unis comme ailleurs, certaines races de chiens sont vues comme agressives, à l'instar des pitbulls ou les staffordshire terriers, et se trouvent donc bannies de certains appartements.
Or dans ce pays très procédurier, si le chien adopté est à moitié pitbull, «ça pourrait poser problème» auprès d'un propriétaire trop regardant, prévient Mila Bartos en sa qualité d'avocate. «Et si vous ne souhaitez pas connaître cette information, alors vous ne devriez probablement pas faire de test ADN.» (ats/jch)