C'était une «annonce de succès» qui, avec du recul, s'avère en fait plutôt gênante: quatre jours avant l'assassinat d'Ismaël Haniyeh, le ministre iranien des Renseignements, Seyed Esmail Khatib, avait invité des représentants des médias locaux. Le sourire aux lèvres, il a annoncé fièrement le démantèlement «d'un réseau d'intrus du Mossad». Ceux-ci auraient «assassiné certains de nos scientifiques et saboté nos principales installations».
Après l'assassinat du chef du Hamas, il faut désormais repartir à zéro. Car l'explosion mortelle de la semaine dernière dans le quartier huppé de Saadabad, au nord de Téhéran, représente une catastrophe imaginable pour les services de sécurité iraniens. Ali Vaez, directeur de l'International Crisis Group en charge de l'Iran, résume:
Le choc est donc toujours aussi profond dans la capitale du Moyen-Orient. Selon les médias américains et saoudiens, les services secrets iraniens auraient entre-temps arrêté tous les employés de la maison d'hôtes dans laquelle Haniyeh a trouvé la mort et confisqué leurs appareils électroniques pour les analyser. De hauts responsables de l'armée et des services secrets chargés de la sécurité de Téhéran auraient également été placés en détention.
L'enquête se concentre sur les deux aéroports civils de la ville, où les équipes de sécurité passent en revue les caméras de surveillance dans les halls de départ et d'arrivée. Selon le New York Times, les services secrets iraniens partent apparemment du principe que les auteurs de l'attentat se trouvent toujours dans le pays.
Le journal conclut que ces derniers auraient déposé deux mois auparavant l'engin qui a tué Haniyeh dans la maison d'hôtes du gouvernement iranien. Les autorités du pays ont contredit cette version des faits - sans doute pour ne pas passer pour de parfaits incapables.
Un porte-parole des Gardiens de la révolution a affirmé que c'est un «projectile à courte portée avec une tête explosive d'environ sept kilogrammes, tiré depuis l'extérieur de la maison d'hôtes» qui a touché la victime.
Le représentant du Hamas en Iran, Khaled Qadoumi, a entre-temps confirmé cette annonce. Dans un entretien avec le portail d'information londonien Amwaj Media, il a déclaré:
Un drone aurait pu tirer le projectile, qui se serait écrasé exactement là où se trouvait le téléphone portable de Haniyeh, «juste à côté de sa tête». Son smartphone aurait été piégé par un logiciel espion – par le biais d'un faux message WhatsApp – pour le localiser.
Aucune de ces pistes ne se vérifie pour l'heure. Ce que l'on retient, en revanche, constate le New York Times, c'est le «constat bouleversant que personne n'est vraiment en sécurité en Iran, même le jour de la prestation de serment du président, lorsque les mesures sont renforcées». Pas même le guide de la révolution Ali Khamenei, qui était particulièrement proche de Haniyeh.
Un cercle de gardes du corps encore plus rapproché entourait l'ayatollah lors de la cérémonie funéraire du leader du Hamas vendredi. Le dirigeant a quitté les funérailles peu de temps après, visiblement déstabilisé.
Mercredi matin, immédiatement après l'attentat, Khamenei avait annoncé des représailles directes contre Israël. Les alliés des Iraniens au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen pourraient également y participer. Plus de six jours se sont écoulés depuis.
Alors qu'Israël et ses alliés se préparent à d'éventuelles frappes de missiles en provenance de la République islamique, celle-ci devrait travailler d'arrache-pied pour combler les nombreuses failles de sécurité mises au jour – et celles qui viendront probablement encore – après l'attaque ciblée contre le chef du groupe terroriste.
«Ces violations de sécurité dévastatrices exigent différentes mesures et stratégies», déclare Sasan Karimi, un analyste vivant à Téhéran, lors d'un entretien téléphonique. Impossible pour lui d'évaluer le temps nécessaire à l'Iran pour se repositionner dans ce domaine. Il reste donc à voir si le pays osera riposter sans avoir pour autant comblé ses failles. Cela pourrait déclencher un nouvel incendie dans la région.
L'Iran reçoit manifestement de l'aide de la Russie pour se redéployer. Le secrétaire du Conseil de sécurité russe chargé des exportations d'armes, Sergueï Choïgou, s'est rendu lundi à Téhéran pour intensifier la coopération stratégique avec l'Iran. Un jour plus tôt, un avion gros porteur russe avait atterri dans la capitale iranienne. Il aurait livré des radars modernes et des «systèmes de défense aérienne avancés».
(Adaptation française: Valentine Zenker)