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Evangile, l'IA qui choisit les victimes de l'armée israélienne

Israël utilise l'intelligence artificielle pour choisir les cibles de ses bombardements dans la bande de Gaza.
Un bombardement israélien sur la bande de Gaza le 3 décembre 2023. Image: EPA

Voici Evangile, l'IA qui choisit les victimes de l'armée israélienne

Israël recourt de plus en plus à l'intelligence artificielle pour choisir ses cibles dans la bande de Gaza. Cela aurait permis de démultiplier le nombre d'attaques.
04.12.2023, 18:4805.12.2023, 11:37
Thomas Wanhoff / t-online
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Depuis la fin de la trêve, Israël a de nouveau attaqué des maisons et des tunnels présumés du Hamas dans la bande de Gaza. Jusqu'à présent, la manière dont Israël désigne ses cibles restait mal connue. D'une part, les militaires et les services secrets écoutent bien sûr les communications radio des terroristes, d'autre part, il y a des espions qui signalent les mouvements suspects. Mais un autre outil semble jouer un rôle bien plus important: «Gospel», de son nom anglais (Evangile en français).

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En hébreu, on appelle «Habsora» ce système qui propose des cibles potentielles. Il est piloté par une intelligence artificielle, et tourne à une vitesse époustouflante, selon une grande enquête de The Guardian menée en collaboration avec le magazine +972 et le journal Local Call. En novembre, le commandement israélien aurait identifié 12 000 cibles potentielles. Selon l'enquête, le nombre d'identifications aurait doublé, passant de 50 à 100 par jour.

Selon ses dires, l'armée israélienne (Tsahal) a déjà attaqué 200 cibles dans la bande de Gaza depuis la fin de la trêve vendredi. Les offensives des forces terrestres, aériennes et navales ont eu lieu au nord et au sud du territoire côtier bouclé. Des positions ont également été visées dans les villes de Khan Junis et de Rafah au sud.

Il est probable que Gospel y soit pour quelque chose. Selon The Guardian, Tsahal a expliqué que le système «produit des recommandations en extrayant rapidement et automatiquement des informations, dans le but d'obtenir une correspondance totale entre la recommandation de la machine et l'identification effectuée par une personne».

Ces dernières années, les machines IA auraient constitué une base de données de 30 000 à 40 000 personnes considérées comme des adversaires potentiels d'Israël.

Des quantités de données transformées en cibles

Aviv Kochavi, qui était chef de Tsahal jusqu'en janvier, avait déjà fait l'éloge des systèmes d'IA avant l'attaque du Hamas. Il estime «qu'une machine produit plus efficacement que n'importe quel être humain d'énormes quantités de données et les transforme en cibles». Et de poursuivre à propos de cette machine qu'à sa mise en service, elle était déjà capable il y a deux ans de cracher jusqu'à 1000 cibles par jour. La moitié d'entre elles auraient également été attaquées.

«Tsahal en 2023 n'est pas seulement différent de Tsahal en 82 ou 73, mais aussi de l'armée d'il y a dix ans», a-t-il déclaré.

«Chaque brigade dispose, aujourd'hui, d'un appareil de renseignement sophistiqué qui rappelle "The Matrix" et fournit des informations en temps réel»
Aviv Kochavi, ancien chef de l'armée israélienne

De toutes les révolutions technologiques, «l'intelligence artificielle sera probablement la plus radicale, pour le meilleur et pour le pire», a ajouté Aviv Kochavi.

Objectif officiel: éviter les victimes civiles

Difficile de savoir d'où les machines obtiennent leurs données. Selon The Guardian, les experts estiment qu'elles proviennent d'enregistrements de drones, de conversations interceptées et de communications électroniques ainsi que d'autres sources. A partir de là, des schémas sont ensuite établis pour savoir comment et où les suspects peuvent se trouver.

Selon les médias israéliens, les cibles de l'IA doivent être choisies avec le plus grand soin. Le journal Yedioth Ahronoth a expliqué que cela permettrait d'éviter des victimes civiles. Une source militaire israélienne de haut rang a déclaré à The Guardian que l'armée mesurait «très précisément» le nombre de civils quittant un bâtiment juste avant une attaque.

«Nous utilisons un algorithme pour déterminer le nombre de civils restants. Il nous indique le vert, l'orange, le rouge, comme un feu de signalisation»
Une source militaire israélienne de haut rang the guardian

Le nombre de victimes n'est pas à la baisse...

Le nombre élevé de victimes civiles à Gaza laisse toutefois planer le doute à ce sujet. Même si l'on tient compte du fait que c'est l'autorité sanitaire contrôlée par le Hamas qui fournit les chiffres, ceux-ci restent très élevés. On parlerait de dizaines de milliers de victimes civiles. Même le premier ministre Benjamin Netanyahou l'a reconnu.

«Regardez à quoi ressemble la bande de Gaza désormais», a déclaré à The Guardian Richard Moyes, le chercheur qui dirige Article 36, un groupe qui milite pour la réduction des dommages causés par les armes.

«Nous assistons à la destruction à grande échelle d'une zone urbaine par des armes lourdes. Les faits ne confirment pas la précision et la violence contenue brandies par l'armée»
Richard Moyes, chercheur à la tête du groupe Article 36 the guardian

Selon les informations de Tsahal, 15 000 cibles ont été définies au cours des 35 premiers jours de la guerre et les attaques ont suivi en conséquence. Selon The Guardian et les journalistes israéliens de +972 et Local Call, dès qu'une cible est choisie, les militaires savent combien de victimes civiles il y aura.

Critique de l'automatisation

Des experts de ces systèmes basés sur l'IA ont déclaré que de tels outils avaient considérablement accéléré le processus de création des cibles.

«Nous préparons les cibles automatiquement et travaillons selon une liste de contrôle», a déclaré une source qui travaillait auparavant dans le domaine.

«C'est vraiment comme dans une usine. Nous travaillons vite et nous n'avons pas le temps de nous pencher en détail sur l'objectif. Nous sommes jugés sur le nombre d'objectifs que nous pouvons atteindre.»
Une source anonyme qui a travaillé dans le domaine

Richard Moyes met donc en garde contre l'utilisation de systèmes d'IA.

«Il y a un risque que les personnes qui s'appuient sur ces systèmes deviennent des rouages dans un processus mécanisé et perdent la capacité d'évaluer de manière sensée le risque de dommages civils.»
Richard Moyes, chercheur à la tête du groupe Article 36

Traduit de l'allemand par Valentine Zenker

L'attaque du Hamas contre Israël, en images
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L'attaque du Hamas contre Israël, en images
Des habitants de la ville d'Ashkelon, dans le sud d'Israël, évacués par la police.
source: ap / tsafrir abayov
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Gaza après les bombes
Video: watson
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