Avec une certaine intensité, Israël a réussi à frapper le Hezbollah ces dernières semaines. La mort du chef Hassan Nasrallah vendredi a été le point culminant de nombreux attentats contre l'organisation terroriste chiite. La brièveté et la densité des annonces de succès donnent parfois l'impression qu'Israël peut attaquer et détruire à volonté les structures du Hezbollah.
Après tout, avant Nasrallah, Israël avait déjà éliminé d'autres acteurs renommés du Hezbollah. Environ deux mois auparavant, Israël avait tué le chef militaire du Hezbollah Fouad Choukr, de nombreux bipers ont explosé il y a deux semaines (37 personnes sont mortes). Selon le New York Times, Israël avait également préparé cette action pendant des années et avait créé une société fictive à Budapest qui participait à la production des appareils.
Peu après, une attaque aérienne à Beyrouth a tué un groupe de plus d'une douzaine de chefs militaires d'élite, dont Ibrahim Akil. La mort de Nasrallah a ensuite suivi. Dimanche déjà, un autre commandant du Hezbollah est mort, touché par une seule bombe. Mais les médias n'y prêtent plus guère attention. Les attaques israéliennes sont devenues trop courantes.
Mais le fait qu'Israël ait aujourd'hui éliminé avec précision une grande partie de l'équipe dirigeante en l'espace de quelques semaines est le résultat d'années de préparatifs intensifs. Celles-ci ont été menées de manière conséquente et à grands frais au cours des deux dernières décennies. Ils reposent sur une réforme complète des services de renseignement et sur la mise en place d'un réseau d'espionnage sans précédent. Tout a commencé en 2006, alors qu'Israël ne pouvait guère diffuser de messages de réussite lors de missions similaires.
A l'époque, Israël était déjà en guerre contre le Hezbollah. L'armée a, en effet, tenté à trois reprises de tuer Nasrallah, mais à chaque fois, elle a échoué. Israël ne pouvait tout simplement pas vaincre le Hezbollah. Finalement, les Nations unies ont négocié un cessez-le-feu après 34 jours – et Israël a alors commencé le travail dont il profite aujourd'hui.
Ainsi, des collaborateurs du gouvernement ont rapporté au Financial Times une réorientation complète des efforts des services de renseignement israéliens vis-à-vis du Hezbollah. Auparavant, les services n'avaient pas réussi à obtenir d'informations décisives sur l'adversaire. L'«Unité 8200», une unité de renseignement électronique du service de renseignement militaire Aman, a notamment intensifié ses efforts de renseignement sur le groupe terroriste.
Elle a développé des programmes permettant de mieux intercepter les téléphones portables et autres communications du Hezbollah. De plus, de nouvelles équipes ont été créées au sein des forces de combat afin de s'assurer que des informations précieuses puissent être rapidement transmises aux soldats et à l'armée de l'air.
Selon différents rapports de presse, la surveillance par drones et par satellites ultramodernes a également constitué un instrument important. Grâce à ces moyens techniques, les bastions du Hezbollah ont pu être photographiés en continu et les modifications apportées aux bâtiments ont été documentées. Les prises de vue ont été régulièrement comparées entre elles. Un ancien collaborateur des services secrets israéliens a qualifié ce travail de «travail de Sisyphe» dans le New York Times. Mais cela a manifestement porté ses fruits. L'armée a récemment attaqué un grand nombre de ces bâtiments surveillés.
La surveillance de personnes individuelles par le service de renseignement extérieur Mossad est également déterminante. Une fois les membres du Hezbollah identifiés, les services secrets alimentent souvent une énorme base de données avec leurs déplacements quotidiens, rapporte le Financial Times. Les données proviennent par exemple du téléphone portable des épouses, du compteur kilométrique des voitures ou de l'emplacement des propres téléphones portables. Elles sont complétées par des informations provenant d'autres appareils comme des drones, une caméra de surveillance piratée devant laquelle ils passent par hasard ou le microphone de la télécommande d'un téléviseur moderne.
Les services secrets israéliens se distinguent également de ceux d'autres pays en ce sens qu'ils sont nettement plus enclins à prendre des risques et qu'ils sont confrontés à moins d'obstacles juridiques. C'est ce que rapportent d'anciens officiels américains et israéliens au New York Times. Israël aurait ainsi infiltré des unités de commandement clandestines en profondeur au Liban afin d'entamer des missions sensibles.
«Et ils sont extraordinairement patients», explique Chip Usher, un ancien analyste de la CIA pour le Moyen-Orient, au New York Times à propos des services secrets israéliens.
Ainsi, pendant des années, «Unit 8200» a recueilli des informations importantes sans les utiliser directement.
L'armée a néanmoins porté des coups isolés. En 2009, le Mossad a collaboré avec la CIA pour tuer Imad Mugniyah, un agent du Hezbollah, en Syrie. En 2020, Israël avait des informations selon lesquelles le chef du Hezbollah Nasrallah devait rencontrer le général Qassim Suleimani, un commandant des brigades iraniennes Al-Quds. Mais Israël a renoncé à attaquer Nasrallah. Au lieu de cela, les Etats-Unis ont éliminé Suleimani lors d'une attaque de drone à l'aéroport de Bagdad.
«Israël disposait de nombreuses capacités et informations qui n'attendaient que d'être utilisées», a déclaré un ancien représentant du gouvernement au Financial Times. Et de conclure: «Nous aurions pu utiliser ces capacités bien plus tôt dans cette guerre, mais nous ne l'avons pas fait.»
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)