Après la Suède, l'extrême droite fait une nouvelle percée en Europe avec la victoire de Giorgia Meloni aux législatives de dimanche en Italie.
En restant dans l'opposition à tous les gouvernements qui se sont succédé depuis les législatives de 2018, Fratelli d'Italia (FdI) s'est imposé comme la principale alternative, passant de 4,3% à environ un quart des voix, selon les premiers sondages de sortie des urnes, devenant ainsi le premier parti du pays:
Si ces résultats se confirmaient, FdI et la Ligue remporteraient ensemble «le pourcentage le plus élevé de votes jamais enregistré par des partis d'extrême droite dans l'histoire de l'Europe occidentale de 1945 à aujourd'hui», a relevé le centre italien d'études électorales (CISE).
La formation fondée à la fin 2012 par Giorgia Meloni avec des dissidents du berlusconisme devance le parti démocrate (PD) d'Enrico Letta, qui n'a pas réussi à susciter un vote utile pour faire barrage à l'extrême droite et ne recueille qu'entre 17 et 21%. Le taux de participation à la clôture des urnes chute à 64,07%, contre 73,86% en 2018.
Ce séisme politique intervient deux semaines après celui qui, en Suède, a vu la victoire d'un bloc conservateur comprenant les Démocrates de Suède (SD), parti issu de la mouvance néonazie qui a réalisé une forte percée, devenant la première formation de droite du pays nordique.
Dans ce qui a été perçu à Rome comme un avertissement sans frais, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a rappelé que l'UE disposait «d'instruments» pour sanctionner les Etats membres portant atteinte à l'Etat de droit et à ses valeurs communes.
Bête noire de Bruxelles, le premier ministre hongrois Viktor Orban et son homologue polonais Mateusz Morawiecki ont adressé dimanche soir leurs «félicitations» à Giorgia Meloni.
Fratelli d'Italia doit son succès autant aux promesses non tenues de ses adversaires et au vent de «dégagisme» qui souffle sur la péninsule qu'au charisme de sa dirigeante.
Cette Romaine de 45 ans qui, jeune militante, disait admirer le dictateur Mussolini, est parvenue à dédiaboliser son image et rassembler sur son nom les peurs et les colères de millions d'Italiens face à la flambée des prix, au chômage, aux menaces de récession ou à l'incurie des services publics.
Le gouvernement devra notamment gérer la crise causée par l'inflation galopante, l'Italie croulant déjà sous une dette représentant 150% du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce.
Dans ce pays à l'instabilité gouvernementale chronique, les experts s'accordent déjà sur la courte espérance de vie de la coalition victorieuse, un mariage de raison entre trois alliés aux ambitions concurrentes.
Sans expérience gouvernementale à part un passage éphémère au ministère de la jeunesse (2008-2011), la dirigeante aura fort à faire pour gérer ses encombrants alliés, bien plus expérimentés: Silvio Berlusconi a été plusieurs fois chef de gouvernement et Matteo Salvini, ministre de l'intérieur et vice-premier ministre.
Dans le dossier ukrainien, l'Europe et les alliés de l'Italie, membre de l'OTAN, scruteront également la répartition des portefeuilles entre les trois partis. Si Giorgia Meloni est atlantiste et soutient les sanctions frappant Moscou, Salvini s'y oppose. (ats/jch)