En réponse aux protestations continues contre le système théocratique, les autorités iraniennes bloquent régulièrement l'accès à Internet, en particulier pour les services de messages courts comme Whatsapp et Instagram. Cela doit empêcher le mouvement de protestation d'organiser des rassemblements et de publier des images d'interventions violentes des forces de sécurité.
Les Etats-Unis assouplissent, désormais, leurs sanctions Internet contre l'Iran afin d'aider les manifestants à contourner le blocage du réseau. Les expériences de la guerre en Ukraine servent de modèle.
Le fondateur de Tesla et milliardaire, Elon Musk, est au centre de l'initiative américaine contre la République islamique. Son entreprise Starlink a plus de 2000 satellites dans l'espace qui doivent assurer l'accès à Internet partout dans le monde sans que les gouvernements nationaux puissent l'empêcher.
Jusqu'à présent, les sanctions de leur gouvernement empêchaient les entreprises américaines fournissant des accès Internet d'entrer en Iran. Washington a désormais décidé qu'elles peuvent proposer aux Iraniens des logiciels modernes permettant de contourner les interdictions d'Internet, ainsi que des outils de vidéoconférence, des technologies pour le stockage sécurisé des données et un Internet par satellite.
Washington a également supprimé une disposition qui obligeait les fournisseurs d'accès à Internet à prouver que leurs services n'étaient utilisés en Iran qu'à des fins personnelles et non gouvernementales.
«Le gouvernement iranien a peur de ses propres citoyens», a expliqué le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken pour justifier cette décision. Musk, qui avait demandé l'assouplissement des sanctions sur Internet, a réagi sur Twitter en annonçant: «Activez Starlink».
Des millions d'Iraniens protestent depuis dix jours contre la police religieuse qui a tué une jeune Kurde de 22 ans lors d'un contrôle de son voile. Ils demandent l'abolition de l'ensemble du système théocratique mis en place après la révolution de 1979.
Le président Ebrahim Raïssi a annoncé que l'Etat interviendrait «avec détermination» contre les protestations. Les médias proches du gouvernement annoncent que plus d'un millier de leaders du mouvement de protestation ont été identifiés, et que des arrestations ont commencé. Selon le décompte des défenseurs iraniens des droits de l'homme, plus de 50 personnes ont été tuées jusqu'à présent dans les affrontements.
Internet joue un rôle décisif dans les protestations dans ce pays de 80 millions d'habitants. Deux Iraniens sur trois utilisent les médias sociaux, en particulier Whatsapp et Instagram. Ces derniers jours, les autorités ont réduit à plusieurs reprises l'accès à Internet. Whatsapp, Instagram et Linkedin ont été touchés dans tout le pays, a annoncé samedi NetBlocks, une organisation pour la liberté d'Internet.
Dans la guerre d'Ukraine, l'utilisation de services Internet américains a pu changer la donne. Après le début du conflit en février, Musk a envoyé des milliers d'appareils de réception par satellite Starlink en Ukraine, contrant ainsi les tentatives de la Russie de perturber le réseau sur le territoire de l’adversaire.
Les soldats ukrainiens sur le front utiliseraient le service satellite pour communiquer avec leur commandement. En outre, Starlink a été utilisé pour le pilotage de drones de combat ukrainiens. Musk et le gouvernement américain ont payé les appareils – qui coûtent environ 500 euros pièce – et les frais d'environ 100 euros par mois et par utilisateur.
Il n'est pas certain que cet exemple puisse être reproduit en Iran. Le journal Shargh, un média des réformateurs iraniens, a annoncé ce week-end qu'il y avait désormais presque 40 points d'accès à Starlink dans le pays. Le nombre continue d'augmenter, a rapporté le journal. On ne sait, toutefois, pas comment et à quelle vitesse les antennes paraboliques pour Starlink peuvent être introduites en contrebande en Iran et qui paie le déploiement.
En outre, Starlink ne fonctionne qu'avec des stations terrestres situées à moins de mille kilomètres d'un utilisateur. Reste à savoir si le réseau actuel de ces stations est suffisant pour couvrir l'Iran. Starlink n'existe pas encore dans les pays voisins de l'Iran. Omid Rezaee, un journaliste iranien en Allemagne, a déclaré à notre journal que Starlink n'aiderait donc pas les manifestants pendant la vague de protestation actuelle.
Il n'est pas non plus certain que les logiciels américains puissent soutenir le mouvement de protestation. Rezaee a déclaré qu'il s'attendait tout au plus à un effet à moyen ou long terme.
Si les autorités iraniennes coupent complètement Internet, l'aide ne sera d'aucune utilité pour les manifestants, comme le reconnaît le gouvernement américain. Les nouvelles mesures américaines permettent aux Iraniens de faire face plus facilement aux «instruments répressifs» du gouvernement de Téhéran, a fait savoir le département d'Etat américain. Cela ne signifie pas pour autant que ces instruments n'existent plus.
Malgré tout, Téhéran s'inquiète de l'initiative américaine. Le gouvernement iranien, qui se plaint habituellement des sanctions américaines, a réagi avec colère à leur assouplissement sur Internet: «C'est honteux».